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04. Roman noir - Page 57

  • Michaël Mention : Adieu Demain. Le monstre d’aujourd’hui.

    Adieu demain, rivages/noir, Yorkshire, Michael Mention, David PeaceVéritables entités maléfiques les monstres d’aujourd’hui sont désormais incarnés par les sérial killers dont l’image a été largement dévoyée avec l’apparition de personnages tels que Dexter ou Hannibal qui nous content leurs aventures au travers d’un « art délicat » qu’ils pratiqueraient pour le plus grand bien de la communauté. Effrayantes, leurs aventures « raffinées » sont pourtant à mille lieues des atrocités commises par Francis Heaulme, Guy Georges, Peter Sutcliffe et consort.

     

    Dans le domaine, ce sont des écrivains comme James Ellroy et David Peace qui sont parvenus à restituer le contexte mental et social dans lequel ont évolué leurs bourreaux respectifs au travers de récits qui font, de nos jours encore, office de référence en la matière.

     

    Avec Adieu Demain, Michaël Mention reprend le flambeau et nous retournons dans le Yorkshire, abandonné par David Peace, pour effectuer un voyage à travers le temps qui débutera en 1969 et  s’achèvera un fameux jour de septembre 2001. C’est par les regards d’un tueur naissant dans l’ombre de l’Eventeur du Yorkshire et des deux enquêteurs chargés de l’arrêter que l’auteur va égrener une actualité angoissante qui colle littéralement à la peau des principaux protagonistes du récit.

     

    20 ans après l’arrestation du fameux éventreur, la police se retrouve avec un nouveau tueur sur le bras qui transperce ses victimes féminines avec des carreaux d’arbalète. Le superintendant Mark Burstyn est chargé de l’enquête et s’adjoindra les services d’un jeune enquêteur Clarence Cooper qui va s’impliquer au delà des limites raisonnables pour se retrouver confronter à ses propres angoisses qui ne seront pas sans conséquences pour son équilibre mental.

     

    Dans Adieu Demain, il y a tout d’abord l’ombre de David Peace, auquel l’auteur rend d’ailleurs un hommage appuyé, qui plane sur le récit qui se décompose en deux parties. Vous allez découvrir dans un premier temps la jeunesse de Peter Griffith (personnage librement inspiré du tristement célébre tueur à l’arbalète, Stephen Griffiths) jusqu’à sa rencontre, avec Paul Witcliffe (inspiré de Peter Sutcliffe) interné, comme lui, dans un hôpital psychiatrique. Puis dans la seconde partie vous suivrez les pérégrinations de Mark Burstyn et de son accolyte Clarence Cooper qui vont traquer un tueur en série qui s’en prend une nouvelle fois aux femmes du Yorkshire.

     

    Il faut bien l’avouer que l’on ne pouvait pas faire autrement que de comparer le roman avec ceux de David Peace et craindre le pire ce qui est loin d’être le cas. Michaël Mention s’en tire plus qu’honorablement et nous plongeant au cœur d’un récit extrèmement prenant où l’actualité égrenée au fil des années embrasse les personnages pour en faire une espèce d’acteur à part entière qui interviendra même dans le final surprenant de ce roman. Car il faut l’admettre, Michaël Mention est un manipulateur qui sait fourvoyer ses lecteurs sans toutefois tomber dans les excès peu crédible du rebondissement à répétition. Outre l’actualité, c’est la  thématique de la peur revient tout au long de l’histoire avec les phobies des principaux suspects qui font écho aux nouvelles anxiogènes d’un monde qui semble devenu complètement hors de contrôle.

     

    Si l’écriture est assez classique c’est principalement pour son sens de la transition que l’on appréciera Adieu Demain où l’auteur passe d’un personnage à un autre autre par le prisme d’un fait divers, d’une chanson ou d’un grand fait d’actualité qui accentue le rythme trépident du roman.

     

    Adieu Demain est le second tome d’une trilogie qui a débutée avec Sale Temps Pour le Pays. Bien plus abouti que le premier opus on ne peut que se réjouir de découvrir le prochain roman d’un auteur qui va désormais compter dans le paysage sinistre des sérial killers.

     

    Michaël Mention : Adieu Demain. Editions Rivages/Noir 2014.

    A lire en écoutant : Faze Wave interprété par The Cave Singer. Album : No Witch. Jagjaguwar 2011.

     

  • VICTOR GISCHLER : COYOTE CROSSING. AU MILIEU DE NULLE PART.

    victor gischler, coyote crossing, jim thompson, 1275 âmes, Cormac McCarthyUne ville paumée au beau milieu d’un état poussiéreux, un adjoint du shérif dépassé sont les archétypes de nombreux romans qui débarquent dernièrement sur les étales des librairies depuis le succès de Cormac McCarthy, « Non ce pays n’est pas pour le vieil homme ! », chef-d’œuvre du roman noir américain, commenté ici.

     

    Coyote Crossing de Victor Gishlerse situerait dans la veine d’un film de Quentin Tarantino selon le commentaire de l’éditeur et il faut bien avouer qu’au niveau de la syntaxe et de la dramaturgie on a plutôt la sensation de lire une espèce de scénario mal ficelé qui nous livre parfois au détour des pages quelques scènes assez originales.

     

    Ancien musicien paumé, Toby Sawyer est retourné dans son trou natal pour endosser à mi-temps l’uniforme de shérif adjoint. Pour sa mission d’un soir, il est contraint de surveiller un cadavre truffé de plomb. La tâche ne s’avérant guère excitante, Toby part rejoindre sa maîtresse. Au retour de son escapade romantique, Toby s’aperçoit que le cadavre a pris la poudre d’escampette. Toute une nuit pour retrouver le corps perdu va l’amener à faire des rencontres aussi denses que sanglantes. Flics corrompus, gangs hispaniques, rednecks déchainés, Toby survivra-t-il à cet enchaînement de hordes sauvages tout en préservant son bébé que sa femme vient d’abandonner.

     

    victor gischler, coyote crossing, jim thompson, 1275 âmes, Cormac McCarthyLe roman sec et nerveux est bourré d’actions. On peut le dire, on n’a guère le temps de souffler au détour de cet amoncellement de personnages stéréotypés qui s’entrecroisent sans que l’auteur daigne s’y attarder. Une volée de plomb et on passe à autre chose. Un peu simpliste comme système qui n’amène pas grand chose à une histoire incohérente où l'on s'entretuerait à tout va, sans que le moindre habitant n'intervienne durant la nuit. Et puis le personnage central n’est guère crédible alors qu’on le présente comme un paumé romantique qui se révèle au gré du roman comme un flic débrouillard et sanguinaire qui n’aurait pas peur de dégommer une tripotée de truands sauvages. Quelques scènes originales, comme la destruction d’un motel abritant une nuée de gangsters et le combat dans le poste de police, sauvent le roman d’un naufrage insipide. 

     

    victor gischler, coyote crossing, jim thompson, 1275 âmes, Cormac McCarthyOn dira de Coyote Crossing qu’il s’agit d’un roman sans prétention et parfois distrayant qui se lit rapidement, ce qui est salutaire pour le lecteur, et après avoir tourné la dernière page, on ne pourra pas s’empêcher de penser à Nick Corey, shérif emblématique du roman de Jim Thompson dans 1275 âmes pour se dépêcher de lire ou relire ce polar d’envergure qui a inspiré avec plus ou moins de succès de nombreux auteurs !

     

     

    Victor Gischler : Coyote Crossing. Editions Denoël 2013. Traduit de l’anglais (USA) par Frédéric Brument.

    A lire en écoutant : Los Lobos : Border Town Girl. Album : Wolf Track, Best of Los Lobos. Rhino 2006.

  • DAVID PEACE : GB 84. LA REVOLTE DES GUEULES NOIRES

    Capture d’écran 2013-11-10 à 15.19.03.pngSi durant toute la durée de la tétralogie, commentée ici et , chroniquant les heures sombres du West Yorkshire, David Peace s’employait à truffer ses textes d’une actualité servant à mettre en relief les motivations des personnages et les faits divers qui jalonnaient leurs parcours respectifs, il en va tout autrement avec GB 84 où l’actualité devient le thème central de ce roman flamboyant.

     

    Mars 1984, pour protester contre la restructuration sauvage des houillères de Grande-Bretagne, les mineurs du Yorkshire vont entamer une grève qui s’étendra dans tout le pays et qui durera un an. Le conflit entre la commission national du charbon soutenue par le gouvernement Thatcher et le syndicat national des mineurs présidé par Arthur Scargill s’apparentera à une guerre sans merci où les parties ne lâcheront pas la moindre concession. Et c’est au travers du regard de trois protagonistes que vous découvrirez les manigances et les combats souterrains que se livrent deux blocs extrêmes qui savent déjà que la défaite est synonyme de chute et de discrédit.

     

    Il y a tout d’abord Neil Fontaine, barbouze, garde du corps et homme des basses œuvres dont la mission est de mettre tout en place pour briser et discréditer la grève des mineurs. Il navigue entre le monde souterrain de mercenaires extrémistes sans scrupules et les coulisses d’un pouvoir qui n’en a guère d’avantage.

     

    Terry Winters, membre de la direction du syndicat national des mineurs, se trouve au cœur des manœuvres financières d’un syndicat acculé par le gouvernement à livrer sa trésorerie auprès des tribunaux qui leur inflige de lourdes amendes. Paranoïa, corruption et illusions sont le lot quotidien d’un syndicat condamné au succès.

     


    Capture d’écran 2013-11-10 à 15.17.09.pngEt puis il y a le témoignage poignant du quotidien de mineurs qui se retrouvent au cœur d’une grève interminable, d’un combat violent et sans concession entre un gouvernement inflexible, des policiers toujours plus violent. On découvre  le calvaire de familles exsangues financièrement, d’hommes épuisés par les piquets de grèves et par les trahisons de leur voisins, amis, et camarades de travail qui souhaitent reprendre le travail. Un clivage entre les « jaunes » et les grévistes qui laissera des cicatrices profondes qui ne se refermeront jamais.

     

    Avec un texte syncopé à l’extrême, David Peace nous fait passer des uns aux autres dans un style flamboyant qui frôle la folie. Cette folie qui semble d’ailleurs être le trait d’union entre tous ces personnages lancés dans une course désespérée qui ne laissera personne indemne, pas même le clan victorieux. Paranoïa, manipulations, coups bas seront le quotidien de protagonistes qui ne peuvent désormais plus s’entendre. Des protagonistes aux égos surdimensionnés qui se défient par l’intermédiaire d’une population ouvrière sacrifiée sur l’autel d’idéologies extrêmes qui ne peuvent que conduire à une lutte meurtrière.

     

    Capture d’écran 2013-11-10 à 15.16.25.png

    Comme à l’accoutumée avec David Peace, c’est à bout de souffle que vous achèverez GB 84, un roman épique et tragique qui vous narre par le menu la mort d’une caste ouvrière et le changement de cap d’une nation désormais livrée aux mains d’un libéralisme économique triomphant.

     

    La folie d’une nation contée avec la démesure d’un auteur ! David Peace est un génie !

     

    David Peace : GB 84. Rivages/Noir 2009. Traduit de l’anglais par Daniel Lemoine.

    A lire en écoutant Syncronicity II de Police. Album : Syncronicity. A&M Records 1983.

     

  • PASCAL DESSAINT : LES DERNIERS JOURS D’UN HOMME. LA TRAGEDIE DES MAINS D’OR.

     

    Capture d’écran 2013-10-25 à 18.00.04.pngOn a souvent qualifié le roman noir de littérature contestataire parce qu’il s’employait à dénoncer des faits de société que peu d’autres genres littéraires s’emploient
     à relater. Avec Les Derniers Jours d’un Homme, Pascal Dessaint évoque le scandale de la fermeture brutale de l’usine Métaleurop et de ses ouvriers licenciés sans aucun plan social qui doivent désormais survivre dans une région complètement sinistrée par le chômage et la pollution.

     

    Trois parties au titres puissamment évocateurs : Le Deuil, La Mémoire et La Tempête subdivisent cette alternance de deux voix que plusieurs années séparent. Il y a tout d’abord Clément, ancien ouvrier reconverti dans l’élagage, qui, après la mort de sa femme, doit élever seul sa petite fille Judith. A travers son regard, nous observons cette région ravagée par la pollution et le désespoir de ses habitants à la perspective d’une fermeture prochaine de leur usine. Des années plus tard, alors que le site industriel est en cours de démolition, c’est au tour de sa fille Judith d’évoquer les circonstances tragiques de la mort de son père en rencontrant les acteurs qui en ont été les témoins. C’est l’oncle Etienne qui fera le lien entre ces deux personnages que la mort a séparé beaucoup trop tôt. Confident de l’un et père de substitution pour l’autre, l’oncle Etienne, handicapé au niveau du bras droit, est un original au cœur généreux quelque peu porté sur la boisson. Témoin impuissant d’une machinerie sociale écrasante qui le dépasse il sera la mémoire de Clément et le guide de Judith dans ce monde ouvrier en pleine décomposition.

     

    Par de petites touches intimistes Pascal Dessaint nous entraine dans cette chronique d’une mort annoncée sans pour autant verser dans le larmoyant. Toute l’histoire est teintée de dignité et de bassesses qui sont les dualités intrinsèques de chaque être humain poussé dans les retranchements du désespoir. On suit les périples de deux personnages qui se sont employés à s’aimer sans pour autant parvenir à se découvrir. C’est  grâce à la sensibilité et aux souvenirs de l’oncle Etienne que Clément et Judith parviendront à s’extraire de leur réserve et de leur pudeur respective pour trouver un semblant d’humanité dans une région minée par le silence et les regrets. Tragique pour Clément et source d’espoir pour Judith le réveil de ces deux personnages engoncés dans un quotidien blafard balayé par la poussière nous permet de découvrir le quotidien d’une population engourdie par l’absence de perspective d’avenir.

     

    Capture d’écran 2013-10-25 à 18.45.01.png

    Tour Metaleurop (crédit photo : La Voix du Nord)

     

    Une multinationale basée en Suisse (Glencore) qui ferme une usine (Metaleurop à Noynelle-Godault) sans préavis en laissant un site contaminé, plus 800 ouvriers sur le carreau et une population décimée par les cancers et leucémies voici la réalité noire que Pascal Dessaint s’est employé à dénoncer dans Les Derniers Jours d’un Homme. Une réalité plus noire que n’importe quel roman.

     

     

    "J’voudrais travailler encore, travailler encore.

    Forger l’acier rouge avec mes mains d’or

    Travailler encore, travailler encore

    Acier rouge et mains d’or"

                Bernard Lavilliers : Les Mains d’Or 

     

    Pascal Dessaint : Les Derniers Jour d’un Homme. Editions Rivages/noir 2013.

    A lire en écoutant : Les Mains d’Or de Bernard Lavilliers. Album : Arrêt sur Image. Barclay 2002.

  • DENNIS LEHANE : ILS VIVENT LA NUIT. L’ETHIQUE MYTHIQUE DES TRUANDS.

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    J’ai toujours eu un doute sur la qualité des œuvres auxquelles on attribuait des prix littéraires et cette règle n’échappe pas à l’univers du polar avec cet Edgar 2013 du meilleur roman décerné à Dennis Lehane pour son dernier roman Ils Vivent la Nuit. On est en droit de se demander si ce n’est pas pour ses ouvrages précédents comme Gone Baby Gone, Ténèbres Prenez-moi la Main, Shutther Island, Mystic River et Un Pays à l’Aube que Dennis Lehanne a été récompensé cette année. Mais alors n’aurait-il pas été plus judicieux de lui donner l’Edgar « Grand Maître » qui récompense l’ensemble d’une œuvre plutôt que lui octroyer une distinction pour un roman qui est certes assez bon, sans toutefois atteindre le niveau que l’on peut attendre de la part d’un des grands auteurs du polar américain.

     

    Avec Ils Vivent la Nuit, Dennis Lehane se penche à nouveau sur la fatrie Coughlin qu’il nous avait présenté dans Un Pays à l’Aube.  En 1926, période faste de la Prohibition, la ville de Boston est gangrénée par la corruption et les luttes de pouvoir intestine de la pègre. C’est dans ce milieu qu’évolue le plus jeune des frères Coughlin, prénommé Joe qui décide d’embrasser la carrière de gangster au grand dam de son père, officier de police respecté bien que corrompu. Après un séjour en prison où il fait ses classes auprès d’un vieux parrain de la Mafia, Joe va se rendre à Ybor en Floride pour mettre en place tout un empire clandestin qui prendra de plus en plus d’essort. Au gré des alliances, des trahisons Joe Coughlin va se faire une place dans ce monde interlope des trafiquants et découvrir, en toile de fond historique, par l’entremise de la belle Graciella, les prémices des remous révolutionnaire qui vont secouer l’île de Cuba.

     

    Avec l’annonce très rapide du rachat des droits du livre afin de l’adapter au cinéma on est en droit de se demander si ce roman, contrairement au trois adaptations précédentes (Mystic River, Gone Baby Gone et Shutter Island) n’a pas été rédigé en prenant en compte les canons d’Hollywood. Car Ils vivent la Nuit est  un roman extrèmement prenant sur le plan de l’intrigue et très percutant au niveau des dialogues admirablement bien ficelés qui se lit d’une traite sans que l’on ne s’en rende compte. Mais pour y parvenir, on ne peut s’empêcher d’avoir cette sensation de lissage qui se traduit notamment au niveau du personnage principal. Car Joe Coughlin est certes bien un truand, mais pour un gangster d’envergure le personnage est emprunt d’une morale et d’une éthique qui ne colle pas avec le cadre dans lequel il évolue. Joe bien trop noble, tue parfois des hommes, mais ceux-ci sont de tels véritables salauds que son honneur reste sauf et c’est bien dommage. Pas de dilemme ou de choix cornelien pour ce jeune héro qui n’aura donc pas l’envergure des nombreux personnages qui ont habité les histoires de Dennis Lehane. Où sont donc passés ces âmes torturées comme Jimmy Marcus ex-truand et père ravagé par la perte de sa petite fille dans Mystic River ou Teddy Daniels habité d’une sombre folie dans Shutter Island et même Patrick Kenzie contraint de prendre une décision douloureuse dans Gone Baby Gone ?

     

    Cette sensation de lissage on peut également la retrouver sur le plan historique où les heures sombres de la Prohibition sont abordées d’une manière plutôt édulcorée. Le récit y gagne peut-être en clarté au détriment de sa dimension dramaturgique. Tout y est trop simple, presque manichéen. Pour un peu l’auteur, plutôt que de déconstruire le mythe à la manière d’un James Ellroy, nous présenterait même les trafiquants d’alcool comme des gens ayant œuvrés pour la santé public du pays. Un roman plus simpliste donc qui tranche avec son précédent opus, Un Pays à l’Aube habité d’une part obscure et d’un souffle épique que l’on peine à retrouver dans ce dernier roman. On le ressent particulièrement lorsque l’auteur évoque les personnages réels qui peuplent son récit à l’instar d’un Lucky Luciano assez terne qui manque singulièrement d’envergure.

     

    De belles images de carte postal, de « braves » gentils et de « vilains » salopards, Ils Vivent la Nuit s’attache à respecter les codes des histoires de gangters et sera donc un roman facilement adaptable au cinéma, mais est-ce que cela sera suffisant pour en faire un bon film ? A force de côtoyer les sirènes d’Hollywood, Dennis Lehane n’est-il pas en passe de céder son âme au diable. Gageons qu’il n’en sera rien. Il ne reste plus à Ben Affleck, acquéreur des droits de Ils Vivent la Nuit, qu’à nous séduire comme il l’avait fait en réalisant Gone Baby Gone.

     

    Dennis Lehane : Ils vivent la nuit. Editions Rivages/Thriller 2012. Traduit de l’anglais (Etats-Unis) par Isabelle Maillet.

     

    A lire en écoutant : Chan Chan. Buena Vista Social Club. World Circuit 1997.