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03. Roman policier - Page 10

  • Hidéo Yokoyama : Six-Quatre. Vers une quête sans fin.

    Capture d’écran 2017-11-02 à 23.44.13.pngCe n’était qu’une question de temps avant que ne débarque dans nos régions francophones un roman policier japonais marquant les esprits d’une manière indélébile. Et s’il me manque le recul nécessaire pour avoir une vison de l’ensemble de la littérature noire nippone, Six-Quatre, premier roman traduit en français de Hidéo Yokohama, figure, à n’en pas douter, parmi les œuvres les plus intenses qu’il m’ait été donné de lire. A titre de références il faudrait citer David Peace pour le côté obsessionnel et James Ellroy pour l’ensemble d’un récit minutieux et d’une intensité à vous couper le souffle, faisant ainsi figure de modèle du genre.

     

    Le Six-Quatre désigne une tragique affaire d’enlèvement suivie de l’assassinat d’une enfant de sept ans remontant à l’an 64 du règne de l’empereur Shôwa (Hirohito). Le ravisseur n’a jamais été identifié et 14 ans plus tard, soit en 2002 de l’année civile, c’est peu dire que l’enquête marque encore les esprits de tous les policiers officiant dans cette région du nord de Tokyo, ceci d’autant plus que la prescription des faits approche tandis que l’équipe chargée des investigations s’est réduite comme peau de chagrin. Pourtant, il n’est pas question de renoncer et c’est le directeur général de l’Agence nationale de la police, en personne, qui va venir pour annoncer officiellement au père de la victime que tout est encore mis en œuvre pour découvrir l’assassin. Le commissaire Mikami, en charge des relations avec la presse, a une semaine pour organiser la visite, vaincre les réticences d’un père méfiant, gérer un conflit avec les journalistes locaux tout en comprenant, peu à peu, que derrière cette visite importante, se dissimule des enjeux considérables qui le dépasse. Dans un contexte hostile de services de police larvés par des conflits internes, Mikami va devoir manœuvrer avec toute l’habilité dont il est capable pour arriver à ses fins en se retrouvant contraint de réexaminer les dossiers du Six-Quatre révélant d’inquiétantes zones d’ombre.

     

    L’intérêt d’un roman policier japonais comme Six-Quatre réside dans le fait que l’on s’éloigne résolument des carcans narratifs occidentaux permettant ainsi d’appréhender l’intrigue sous d’autres facettes. Bien loin d’une simple affaire de « cold case », quasiment exempt de toutes formes de violences physiques ou autres codes propre au genre policier, Hidéo Yokohama nous convie, avec un talent peu commun, dans une exploration minutieuse des relations sociales et des rapports hiérarchiques régissant l’ensemble des différents services de police qu’il a côtoyé durant de nombreuses années en tant que chroniqueur judiciaire. Par le biais d’un portrait analytique extrêmement dense et complexe, l’auteur peut mettre en place une tension oppressante tout au long d’une intrigue d’une habilité et d’une subtilité rarement vue, permettant ainsi d’appréhender les rapports de force opposant les brigades judiciaires aux offices administratifs de la police devant rendre compte de leurs activités à une presse à la fois exigeante et impitoyable. Manigances, stratégies, chaque événement devient un enjeu, un objectif qu’il faut absolument atteindre au gré d’un suspense insoutenable, notamment lors d'intenses et hallucinantes conférences de presse, ceci d’autant plus que les manœuvres, même parfaitement bien orchestrées, seront constamment remises en question au gré de trahisons et de sabordages permanents destinés à annihiler toute l’opiniâtreté d’un enquêteur essayant de concilier les desseins parfois contradictoires des différente entités auxquels il doit rendre des comptes. Il faut également prendre conscience qu’avec Six-Quatre, aucune place n’est laissée au hasard et que les éléments les plus anodins prennent une importance considérable au fil d’un récit qui se construit à la manière d’un puzzle élaboré ou chacune des pièces s’enchâssent les unes dans les autres avec une redoutable précision qui confine au génie.

     

    Six-Quatre est un roman qui se mérite. Avec ses intrigues multiples qui s’enchevêtrent et en mettant en scène une multitude de protagonistes, la lecture du texte nécessite un effort d’attention et de concentration, ceci d’autant que l'on peut être aisément désarçonné par les patronymes japonais auxquels nous ne sommes guère familiers. Néanmoins la difficulté sera contrebalancée par le fait que l’auteur se concentre sur l’unique point de vue du commissaire Mikami, personnage central du roman. Il y a quelque chose de fascinant à suivre les pérégrinations de ce flic tiraillé entre son ancienne fonction d’enquêteur à la criminelle et sa nouvelle activité d’attaché de presse. Ainsi, au-delà d’une contre-enquête trépidante, de rapports tendus avec ses anciens collègues des brigades judiciaires et de confrontations multiples avec une hiérarchie exigeante et parfois ambivalente, Mikami doit également gérer les dissensions avec les médias locaux chargés de relayer les communiqués de police qu’ils jugent insatisfaisants. Un rapport au travail complètement insensé, un sens du devoir poussé à l’extrême et une somme d’enjeux colossaux permettent d’avoir une excellente représentation des codes moraux régissant la société japonaise ceci d’autant plus que l’on pénètre également dans la sphère familiale de ce policier tout dévoué à sa tâche. Loin d’être apaisante, on perçoit au travers de cette intimité, l’angoisse de parents dépassés ne sachant comment gérer la disparition de leur fille adolescente dont il sont sans nouvelle depuis qu’elle a fugué. Cette dimension bouleversante, avec tout ce que cela implique en terme de tensions supplémentaires, est loin d’être anodine car elle met en perspective toute la détresse mais également toute la détermination, voire l'obsession du père de la petite victime du Six-Quatre bien décidé, tout comme le commissaire Mikami, à faire toute la lumière sur cette tragédie, quitte à mettre à jour des aspects peu reluisants d’une enquête bâclée, à même d’entacher, à tout jamais, la réputation des forces de police.

     

    Subtil, raffiné, sans la moindre faille, Six-Quatre n’est pas un roman policier comme les autres. Il s’agit, ni plus ni moins, d’une démonstration de ce qui se fait de mieux dans le genre. Tout simplement sublime.

     

    Hidéo Yokoyama : Six-Quatre (Rokuyon). Editions Liana Levi 2017. Traduit du japonais par Jacques Lalloz.

    A lire en écoutant : We Are One (feat. Navasha Dava) de Kyoto Jazz Sextet. Album : Unity. Universal Classic & Jazz 2017.

     

  • Antonio Albanese : Voir Venise Et Vomir. Lagune noire.

    voir venise et vomir,antonio albanese,bsn pressAinsi donc le polar serait un genre sérieux qui ne souffrirait pas les incartades humoristiques sous peine de se voir parfois affubler du titre de pastiche n’ayant rien à voir avec la littérature noire. C’est faire bien peu de cas de tous ces auteurs comme Donald Westlake, Frédéric Dard ou Charles Exbrayat, pour n’en citer que quelques un, dont l’exercice de style à la fois drôle et percutant ne cessera de marquer les amateurs de romans policiers souhaitant évoluer dans un registre un peu différent. Pourtant il semble que ce soit l’une des considérations expliquant le fait que Voir Venise Et Vomir, polar féroce d’Antonio Albanese, n’ait pas été retenu par le jury pour figurer dans la sélection finale des auteur en lice pour le premier prix du polar romand. Difficile de comprendre l’éviction d’un ouvrage dont le style, l’intrigue et ces traits d’esprit incisifs constituent un remarquable récit se démarquant radicalement de la médiocre production de polars helvétiques que les médias romands ne cessent de mettre en avant.

     

    Milliardaire aussi excentrique qu’irrévérencieux, Matteo Di Gennaro dégueule tripes et boyaux dans un canal de la belle Sérénissime où flotte une odeur d’algue pourrie qui n’est pas sans lui rappeler celle émanant du corps de son amant, le beau Fabrizio, qui repose désormais à la morgue après avoir mariné dans les eaux de la lagune. Un instant de faiblesse passager, puisqu’il découvre rapidement que la thèse du suicide est aussi vraisemblable que la légende de saint Georges terrassant le dragon. Bien décidé à débusquer l’enfoiré qui a trucidé son amant, Matteo va rapidement mettre à jour les turpitudes de quelques moines bibliothécaires ainsi que les petites combines d’un taulard séjournant dans l’une des prisons de la Giudecca jouxtant sa propriété tout en assenant ses quatre vérités au lecteur qui n’en demandait pas tant.

     

    Frédéric Dard pour l’humour, Hugo Pratt pour les balades sur la lagune, on ne peut guère s’empêcher de penser également au fameux roman Le Nom De La Rose d’Umberto Eco au gré de ces quelques scènes se déroulant notamment dans la bibliothèque d’un monastère recelant des ouvrages anciens, ceci d’autant plus qu’un des livres devient la clé d’une énigme qui n’épargne guère l’obscurantisme religieux.

     

    Point d’ancrage fondateur du récit, l’eau devient l’élément commun d’une ville qui se désagrège et d’un homme qui se décompose. La beauté s’efface tout comme le souvenir. Matteo Di Gennaro ne peut se résoudre à l’accepter quitte à dégueuler sa colère et sa révolte. Ainsi Voir Venise Et Vomir, brève et fulgurante farce noire nous entraîne dans le sillage d’un narrateur qui s’érige en justicier pourfendeur de la bêtise et de l’ignorance tout en sillonnant avec son motoscafo la région de l’île de la Giudecca dont le nom prédestiné servira de conclusion à ce brillant récit célébrant l’amour dans tous ses genres, bien loin des baisers chastes et des légères caresses édulcorées.

     

    Au moyen d’une écriture vive et acérée, Antonio Albanese adopte un style détonant avec ces diatribes hilarantes que son insolent héros adresse à tout va au lecteur qu’il prend à partie au fil de considérations à la fois acides et arbitraires. Mais au-delà de ces instants cocasses, il faut distinguer avec Voir Venise Et Vomir, un roman érudit qui se distancie de la ville musée qu’est devenue Venise pour nous inviter dans la périphérie d’une envoûtante région qui recèle quelques trésors cachés. Ainsi, loin d’être des digressions, les apartés du narrateur concernant les jardins et l’architecture sont une forme d’hommage que l‘auteur tient à rendre en évoquant la beauté insoupçonnée de ces îles méconnues, tout en s’affranchissant des clichés et des décors maintes fois évoqués au gré des œuvres célébrant Venise.

     

    Trop licencieux, trop amoral et finalement trop immoral, un roman comme Voir Venise Et Vomir ne peut guère susciter l’adhésion de tout un jury mais parviendra à séduire, sans nul doute, le lecteur averti désireux de s’offrir un voyage atypique sur les eaux troubles de la lagune.

     

    Antonio Albanese sera présent lors du festival Lausan'noir qui aura lieu du vendredi 27 octobre au dimanche 29 octobre 2017. Il dédicacera ses romans le samedi 28 octobre de 16h00 à 17h30.

     

    Antonio Albanese : Voir Venise Et Vomir. Editions BSN PRESS 2016.

    A lire en écoutant : The Sky Is Crying de Gary B.B. Coleman. Album : Too Much Week End. Ichiban 1992.

  • AGUSTÌN MARTÌNEZ : MONTEPERDIDO. PERSONNE NE TE CHERCHE.

    Capture d’écran 2017-08-31 à 01.39.46.pngJe sais que parfois je rabâche un peu, mais je me vois, une fois de plus, contraint de vous recommander de faire un tour du côté de la production littéraire du polar espagnol dont j'ai fait l'éloge à de multiples reprises que ce soit avec Victor del Árbol, Carlos Zanòn ou tout dernièrement Andreu Martin qui nous entraînait dans les méandres d'une triade chinoise réglant ses comptes dans les rues de Barcelone. Dans un autre registre, il conviendra de s'intéresser à Monteperdido, premier roman d'Agustìn Martìn dont l'intrigue se déroule dans la promiscuité d'une bourgade nichée au creux d'une vallée perdue des Pyrénées espagnoles. Même s'il aborde le schéma classique de l'enlèvement d'enfants, Monteperdido déroutera le lecteur de par son rythme plutôt lent qui permet d'appréhender toutes les interactions entre les nombreux personnages qui peuplent cet ouvrage en surfant sur les codes du polar bien évidement, mais également sur ceux du thriller et du roman noir que l'auteur parvient à conjuguer avec un bel équilibre.

    Monteperdido, village niché aux pieds des plus hauts sommets des Pyrénées, a défrayé la chronique judiciaire avec la disparition d’Ana et Lucia, deux fillettes de onze ans qui ont disparues sans laisser de trace. Toutes les recherches sont restées vaines et cinq ans se sont passés lorsque l’on retrouve une voiture accidentée au fond d’un ravin. Dans l’habitacle, le cadavre d’un homme et une jeune adolescente inconsciente que l’on identifie très rapidement. Il s’agit d’Ana. Dès lors, ce sont deux inspecteurs dépêchés de Madrid, Sara Campos et Santiago Baìn, qui reprennent l’affaire avec l’appui de la guardia civil. Et le temps presse pour localiser Lucia. Qui peut bien être ce mystérieux ravisseur ? Que s’est-il passé durant ces cinq années ? Et que craint Ana en se murant dans le silence ? Des questions qui restent sans réponse, d’autant plus que les policiers se heurtent rapidement à l’hostilité des habitants déterminés à régler leurs affaires entre eux pour conserver leurs plus vils secrets.

    Pour les adeptes des rythmes trépidants et des rebondissements sans fin il faudra passer son tour avec Monteperdido qui se cale sur l’atmosphère majestueuse de cette région montagneuse dans laquelle se déroule un récit emprunt d’une certaine forme de spleen tout en distillant un climat oppressant au sein d’une localité où les habitants vivent en vase clos une bonne partie de l’hiver. Habile, précis, Agustìn Martìnez réussit à mettre en place une kyrielle de personnages évoluant dans un décor qu’il parvient à décrire avec une belle force poétique permettant au lecteur d’éprouver les sensations que procurent cette faune et cette flore qui prennent une part prépondérante dans le cours de l’intrigue. Ainsi, l’auteur parvient à tisser une espèce de toile complexe pour dépeindre les diverses interactions entre les différents membres de cette communauté s’ingéniant à dissimuler quelques fautes inavouables. Comme des cercles qui s’entrecroisent on suit les différents ensembles de protagonistes qui interagissent soit dans le cadre familial des fillettes disparues ou de l’enquête qui est en cours mais également dans le microcosme des autres membres du village qui interviennent parfois pour relancer le récit dans une succession de rebondissement savamment équilibrés. Loin des clichés de carte postale et sans jamais en abuser, Agustìn Martìnez parvient également à intégrer le folklore et les traditions, notamment liées à la chasse, de cette province de Huesca que ce soit par le biais des spécialités culinaires mais également des légendes locales qui prennent une dimension particulière au fur et à mesure de l’avancée de l’enquête.

    Finalement assez éloignée des schémas classiques, malgré les apparences, l’intrigue tourne, pour une partie, autour du duo atypique que forme les deux inspecteurs chargés de l’enquête. Dans ce village replié sur lui-même, les deux policiers deviennent l’élément perturbateur qui met à mal l’apparente quiétude d’habitants tenaillés par leurs angoisses respectives et bouleversés par cette disparition inexplicable qui ne devenait plus qu’un lointain souvenir soudainement ravivé avec la réapparition de la jeune Ana. Les deux enquêteurs entretiennent une relation singulière puisque Santiago Baìn, vieux policier proche de la retraite endosse le rôle de pygmalion auprès de Sara Campos, jeune inspectrice tout en émotion et sensibilité qu’il a recueillie au terme d’une adolescence mouvementée où la jeune fugueuse se rendait compte que ses parents n’avaient même pas pris la peine de signaler sa disparition. On perçoit ainsi toute la vulnérabilité de cette enquêtrice déterminée, dont la quête pour retrouver les deux jeunes filles prend subitement une tout autre forme avec cette allégorie sur l’existence de l’homme au travers du regard des autres. Le roman emprunte ainsi des thèmes chers à Borges à qui l’auteur rend hommage par l’entremise de quelques vers du poète argentin qui émaillent le texte et quelques clins d’œil, comme ces labyrinthes que l’inspectrice dessine dans la marge de ses notes.

    Conte crépusculaire qui se décline sous la forme d’un huis clos tragique et oppressant Agustìn Martìnez intègre avec Monteperdido tous les archétypes du polar pour mieux les détourner afin de nous livrer une intrigue déroutante qui n’épargne aucun des protagonistes qui s’enlisent dans une tragédie noire et sordide sans concession et sans espoir. Poignant et dramatique.

     

    Agustìn Martìnez : Monteperdido. Actes Sud/Actes Noirs 2017. Traduit de l’espagnol par Claude Bleton.

    A lire en écoutant : What’s A Girl To Do de Bat For Lashes. Album : Fur And Gold. The Echo Label Ltd 2011.

     

     

  • Thierry Jonquet : Moloch. L’ogre est toujours affamé.

    thierry jonquet, moloch, folio policierDurant la pause littéraire, de bien trop courte durée, que procure la période estivale, c’est l’occasion de découvrir ou redécouvrir quelques romans en piochant sur les étalages des librairies qui croulent sous les assortiments d’ouvrages en format poche. Dans le domaine du roman noir et du polar, c’est également une opportunité pour remettre au goût du jour quelques auteurs ayant disparu précocement et dont l’œuvre a sombré bien trop rapidement dans l’oubli à l’instar de Jean-Claude Izzo ou de Thierry Jonquet qui ont marqué l’univers du polar durant toute la décennie précédent les années 2000. Avec Moloch, de Thierry Jonquet on aborde sous l’angle du fait divers sordide, une enquête mettant en scène l’équipe de l’inspecteur divisionnaire Rovère qui a inspiré les personnages de la série Boulevard du Palais.

     

    On découvre quatre petits cadavres partiellement carbonisés dans une maison abandonnée du côté de la porte de la Chapelle et c’est l’équipe de l’inspecteur divisionnaire Rovère qui est chargée de l’enquête sous la direction de la juge d’instruction Nadia Lintz.



    A l’hôpital Armand-Trousseau, la surveillante en chef Françoise Delcourt réclame depuis plusieurs jours le carnet de santé de la petite Valérie atteinte d’un cancer du pancréas. Heureusement, la fillette peut compter sur le soutien de ses adorables parents avec une mère exemplaire de courage qui suscite l’admiration. Mais la lecture du document recèle quelques surprises.
    Le psychiatre Vilsner reçoit depuis plusieurs mois la visite d’un étrange patient. Atteint d’une infection au niveau des yeux qui le rendra très prochainement aveugle, le peintre Haperman a annoncé qu’il mettrait fin à ses jours au terme de sa thérapie.

    Victimes, proies faciles, trois affaires convergentes où il est question de souffrance et d’innocence bafouée car sur l’autel du sacrifice, Moloch, divinité cruelle, réclame toujours sa part d’enfants à immoler.

     

    Issu du courant néo polar, comme bon nombre d’auteurs français, Thierry Jonquet a rédigé ses textes avec la volonté de dénoncer les carences sociales par l’entremise du roman noir qu’il a découvert notamment avec l’œuvre de Jean-Patrick Manchette. Engagé politiquement, mais également professionnellement que ce soit comme ergothérapeute en gériatrie ou professeur dans la zone périphérique du nord de Paris, l’auteur a donc puisé dans la somme de ses expériences pour enrichir des récits d’une terrible noirceur qui s’enracinent toujours dans un réalisme déconcertant. Ainsi Moloch ne déroge absolument pas à cette règle de naturalisme que ce soit lors des investigations policières et judiciaires, mais également durant toutes les phases se déroulant dans le milieu médical. L’abandon, le dénuement, mais également dans le deuil que l’on doit surmonter ou l’attachement tout en ambiguïté, Thierry Jonquet aborde la thématique de l’enfance malmenée et bousculée dans le contexte de trois intrigues très adroitement menées qui vont trouver leurs conclusions dans une finalité qui devient l’enjeu du roman. En effet, même si l’on perçoit très rapidement quelques ressorts des différentes péripéties qui alimentent le récit, le lecteur est plongé dans une perpétuelle perplexité quant à la découverte des éléments qui vont permettre de les mettre en lien dans la perspective d’un final troublant et forcément désespérant.

     

    Un texte précis équilibré, dépourvu d’effets de style ostentatoire où chaque mot semble avoir été pesé, permet d’appréhender avec une facilité déconcertante la multitude de personnages qui entrent en scène dans un roman somme toute assez court. Qu’ils soient principaux ou secondaires, l’ensemble des protagonistes est doté d’une épaisseur qui leurs donne un certain relief tout en nous permettant d’appréhender leurs divers états d’âme en rapport avec des faits douloureux qui ne sont pas forcément en lien avec l’intrigue. Dans une construction aussi subtile qu’implacable, Thierry Jonquet chronique un ensemble de faits divers à la fois cruels et abjects, sans pour autant sombrer dans une forme de voyeurisme pervers ou morbide. Car au-delà de l’ignominie des actes, l’auteur parvient toujours à insuffler cette petite part d’humanité que l’on peut même déceler dans le cœur des individus les plus monstrueux. Cela transparaît notamment avec Charlie, ce SDF paumé, ancien soldat affecté dans une unité du génie, victime d’un traumatisme après avoir été engagé au Rwanda dans le cadre de l’opération Turquoise ou avec Marianne, cette mère courage qui noie son enfant malade sous un déluge d’affection équivoque. Cette humanité elle transparaît également au travers des personnages tels que l’inspecteur divisionnaire Rovère qui doit surmonter le deuil de son enfant et la juge d’instruction Nadia Lintz qui doit accompagner sa meilleure amie pour une interruption volontaire de grossesse. Tout un ensemble de protagonistes confrontés à cet univers lourd de la maltraitance d’enfants et qui apparaissaient déjà dans un roman intitulé Les Orpailleurs (Folio Policier 1993) évoquant les premières investigations mettant en scène les membres de cette équipe d’enquêteurs.

     

    Moloch donne également l’occasion de découvrir Paris sous un aspect aussi attrayant qu’original, puisque l’auteur nous entraîne avec force de précisions dans le périmètre des entrepôts qui bordent le canal de l’Ourcq, les Puces de Saint-Ouen, les chantiers et autres terrains vagues qui jouxtent le périphérique du côté de la porte de la Chapelle. Un portrait sans fard, mais également sans misérabilisme où enquêteurs, délinquants, travailleurs, résidents et touristes se côtoient dans les méandres d’une ville que Thierry Jonquet dépeint avec beaucoup de justesse sans rien concéder au cliché de carte postal ou au sensationnalisme de bas étage tout en distillant une atmosphère à la fois trouble et pesante pour un roman policier original, tout en rigueur.

     

    Thierry Jonquet : Moloch. Folio Policier 1998.

    A lire en écoutant : Rive Gauche d’Alain Souchon. Album : Au Ras des Pâquerettes. Parlophone Music 1999.

      

  • FRIEDRICH GLAUSER : LE ROYAUME DE MATTO. LA RAISON D’ETRE.

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    Publié en 1937, Le Royaume De Matto entame donc la série des enquêtes de l’inspecteur Studer avec ce second opus, où son créateur, Friedrich Glauser, entraîne le lecteur dans les méandres d’une investigation se déroulant au cœur d’une institution psychiatrique. La démarche est loin d’être anodine, puisque l’auteur, au cours d’un parcours de vie plutôt mouvementé, a fréquenté bon nombre de ces établissements comme j’avais eu l‘occasion de l’évoquer avec L’inspecteur Studer, premier ouvrage de cette série emblématique du roman policier helvétique qui se plait à dresser avec une acuité déconcertante le portrait social de l’époque mais dont certains aspects résonnent dans une actualité récente, liée, par exemple, aux scandales des nombreux excès dont les autorités ont fait preuve avec ces placements forcés et autres internements abusifs.

     

    Rien ne va plus à la clinique psychiatrique de Randlingen. Un patient du nom de Pieterlen s’est échappé tandis que son directeur, le docteur Ulrich Borstli, est porté dispuru. Charge à l’inspecteur Studer, réveillé au saut du lit, de résoudre cette énigme en accompagnant le docteur Laduner, directeur adjoint de l’institution qui va lui servir de guide. Hébergé au sein de la clinique, Studer découvre par l’entremise du jeune psychiatre tout un univers étrange où l’on tente d’apaiser ces âmes abîmées dans un climat oppressant d’angoisse où raison et folie ne sont plus qu’un point de vue. Au royaume déliquescent de Matto, il devient donc difficile pour l’inspecteur Studer de faire la part des choses afin de découvrir qui a bien pu en vouloir au directeur Ulrich Borstli.

     

    Avec Le Royaume De Matto, dont le nom désigne la folie en italien, le lecteur est rapidement saisi par la sensation de malaise et d’angoisse qui émane d’un roman où l’intrigue policière figure en second plan d’un portrait extrêmement précis des institutions psychiatriques que l’auteur dépeint avec force de réalisme quant au diverses pathologies psychiques dont sont atteints les patients à l’instar de Pieterlen, auteur d’un infanticide. Par l’entremise de ce personnage, Friedrich Glauser dresse le portrait de la misère sociale et de la pauvreté qui sévissait également en Suisse, bien loin de l’idée de cet état providentiel qui subviendrait aux plus nécessiteux. Il y confronte également l’expertise psychiatrique au service d’une justice plus encline aux châtiments qu’à la guérison suite à une perte de raison. Mais par le biais de Laduner, psychiatre avant-gardiste, s’agit-il vraiment d’une perte de raison ou d’une certaine lucidité que la morale ne saurait approuver ?

     

    Doté d’un certaine empathie et d’un grand sens de l’écoute, l’inspecteur Studer va donc être confronté à un certain sentiment d’impuissance tandis qu’il parcourt les arcanes de cette institution psychiatrique où il découvre les diverses intrigues qui se jouent entre infirmiers, médecins et patients menant un « bal » étrange au son d’un accordéon dont les notes oppressantes résonnent mystérieusement dans les couloirs de la clinique. Guidé par le docteur Laduner, le policier découvre également, au fil de l’intrigue, les errements et les excès d’une science encore balbutiante qu’est la psychiatrie qui ne dispose pas encore de la pharmacopée permettant de traiter les patients. Personnage ambigu, le docteur Laduner incarne le désarroi de ces psychiatres qui disposent des malades pour expérimenter toute sorte de traitement qui vont du plus absurde au plus cruel à l’instar de ces infections de fièvre typhoïde volontairement provoquées pour guérir des malades atteints de catatonie. Psychiatrie versus criminologie, finalement l’inspecteur Studer doit admettre que sa seule logique ne suffit pas à résoudre une affaire qui le dépasse et dont les tenants et aboutissants ne peuvent s’inscrire dans une logique de raison au sein de cet univers où le désespoir côtoie la solitude. Une impuissance qui s’inscrit dans une conclusion finale accablante pour l’ensemble des protagonistes.

     

    Au détour d’une étrange enquête on découvre donc l’abîme dans laquelle errent les pauvres âmes du Royaume de Matto. Un roman policier dérangeant et déconcertant.

     

    Friedrich Glauser : Le Royaume de Matto (Matto Regiert). Editions Gallimard/Le Promeneur 1999. Traduit de l’allemand par Philippe Giraudon.

    A lire en écoutant : Plume d’Ange de Claude Nougaro. Album : Plume d’Ange. Barclay 1977.

  • Akimitsu Takagi : Irezumi. A fleur de peau.

    Capture d’écran 2017-07-23 à 19.31.35.pngQu’elles soient littéraires, culinaires, cinématographiques ou télévisuelles, les incursions au Japon demeurent des démarches à la fois fascinantes et déroutantes permettant de lever un coin de voile d’une culture à la fois dense et mystérieuse. D’une complexité et d’une étrangeté sans égale pour le regard de l’occidental néophyte que je suis, la société nippone suscite toujours un profond intérêt qui débuta il y a bien des années de cela avec la découverte du film Yakuza de Sidney Pollack qui nous entraînait dans les arcanes de ces gangsters japonais régis par un code d’honneur rigoureux et dont la peau de certains membres étaient ornée de tatouages traditionnels que l’on désigne sous la dénomination de Irezumi qui donne justement son titre à la version française d’un curieux roman de Akimitsu Takagi, parut en 1948 à une période où le Japon était encore occupé par l’armée américaine.

     

    Aussi belle et fascinante soit-elle, Kinué Nomura est destinée à un fin tragique, puisque cette fille d’un illustre tatoueur déplore déjà la disparition de sa sœur jumelle. Il faut dire que les jumelles ainsi que leur frère possèdent la particularité d’être porteur d’Irezumi fabuleux esquissés par leur géniteur et dont l’ensemble évoque une légende aux entournures maudites. De fait, le corps démembré de Kinué est retrouvé dans une salle de bains dont la porte est verrouillée de l’intérieur. Et l’on constate rapidement que le buste est manquant. Les autorités se perdent en conjecture. S’agirait-il de l’œuvre d’un admirateur sadique désireux de posséder le précieux tatouage ? Mais la tournure des événements laisse peu de place à la réflexion, puisque c’est le frère de la victime qui est retrouvé mort dans des circonstances similaires. La police dépassée va devoir accepter l’aide de Kyôsuge Kamisu, jeune surdoué qui parviendra peut-être à déjouer les sombres desseins de ce psychopathe sanguinaire.

     

    Basé sur l'archétype narratif du crime commis dans une pièce close de l'intérieur et résolu par un enquêteur surdoué, Irezumi, à plus d'un titre, sort résolument de l'ordinaire, tant par le cadre historique dans lequel se déroule l'intrigue que par le milieu méconnu du tatouage dans lequel évolue l'ensemble des personnages. Bien évidemment, l'un des enjeux majeurs du roman consistera à découvrir le modus opérandi d’un assassin particulièrement habile et il faut bien admettre que l'auteur fait preuve d'une brillante ingéniosité qu'il restitue par l'entremise de la logique implacable de Kyôsuke Kamisu, sorte de jeune et malicieux Rouletabille qui manque peut-être un peu d'envergure. Il s'agit là de la seule faiblesse du roman par rapport à ce protagoniste captivant qui, paradoxalement, arrive bien trop tardivement dans le fil d’une intrigue tout en maîtrise. Néanmoins Irezumi n’est que le premier roman d’une série qui compte dix-sept volumes, mettant en scène ce détective amateur atypique, qui n’ont pas encore fait l’objet d’une traduction en français.

     

    Si l’on ressent clairement l’influence occidentale du point de vue de l’intrigue policière, Irezumi oscille rapidement vers un univers à la fois dissolu et sensuel propre au Japon en suivant la destinée de cette femme, Kinué, dont l’épiderme recouvert d’une fresque éblouissante, suscite toutes les convoitises. On découvre un entourage étrange dans lequel la jeune femme évolue en dégageant une espèce de sensualité trouble, presque malsaine. Ainsi de l’amoureux transi au collectionneur avide, il gravite autour de la belle naïade toute une panoplie de personnages torturés dont la concupiscence génère un climat de tensions et de perversions. L’auteur bâtit donc son intrigue en intégrant tous les aspects liés à l’art du tatouage traditionnel que ce soit la douloureuse phase de conception qui peut durer plusieurs années, la marginalisation de ces artisans contraint d’effectuer leurs activités dans une semi clandestinité ainsi que le regard réprobateur que porte la société nippone sur les individus affublés de ces estampes indélébiles. Bien plus qu’une série de clichés d’un univers exotique et méconnu, tous ces éléments deviennent les ressorts nécessaires aux motivations et mobiles des différents crimes qui sont perpétrés en générant un climat licencieux et sulfureux.

     

    L’ouvrage publié en 1948 permet également d’appréhender, avec un texte aux tonalités étrangement contemporaines, tout le contexte historique de cette ville de Tokyo occupée qui se remet peu à peu des affres de la guerre tandis que la population évolue dans les décombres d’une cité laminée par les bombardements. C’est au travers du quotidien des différents intervenants que l’on perçoit les aléas d’une vie laborieuse faite de marché noir, de transports chaotiques, de suicides en pleine représentation théâtrale et de filatures dans des quartiers en ruine.

     

    Portant un regard éclairé sur la société nippone de l’après-guerre, Irezumi devient ainsi bien plus qu’un whodunhit classique et aiguisé pour nous entraîner dans le sillage d’un univers délicieusement déliquescent que l’on discerne au détour d’une intrigue fort bien construite.

     

    Akimitsu Takagi : Irezumi (Shisei Satsujin Jiken). Editions Denoël/Collection Sueurs Froides 2016. Traduit du japonais par Mathilde Tamae-Bouhon.

     

    A lire en écoutant : The City Is Crying de The Dave Brubeck Quartet. Album : Jazz Impression Of Japan. Sony Music Entertainment 1964.

     

     

  • Fred Vargas : Quand Sort La Recluse. Le venin du succès.

    fred vargas, éditions flammarion, adamsberg, quand sort la recluseQuand Sort La Recluse, dernier roman de Fred Vargas, reine du polar ou plus précisément du  « rompol » comme elle désigne l’ensemble de son oeuvre, débarque dans nos librairies, pour ceux qui ne l’aurait pas remarqué ou qui aurait loupé la vague de service de presse qui a déferlé sur les multiples supports médiatiques. Après la déception de Temps Glaciaires qui marque l’essouflement de la série Adamsberg, je mesure tout de même l’attachement (l’addiction ?) pour l’ensemble de ces personnages puisque me voici plongé, malgré tout, dans une nouvelle enquête de ce commissaire emblématique de la littérature policière française. Signes d’un succès qui ne se dément pas, on évoque désormais Fred Vargas par le truchement de son classement dans les meilleures ventes de livres ainsi que par le biais du tirage initial et du nombre d’exemplaires vendus alors que les recensions sur l’ouvrage ne font état que d’éléments qui ont déjà été évoqués à de multiples reprises lors de la parution de ces précédents romans.

     

    Dans la région de Nîmes, la Recluse, une araignée plutôt discrète, est sortie de son trou pour faire trois victimes qui ont succombé à sa morsure qui n’était pourtant, jusqu’à présent, pas signalée comme étant potentiellement mortelle. On évoque bien une mutation liée à l’usage des pesticides, mais le commissaire Adamsberg n’y croit guère. Revenu des brumes islandaises, il percoit, dans le nuage éthéré de ses pensées, un obscur assassin qui officierait afin d’accomplir une sourde et terrible vengeance. Il faut dire que l’image de la Recluse le renvoie vers des terreurs d’enfance enfouies qui ne sont pas forcément en lien avec une banale arachnaphobie mais évoque plutôt une terrible tradition issue de rites obscurs du Moyen Age. Il ne reste plus qu’a convaincre tout le commissariat de se lancer à la poursuite de ce meurtrier. Une tâche qui va se révéler bien plus ardue qu’il n’y paraît, provoquant des scissions au sein d’une équipe qui doute du bien-fondé des certitudes d’Adamsberg. Que fait le capitaine, a-t-il perdu la raison ?

     

    On reprend les mêmes et on recommence. Pour ceux qui souhaitent retrouver l’univers de Fred Vargas sans être troublé par un quelconque changement, Quand Sort La Recluse entame un retour aux sources de la série Adamsberg en reprenant les fondamentaux qui en ont fait son succès. Une tradition médiévale en lien avec des meurtres, un lot de personnages atypiques, des dialogues décalés et une enquête alambiquée qui s’appuie sur le passé du commissaire Adamsberg, on se retrouve ainsi avec un récit correct qui ne brille pas par son originalité. Avec des recettes éprouvées, Fred Vargas signe un nouveau succès en devenir pour des lecteurs en quête de retrouvailles et d’habitudes au gré d’une intrigues aux entournures quelque peu éculées. Ainsi pour les plus avisés et les plus addicts d’entre eux, il faudra bien admettre que l’assassin est aisément identifiable tant il s’inscrit dans une espèce de tradition propre aux récits de l’auteur que je me garderai bien de dévoiler.

     

    Bien que Fred Vargas s’en défende, il y a désormais, derrière la série Adamsberg, une histoire de gros sous qui s’assortit inévitablement avec un manque de créativité et d’originalité. Il s’agit là d’un des revers de la médaille du succès que l’on ne saurait attribuer uniquement à Fred Vargas, puisque toute la chaîne du livre, jusqu’aux lecteurs que nous sommes, doit être mise en cause. Ainsi dans un univers où les publications n’ont jamais été aussi nombreuses, je m’étonne toujours de cette concentration et de mise en lumière sur quelques auteurs « bankables » qui rapportent certainement un revenu conséquent mais qui se fait au détriment de tous ces ouvrages méconnus qui peinent à trouver leur place dans cette course au succès. Un logique qui obéit forcément à un lot de contraintes afin de répondre aux attentes des lecteurs permettant ainsi d’écouler ces fameux tirages de plusieurs milliers d’exemplaires. Fred Vargas ne se dérobe malheureusement pas à la règle, même si elle tente de pimenter le récit en implémentant un conflit au sein de l’équipe du commissaire Adamsberg, comme elle l’avait d’ailleurs fait dans Temps Glaciaire. Au gré de dialogues, certes savoureux, mais désormais terriblement convenus, l’auteur égrène son lot de personnages qui ne sortent pas de leurs rôles. Adamsberg demeure ce personnage toujours aussi flou qui enquête et dirige ses collaborateurs au gré de ses sensations ; Veyrenc débite encore quelques rares alexandrins qui ne font que souligner l’essouflement de cette série ; Danglard dispense son savoir au gré des investigations en cours et Retancourt s’affirme toujours comme étant la femme-vestale, pilier indestructible de la brigade. Tout est donc bien rangé dans ce récit agréablement convenu qui présente l’avantage de se lire rapidement sans pour autant en retirer l’indéfinissable frisson que nous procurait des romans tels que L’Homme A L’Envers, Pars Vite Et Reviens Tard ou L’Armée Furieuse.

     

    Sur les eaux bien tranquilles de la notoriété, Fred Vargas nous livre donc, avec Quand Sort la Recluse, un ouvrage qui comblera les attentes des aficionados du commissaire Adamsberg sans pour autant vouloir remettre en question les rouages d’une série qui tourne désormais dans le vide en dispensant tout de même quelques éléments d’intrigues agréables à découvrir. Néamoins La Recluse mord cruellement en distillant son poison létargique qui font que, l’air de rien, l’auteur s’endort tout doucement sur son succès.

     

    Fred Vargas : Quand Sort La Recluse. Editions Flammarion 2017.

    A lire en écoutant : Le Capitaine de William Sheller. Album : William Sheller & le quatuor Stevens (Live). Mercury 2007.

  • Sunil Mann : Poker En Famille. Enfants perdus.

    sunil mann, poker en famille, éditions des furieux sauvages, Zürich, oberland bernois, madridRésolument ancré dans une dimension locale, le polar suisse, à quelques rares exceptions, peine à s’exporter au-delà de nos frontières et à franchir cette fameuse barrière du « Röstigraben » expliquant, du moins en partie, le succès très relatif en Suisse Romande, de la série des aventures du détective privé Vijay Kumar, résidant et officiant dans le quartier populaire du Kreis 4 de la ville de Zürich. Pratiquement passée inaperçue, il s’agit une nouvelle fois de signaler, pour les amateurs du genre, cette superbe série qui aborde, avec un humour décalé, les problèmes sociaux du pays sur fond d’enquêtes policières à la fois sensibles et émouvantes. On découvrait l’œuvre de Sunil Mann avec La Fête des Lumières (Furieux Sauvages 2013) où l’on faisait la connaissance de ce jeune détective aux origines indiennes qui déjouait de sinistres magouilles immobilières en lien avec des mouvement d’extrême-droite au sein d’une ville cosmopolite. Le second roman, L’Autre Rive (Furieux Sauvages 2015) nous plongeait au cœur de la communauté gay tout en évoquant la situation des migrants clandestins. Pour ce troisième opus, intitulé Poker en Famille, Vijay Kumar, qui semble vouloir remettre en cause les perspectives de son avenir professionnel, va nous entraîner dans les dérives de l’adoption abusive.

     

    Malgré quelques succès, le détective privé Vijay Kumar peine à joindre les deux bouts. Il faut dire que les petites missions de surveillance et autres filatures quelconques ne suffisent pas à régler les factures qui s’accumulent. Tout en cherchant un emploi plus stable pour faire face aux dépenses, il rend quelques menus services à sa petite amie Manju qui développe un service de traiteur de cuisine indienne. Mais lorsque Noemi, une jeune adolescente perturbée débarque dans son bureau pour lui confier la recherche de ses parents biologiques, Vijay se laisse convaincre et reprend du service. Une enquête bien plus dangereuse qu’il n’y paraît qui entraîne notre détective de Madrid jusqu’aux contrées de l’Oberland bernois, sur les traces d’un inquiétant médecin.

     

    Une nouvelle fois, Sunil Mann évoque un sujet sensible avec cette pointe d’ironie qui caractérise l’ensemble de ses romans en se démarquant ainsi des productions parfois tristounettes de ses confrères helvétiques qui se prennent bien trop au sérieux. Ce mordant qui caractérise le personnage principal nous rappelle des détectives tels que Philip Marlowe que Sunil Mann cite d’ailleurs parmi toutes ses influences littéraires qui l’ont poussé vers l’écriture de romans policiers. Mais à l’inverse du héros solitaire, Vijay Kumar est bien entouré avec sa famille est quelques compères atypiques qui prennent une place prépondérante dans l’ensemble des récits. Tous dotés de quelques traits de caractères saillants, l’ensemble des personnages permet d’aborder les intrigues avec des points de vues plutôt divergents et parfois rafraîchissants à l’instar de Miranda, cette prostituée transsexuelle qui apporte une dimension décalée en oscillant sur les registres du burlesque et de l’émotion. C’est probablement l’une des grandes qualités de la série où chaque acteur occupe une place bien précise dans l’ensemble des intrigues en reléguant parfois Vijay Kumar dans un rôle d’observateur qui lui convient d’ailleurs parfaitement. Doté d’une certaine acuité, le détective privé nous entraîne dans le champ de ses introspections en nous livrant ses réflexions sur des thèmes variés tels que l’immigration et les enjeux liées à l’intégration en relevant les similitudes et les dissonances de deux cultures diamétralement opposées dans lesquels les natifs sur sol helvétiques doivent trouver leur place à l’image d’un Vijay Kumar tiraillé entre le poids des traditions incarné par une mère aussi aimante que possessive et l’attrait d’un certain goût d’indépendance le dispensant de tout compte à rendre auprès des siens.

     

    Poker en Famille évoque, comme son nom l’indique, les apparences trompeuses de la famille idéale qui se révèle bien plus bancale qu’il n’y paraît et dans laquelle une jeune fille refuse désormais de poursuivre ce jeu de dupe. Lubie d’une adolescente perturbée ou intuition avérée, Noémi ressent depuis toujours une certaine distance avec les membres de sa famille à un point tel qu’elle éprouve la certitude d’avoir été adoptée. Dubitatif, Vijay Kumar entame tout de même quelques investigations qui vont confirmer les doutes de la jeune fille. Pour mener à bien cette enquête délicate, Vijay Kumar va devoir se rendre à Madrid en compagnie de son ami José, journaliste d’investigation. Les deux compères vont rapidement mettre à jour un odieux trafic d’enfants mis en place par des nones bénéficiant de la complicité d’obstétriciens douteux s’arrogeant le droit de décider qui mérite un enfant. Une sélection qui s’avère d’autant plus abjecte qu’elle se base essentiellement sur des notions pécuniaires. Toujours très bien documenté, Sunil Mann nous permet d’appréhender tous les ressorts de cette traite de bébés en mettant en exergue toute l’émotion de ces familles brisées qui n’ont jamais renoncé à la garde de leur progéniture. Mais au-delà de cette détermination, l’auteur développe toute une intrigue basée sur le ressentiment et l’esprit de vengeance dont l’épilogue déroutant se déroule dans un coin reculé de l’Oberland bernois, terre d’origine de l’écrivain.

     

    Madrid, l’Oberland bernois, avec Poker en Famille, Sunil Mann délaisse quelque peu la ville de Zürich pour entraîner son personnage fétiche vers d’autres horizons tout en abordant les thèmes liés à la famille qui deviennent l’un des grands enjeux des nombreux personnages qui peuplent cette série helvétique que l’on doit découvrir impérativement. Une belle réussite pour cet ensemble de polars plus que convaincants.

     

    Sunil Mann : Poker En Famille (Familienpoker). Editions des Furieux Sauvages 2016. Traduit de l’allemand par Ann Dürr.

    A lire en écoutant : Lorelei de Nina Hagen. Album : Angstlos. CBS International 1983.

     

  • Hugues Pagan : Profil Perdu. Au bout de la route.

    hugues pagan, profil perdu, rivagesC’était à la fin des années 90 que Hugues Pagan nous livrait son neuvième et dernier polar intitulé Dernière Station Avant l’Autoroute (Rivages 1997) avant de se tourner vers des activitiés plus lucratives telles que l’écriture de scénarios pour des séries comme Mafiosa, Un Flic et Police District. Après 20 ans d’absence, le retour de Hugues Pagan sur la scène littéraire constitue donc une belle surprise nous permettant de retrouver cette langue et cet état d’esprit si particuliers, propre aux flics, que cet ancien fonctionnaire de police était parvenu à restituer tout au long de son oeuvre et qui inspira par la suite bon nombre d’auteurs également issus des rangs de la grande maison ainsi que des réalisateurs comme Olivier Marchal avec qui il collabora régulièrement. Mais outre le language si atypique, on retrouve avec Profil Perdu, cette atmosphère de noirceur et de froideur conjuguée à l’ambiance amère d’un commissariat abritant les aléas de flics à la dérive et les intrigues de brigades rivales.

     

    En 1979, on célèbre la fin de l’année comme on peut à l’Usine, surnom donné au commissariat de cette ville de l’est de la France. Bugsy, un dealer du coin se fait cuisiner par Meunier, un inspecteur des stups, au sujet d’une photo où figure une mystérieuse jeune femme. Schneider le responsable du Groupe criminelle contemple le parking qui se vide peu à peu avant d’entamer sa tournée nocturne avec son adjoint. Un début de nuit calme avant d’affronter les hostilités des fins de réveillons trop arrosés. Mais durant la nuit tout bascule. Pour Schneider c’est une rencontre en forme de coup de foudre avec la belle Cheroquee. Pour Meunier la nouvelle année s’achève rapidement. Il est abattu froidement par un motard alors qu’il faisait le plein dans une station service. Schneider et son équipe sont sous pression. Un tueur de flic c’est loin d’être une affaire ordinaire.

     

    Parmi tous les policiers qui se sont lancés dans la littérature noire, Hugues Pagan se distingue par la qualité d’une écriture immersive teintée de résonnances poétiques permettant ainsi de découvrir les arcanes policières où évoluent des flics en bout de course qui travaillent à la marge et dont les destinées se révèlent bien trop souvent dépourvues de la moindre lueur d’espoir. Les enquêtes aux entornures incertaines servent de prétextes pour mettre en place les dérives de personnages aux lours passifs pour espérer une quelconque rédemption. Inexorablement, la balance penche vers une noire tragédie et malgré une trame policière, les récits de Hugues Pagan oscillent invariablement sur le registre du roman noir afin de mettre en scène toutes les vicissitudes de l’univers policier en révélant les antagonismes entre les différentes brigades ainsi que les excès de ces flics qui franchissent la ligne.

     

    A bien des égards, on trouve dans l’œuvre de Hugues Pagan l’ambiance lourde des films de Melville ou le climat oppressant des romans de Robin Cook avec cet aspect glacial qui habillent des personnages solitaires et mutiques évoluant dans un une dimension invariablement tragique. Avec Profil Perdu, on ne déroge pas à la règle et Hugues Pagan s’emploie à dresser un tableau réaliste et sans complaisance d’une équipe d’inspecteurs conduits par Schneider, un chef de groupe taciturne et sans illusion que l’on avait déjà croisé dans La Mort Dans Une Voiture Solitaire (Fleuve Noir 1982) et Vaines Recherches (Fleuve Noir 1984). En terme de temporalité, Profil Perdu se situe à une période antérieure aux deux opus précités et permet à l’auteur de s’attarder sur le portrait d’un flic saturé de désespoir en évoquant son passé et ses antécédants comme officier parachutiste engagé durant la guerre d’Algérie. L’auteur qui y est natif, en profite pour mettre en exergue les aspects troubles de ce conflit liés notamamnet à la pratique de la torture en expliquant ainsi l’aversion de Schneider pour les interrogatoires musclés que pratiquent certains de ses collègues. Dès lors, la traque d’un tueur de flic prend une tournure inatttendue lorsque ce policier désabusé entend dénoncer des inspecteurs tabassant un suspect peu coopérant sous l’œil complaisant d’une hiérarchie inspirant méfiance et défiance. On le voit, Schneider devient l'archétype du flic rebelle qui ne croit à plus grand-chose hormis peut-être cette relation naissante avec Cheroquee, une belle jeune femme rencontrée lors de la soirée de nouvel an. C'est probablement la seule lueur d'espoir que l'on entrevoit tout au long de ce roman avec cette liaison quelque peu surannée qui convient parfaitement à l'état d'esprit de l'époque. Car Hugues Pagan parvient à diffuser par petites touches subtiles cette atmosphère propre aux débuts des années 80 que l'on décèle notamment au gré de dialogues solides et maitrisés permettant d’appréhender ce climat si particulier de la police. 

     

    Loin de céder au misérabilisme ou à la compassion et encore moins au sensationnalisme que l'on ressent parfois à la lecture de certains ouvrages rédigés par des policiers, Profil Perdu est un roman qui dégage un parfum agréablement rétro pour un récit au rythme paisible, presque hypnotique, ponctué de quelques coups d’éclat, comme autant de sursauts pour tenter de s’extirper de toute cette logique fatalement tragique. Entre une vision romancée et une représentation naturaliste de l’univers de la police, Hugue Pagan a choisi la voie médiane en revenant aux fondamentaux pour nous livrer un de ces grands polars qui rend hommage à tout ce que l’on apprécie dans la littérature noire française.

     

    Hugues Pagan : Profil Perdu. Editions Rivages/Roman noir 2016.

    A lire en écoutant : La roue du temps de Paul Personne. Album : A l’Ouest – Face B. XIII Bis Records 2011.

  • VALERIO VARESI : LA PENSION DE LA VIA SAFFI. AU BOUT DES EXTREMES.

    Capture d’écran 2017-04-02 à 20.43.33.pngBien plus épaisse que son manteau Montgomery, la brume semble suivre les pas du commissaire Soneri en se cramponnant aux rives mystérieuses du Pô dans Le Fleuve Des Brumes puis en s’insinuant dans les rues tortueuses de cette ville provinciale de Parme où l’on rencontre, pour la seconde fois, ce policier solitaire chargé de l’enquête du meurtre de la tenancière de La Pension De La Via Saffi. L’occasion de faire plus ample connaissance avec un personnage familier que l’on prend plaisir à retrouver et dont on va découvrir les affres d’un passé tourmenté. Ainsi, en l’espace de deux volumes, Valerio Varesi parvient à entraîner le lecteur francophone dans la jubilation de la découverte d’une nouvelle série aussi dense que prometteuse.

     

    A quelques jours de Noël, Ghitta Tavgliavini, la vieille tenancière de la pension de la via Saffi, ne répond plus. Et pour cause, on retrouve son corps sans vie, étendu dans la cuisine de son appartement. En charge de l’enquête, le commissaire Soneri parcourt les rues de la ville en mettant à jour, au fil de ses pérégrinations, tout un réseau de corruption dont les connections transitent par la pension. Mais au-delà des accointances et des compromissions, le commissaire Soneri se replonge dans les dédales troubles des souvenirs douloureux de sa jeunesse. Car c’est à la pension de la via Saffi qu’il a rencontré sa femme Ada, décédée en accouchant d’un enfant mort-né. Le brouillard trouble la mémoire mais n’atténue pas la douleur et le désir de vengeance.

     

    C’est sur une succession des portraits dressés dans l’atmosphère déliquescente d’une ville embrumée, troublée par le passé de combats idéologiques d’autrefois et dont les réminiscences n’ont de cesse de vouloir s’inviter dans un présent idéalisé que le commissaire Soneri va se charger de résoudre l’énigme que représente ce meurtre oscillant entre les mobiles crapuleux d’une constellation d’édiles corrompus ou le désir de vengeance d’hommes et de femmes en proie aux regrets lancinants et destructeurs d’une insupportable compromission.

     

    En se confrontant au passé d’une épouse disparue tragiquement, idéalisée par la somme d’un chagrin aveugle qu’il porte en lui, le commissaire Soneri va devoir remettre en question ses certitudes et s’impliquer plus qu’il ne le voudrait dans les tréfonds sordides des secrets que détenait la vieille Ghitta Tavgliavini. Montagnarde honnie par les habitants de son village d’origine, cette redoutable rebouteuse n’a eu de cesse, toute sa vie durant, de mettre en place un réseau tentaculaire, constitué de secrets d’alcôve et de biens immobiliers dont la fortune devient l’unique source de respectabilité. Une quête aussi vaine qu’inassouvie puisque la vieille dame ne fait qu’attiser rancœur et haine qui causeront sa perte. Une succession de portraits peu flatteurs mais foncièrement humains hantent ainsi les rues de cette cité rongée par la brume incarnant la nostalgie, les faux-fuyants et les regrets qui assèchent les cœurs de ses habitants. Dans un jeu de filatures nocturnes, le commissaire Soneri arpente les rues d’une ville animée par les rencontres occultes de protagonistes sournois dont les idéaux paraissent avoir été relégué aux oubliettes. L’enquête devient incertaine, presque trouble et vaporeuse au point tel que le policier semble parfois vouloir s’en détacher complètement. Pour ne pas perdre pied, le commissaire Soreni pourra compter sur Angela qui s’extirpe du rôle volage qu’elle endossait dans Le Fleuve de Brumes pour incarner une femme bien plus consistante et bien plus ensorcelante que dans l’opus précédent.

     

    La ville de Parme prend également une place importante dans le cœur du récit en alimentant les thématiques liées aux idéologies d’un passé qui ne restitue désormais plus qu’une succession de monuments à la gloire des rouges et des noirs alors que les convictions d’autrefois se sont délitées dans la convoitise d’un pouvoir qui a laissé place à la compromission. Elle permet également d’appréhender ces quartiers populaires du centre-ville qui se sont désertifiés avant que les vagues d’immigrés prennent possession des lieux pour être délogés à leur tour par la convoitise des promoteurs immobiliers. Un lieu incertain où ne subsistent plus que quelques vagues souvenirs et que quelques petits commerçants qui entretiennent le mythe à l’exemple du barbier Bettati. D’autres personnages originaux vont agrémenter ce récit qui prend quelques consonances chaleureuses par le biais des plats mitonnés par Alceste, le restaurateur du Milord où le commissaire Soneri a ses habitudes en dégustant les recettes typiques d’une région qu’il affectionne et qu’il arrose avec quelques bonnes bouteilles de vin.

     

    Souvent comparé à l’illustre commissaire Maigret, Soneri présente davantage de similitudes avec Duca Lamberti le personnage emblématique du romancier Giorgio Scerbanenco. En effet, ce sont des événements personnels dramatiques qui donnent cette stature si particulière à ces deux enquêteurs qui sortent résolument de l’ordinaire. Néanmoins, les récits de Valerio Varesi empruntent quelques tonalités poétiques pour mettre en scène une vision nostalgique et désenchantée d’un pays embrumé par les remords et les regrets à l’instar des locataires de La Pension De la Via Saffi. Envoûtante et maîtrisée, la série mettant en scène le commissaire Soneri se révèle être l’un des très belles découvertes de la maison d’édition Agullo.

     

    Valerio Varesio : La Pension De La Via Saffi (L’Affittacamere). Editions Agullo 2017. Traduit de l’italien par Florence Rigollet.

    A lire en écoutant : Una Notte Disperata de Musica Nuda. Album : Complici. Bonsaï Music 2011.