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France - Page 34

  • Fureur noire : Manotti / DOA, le polar politique

    A l'heure des élections, c'est bien évidemment le sempiternelle sujet de la sécurité qui enflamme les débats où l'on assène aux citoyens, à coups de slogans ravageurs et phrases rapides, les recettes qui vont remettre la cité sur les rails.

     

    Police de proximité ! Patrouilles pédestres ! Tolérance zéro ! Des termes génériques qui prennent désormais des teintes politiques sans que l'on soit bien certain que les protagonistes en connaissent toutes les implications. La plupart d'entre eux seraient bien avisés de se pencher sur les ouvrages de nombreux spécialistes qui se sont intéressés à la question depuis bien des années, ceci avant même que ce sujet émotionnel, ne devienne le thème majeur des politiques et ne soit justement dévoyé par certains d'entres eux ! Dans le domaine francophone, on peut citer : Sebastien Roché, Loïc Wacquant, Jean-Paul Brodeur, Dominique Monjardet, Jean-Louis Loubet de Bayle et François Dieu. Certains ouvrages de ces auteurs sont même disponibles en ligne !

     

    Il faut l'admettre certaines de ces études, toutes passionnantes qu'elles soient, peuvent tout de même s'avérer extrêmement arides et on peut aborder le sujet de la sécurité et de la police par le biais du polar en s'intéressant particulièrement aux romans de nos voisins français.

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    Avec « Bien connu de nos services » Dominique Manotti nous invite à partager la vie quotidienne des policiers du commissariat de Panteuil (lieu fictif), dans la banlieue nord de Paris, dirigé par la commissaire Le Muir, femme ambitieuse qui a adopté la politique du chiffre imposée par les pouvoirs politiques du Ministère de l'Intérieur. Flics aguerris, jeunes débutants, hiérarchie dépassée, truands chevronnés, petits voyous, tout ce petit monde s'entrecroise dans un chassé-croisé rapide et passionnant. Description du travail des BAC, de police-secours qui semble tellement vain au milieu de banlieues défavorisées, de camps gitans et de squats vétustes prêts à flamber. Afin de favoriser l'intrigue, l'auteur a parfois forcé le trait au détriment de la réalité. Mais cela importe peu, car au travers de ces pages on peut tout de même se rendre compte du désarroi de ces policiers qui, manipulés par leurs hiérarchies et le pouvoirs politiques, se referment sur eux-mêmes se révélant ainsi incapables de faire face aux défis sociaux qui les submergent. Débrouillardise et improvisation pour régler les problèmes au jour le jour tout cela à l'ombre de la compromission et  de la corruption. Un tableau sombre, probablement exagéré mais qui reflète tout de même le malaise du monde policier.

     

    Pour DOA le tableau n'est guère plus reluisant même s'il s'attarde sur les SG et le monde des services secrets pour dépeindre les arcanes d'un monde souterrain inquiétant. « Citoyens Clandestins » c'est un thriller haletant avec cette menace d'attentat à la Dioxine sur la France par un groupuscule d'islamistes radicaux. Une description froide et troublante de réalisme d'une traque sanglante d'un ensemble de clandestins, d'agents doubles, d'espions à la solde d'une clique de manipulateurs qui mettent la raison d'état au-dessus de tous les principes moraux. Un livre volumineux extrêmement bien documenté qui se lit d'une traite, même s'il pêche parfois par son ton quelque peu professoral.

     

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    La réunion des ces deux talents se retrouve dans « L'Honorable Société », livre à quatre mains de moins bonne facture qui se penche sur les arcanes des institutions étatiques liées à l'énergie atomique. Police criminelle, DGSE, éco terroristes, journalistes et milieu patronal s'interrogent ou tentent de dissimuler les mobiles du meurtre d'un policier rattaché à la commission pour l'Energie Atomique. Le tout se déroulant sur fond de campagne présidentielle, on assistera à la compromission des diverses instances étatiques qui useront de tous les expédients, même les plus extrêmes, pour parvenir à leur fin. On reprochera le côté impersonnel des personnages qui manquent de saveur. Toutefois l'intrigue, quoique classique, nous entrainera dans un récit passionnant, assez inquiétant et très bien documenté qui, espérons-le, ne s'avérera pas trop réaliste. Un sujet sensible (le nucléaire en France) que l'on retrouve d'ailleurs au cœur des débats pour l'élection présidentielle, rendent les tribulations du commandant Petrus Paris encore plus passionnantes. Cet enquêteur de la police criminelle, secondé par son équipe, devra faire preuve d'une pugnacité des tous les instants pour parvenir à résoudre cette sombre affaire.

     

    Pour la Fureur de Lire, on retrouvera Dominique Manotti et DOA lors d'une table ronde qui aura lieu le jeudi 6 octobre 2011 à 21h50 à la salle du Faubourg, sur le thème du polar social et politique. Le polar qui devient protestataire et contestataire, cela promet un beau débat qui sera précédé d'une pièce de théâtre intitulée « Je refuse de répondre » qui relate le combat de Dashiell Hammett en proie à l'inquisition de la commission du sénateur McCarthy. Cela se déroulait en 1953. Le polar contestataire, protestataire, une forme d'écriture qui ne date pas d'hier.

     

     

    Dominique Manotti : Bien connu des services de police. Série Noire/Gallimard 2010.

     

    DOA : Citoyens Clandestins. Série Noire/Gallimard 2007.

     

    Manotti / DOA : L'Honorable Société. Serie Noire/Gallimard 2011.

     

    A lire en écoutant : Demain c'est loin - IAM/L'Ecole du Micro d'Argent/Delabel-Virgin 1997.

     

     

     

     

  • FUREUR NOIRE : TONINO BENACQUISTA, LES MORSURES DE L'AUBE

     

    La Fureur de Lire aura lieu du 4 au 9 octobre 2001 et se parera de la plus belle des couleurs : Le noir. Fureur Noire pour cette édition placée sous le signedu polar et du roman noir avec durant toutes ces journées, soirées et même nuit blanche des cadors du genre qui vont truster la place littéraire. Un programme ch66227159_p.jpgargé que je vous laisserai découvrir en consultant le site internet que vous pouvez trouver en cliquant ici.

     

    Parmi toutes ces pointures, il faut citer Tonino Benacquista, écrivain et scénariste français très connu dans le milieu cinématographique pour ses collaborations fructueuses avec le cinéaste Jacques Audiard dans « Sur mes lèvres » (César du meilleur scénario) et « De battre mon cœur s'est arrêté » (César de la meilleure adaptation).

     

    Dans le domaine littéraire j'ai une affection particulière pour son roman « Les Morsures de l'Aube » qui a été adapté par Antoine De Caunes en 2001. Antoine (personnage récurrent des premiers romans de l'auteur) et « Mister Laurence » sont deux noctambules et parasites mondains qui écument les réceptions, les bars et les boîtes de nuit parisiennes grâce à leur tchatche et la myriade de contacts qu'il ont su nouer durant leurs virées nocturnes. Pour accéder à l'une de ces soirées privées, Antoine se fait passer pour l'ami d'un certain Jordan, qu'il connaît pourtant à peine et qu'il a vaguement croisé dans un bar de la place. Mais le bluff tourne mal, car si Antoine et « Mister Laurence » parviennent à entrer, c'est pour être rapidement conduit auprès de l'organisateur de la soirée, qui les charge de retrouver ce Jordan. Pour s'assurer de leur succès, l'homme, mystérieux et inquiétant, retient « Mister Laurence » tandis qu'Antoine va devoir se lancer dans une course effrénée afin de retrouver ce mystérieux Jordan ainsi que sa sœur, l'envoutante Violette.

     

    Une comédie sociale, un roman noir, un livre fantastique, les Morsures de l'Aube c'est tout cela à la fois, sans que l'on s'y perde, bien au contraire. On s'y sent bien ! Une belle ambiance nocturne émane des pages de cet excellent récit. L'auteur nous entraine dans ce monde de la nuit qu'il semble très bien connaître tant il est décrit à la perfection. Tonino Benacquista a su restituer cet univers particulier avec une dose équivalente de cynisme, d'humour et de mystère. Un cocktail parfait pour traverser ces nuits de bout en bout sans jamais s'ennuyer. On plongera dans ces lieux qui composent le Paris by night, mais que l'on peut retrouver dans toutes le villes du monde : Bars branchés, boîtes de nuit à la mode et rades pourris où le monde de la nuit se rassemble, s'expose et se disloque sous ces ténèbres éphémères pour éviter à tout prix la morsure de l'aube.

     

    Tonino Benacquista sera présent lors de cette Fureur Noire, le mardi 4 octobre 2011 à 18h00 pour le vernissage de l'exposition « POLAR ET DESSINS » qui aura lieu à la salle du Faubourg. On y découvrira des planches de Tardi, Loustal, Myles Hyman et bien d'autres illustrateurs de renom.

     

    Dans mes billets à venir, je reviendrai régulièrement sur cette manifestation littéraire en vous parlant des auteurs qui y seront présents. Il était grand temps que la Fureur de Lire vire au noir, car un livre vendu sur quatre est un polar comme le souligne dans son message d'introduction, M. Sami Kaanan, magistrat de la Ville de Genève en charge de la culture et du sport. Un chiffre à méditer...

     

     

    Des armées insolites

    Et des ombres équivoques

    Des fils dont on se moque

    Et des femmes que l'on quitte

    Alain Bashung, Tant de nuits

     

    Tonino Benacquista : Les Morsures de l'Aube. Editions Rivages/Noir 1992.

     

    A lire en écoutant : Tant de nuit - Alain Bashung - Bleu pétrole.

     

     

  • GIANNI PIROZZI : LE QUARTIER DE LA FABRIQUE, L’INFORTUNE DES ROMS.

     

    Capture d’écran 2013-10-26 à 01.20.10.pngRetour de vacances. La Croatie, pays encore sauvage, préservé (pour combien de temps encore) du tourisme de masse où la côte
     montagneuse, pelée par un soleil de plomb, plonge directement dans les eaux azurs et cristalline de la mer Adriatique. De cette carte postale idyllique, peu d'élément pour nous rappeler les ravages d'une guerre pas si lointaine qui désola toute cette région, ainsi qu'une grande partie des pays voisins de l'Europe du sud est. Quelques plaques commémoratives, des impacts d'obus et de balles soigneusement conservés et que
    lques clichés pour sensibiliser les touristes que nous sommes, aux conflits qui semèrent le chaos dans ces contrées des Balkans. Comme piqûre de rappel, il y a aussi dans mes bagages, emporté presque par hasard, ce livre de Gianni Pirozzi, "Le quartier de la Fabrique".

     

    Avril 1999, la guerre du Kosovo bat son plein et des réseaux s'organisent afin de livrer des armes aux milices de l'UCK. En France, Santis, ex-activiste italien des années de plomb, convainc son camarade Rinetti de convoyer une de ces cargaisons jusqu'au cœur du Kosovo. L'ouvrage, comme une « road story », décrit donc le voyage de Rinetti accompagné de Craven, Paco et Frankie. Après avoir affréter deux camions depuis la Hongrie, ces 4 compères de l'infortune sillonneront tour à tour la Roumanie, la Bulgarie, la Macédoine et l'Albanie tout en étant les témoins involontaires d'un environnement social en pleine déliquescence qui sombre peu à peu dans le chaos le plus meurtrier qui soit et qui ne laisseront aucun d'entre eux indemne. Au fil du périple, les convictions idéalistes s'étiolent pour ne laisser place qu'à une désillusion qui sera plus que brutale.

     

    On se laisse emporter sur ces routes chaotiques, décrites à la perfection par un auteur inspiré. Dépôts de locomotives inquiétant, postes de garde-frontière aux longues files d'attente, ponts démesurés et complexes industriels quasiment abandonnés, entrecoupés de paysages montagneux et de plaines aux aspects ruraux presque révolus. Une guerre sans héros où milices serbes, groupuscules de l'UCK et forces de l'OTAN s'opposent dans un chassé-croisé déroutant. Dans ce conflit ce sont bien évidemment les populations civiles qui font particulièrement les frais de cette guerre, se retrouvant sur les routes pour fuir les exactions des diverses milices. Et parmi cette population martyrisée, il en est une qui a particulièrement souffert aussi bien de la fureur des milices et que de celle des habitants exaspérés, c'est la population rom. Le récit est d'ailleurs entrecoupé de témoignages vibrants de demandeurs d'asiles roms décrivant les exactions qu'ils ont subit durant ce conflit. Gianni Pirozzi  nous livre également le récit dantesque  de la destruction complète d'un quartier entier de la ville de Mitrovica au Kosovo, (le quartier de la Fabrique) vieux de cinq siècles et qui abritait des milliers de familles roms. Toutes traces de son existence ont été complètement effacées, comme s'il n'avait jamais existé. Il ne reste plus la moindre ruine.

     

    A la lecture de ce roman, on perçoit mieux quelques une des raisons qui ont poussé des milliers de roms des pays de l'Est à trouver refuge dans nos contrées. C'est tout le talent de Gianni Pirozzi qui par le biais d'un récit prenant, plein de suspense, nous relate les conditions sociales d'un peuple honnis dont personne ne souhaite la présence et ceci particulièrement dans les rues de nos cités occidentales.

     

    Le quartier de la Fabrique est donc un roman noir, écrit comme un carnet de voyages, décrivant avec une précision redoutable, une partie de l'Europe que bon nombre d'entre nous méconnaissent. Une écriture, précise, minutieuse qui font que l'on tourne les pages sans pouvoir s'arrêter.

     

    Gianni Pirozzi : le quartier de la Fabrique. Editions Rivages/Noir 2009.

    A lire en écoutant : Bohemian Ballet de Deep Forest. Album : Bohème, Sony Music 1995.

     

  • Tardi – Manchette : Sous les pavés, la plage, l’enfer et le Petit Bleu de la Côte Ouest

    manchette,tardi,plage roman noir,polar,tueurs,bdEn libraire, marketing oblige, nous avons droit ces derniers temps aux bandeaux ultra originaux des commerciaux avec la mention : « Roman de l'été » ou pire encore « polar de l'été », tout ça pour vous faire acheter le mauvais livre spécialement édité pour cette période qui finira sur votre pile de romans inachevés. Un peu excessif me direz-vous, mais tellement réaliste. On en a tous fait les frais un jour ou l'autre. On découvre également les prix littéraires de l'été avec par exemple le « thriller de l'été » spécialement conçus par quelques revues mensuelles dont la principale caractéristique est de couronner l'auteur le plus conscensuel possible à défaut du plus talentueux. On appréciera tout de même certaines selections émanant principalement des blogs et de quelques revues littéraires « sérieuses ». Faites votre choix.

     

    Pour vous isoler de l'enfer des plages bondées et pour vous pendre à votre parasol, un excellent roman noir de Jean-Patrick Manchette que je vous propose de redécouvrir sous l'angle de la BD avec cette magnifique adaptation de Jacques Tardi : Le Petit Bleu de la Côte Ouest dont l'un des moments fort de l'histoire se déroule justement sur une plage, ce qui est de circonstance en cette période « estivale ». Georges Gerfaut est un cadre dynamique dont la routine sera brisée par deux tueurs lancés à sa poursuite. Pour faire face, il mettra de côté tout ce qui façonne sa petit vie trépidante. Il affrontera, parfois de manière pathétique, ses adversaires avant de retourner auprès des siens pour se retrouver dans une voiture à 145 km/h à tourner en rond, la nuit sur le périphérique désert.

     

    Une excellente adaptation en noir et blanc qui accentue le ton froid et cassant des dialogues qui sont fidèlement restitués. Il faut dire que le dessinateur et le romancier s'étaient déjà rencontré en 1978 pour nous livrer « Griffu » une des première BD - roman noir de l'époque. Du talent à l'état pur et une bonne claque dans la gueule à une époque ou des revues comme Pilote publiaient de la bonne BD.

     

    Avec le Petit Bleu de la Côte Ouest, Manchette voulait nous décrire le malaise de ces cadres moyens sous constante pression où la réussite sociale importe plus que tout. Le roman paru en 1976 n'en reste pas moins d'actualité en ces temps de troubles économiques où les performances sont une exigence de tous les instants.

     

    Dans la foulée, vous apprécierez une nouvelle adaptation de Jacques Tardi avec la Position du Tireur Couché, tiré également d'un roman de Manchette. Là également le dessin de Tardi restitue parfaitement l'histoire de ce tueur à gage, froid, précis, méthodique mais dont la vie se désagrège au fur et à mesure qu'il sème les cadavres pour échapper à son destin qui le ramènera inéxorablement à la petite vie minable qu'il a toujours cherché à fuir. Et l'on concluera que cet auteur a eu plus de chance dans les adaptations bd que cinématrographiques de ses œuvres, mais on pourra tout de même découvrir Polar de Jacques Bral pour se faire une bonne idée de ce que l'on peut tirer d'un excellent roman noir de Manchette.

     

    Sous les pavés, il n'y a plus la plage, il y l'enfer décrétait Ferre ! et le Petit Bleu de la Côte  Ouest, pourrait-on rajouter !

     

    Manchette - Tardi : Le Petit Bleu de la Côte Ouest. Humanoïdes Associés 2005.

    Manchette - Tardi : La Position du Tireur Couché. Futuropolis 2010.

    A lire en écoutant : Gerry Mulligan. Litttle Girl Blue.

     

     

  • Fred Vargas : L’Armée Furieuse. Le grand retour d’Adamsberg, le commissaire lunaire.

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    Un pigeon aux pattes ligotées, une vieille dame assassinée à coup de miettes de pain, un riche industriel carbonisé dans sa voiture et l'armée furieuse qui déferle à nouveau sur un petit village normand. La brigade la plus décalée de Paris, dirigée par le commissaire Adamsberg aura du pain sur la planche !

     

    Avec ce nouveau roman de Fred Vargas, nous retournons dans les délices des références moyenâgeuses qui avait fait le succès, entre autre, de « Pars Vite et Reviens Tard », car Adamsberg devra affronter la légende de la mesnie d'Hellequin, seigneur d'une horde d'âmes damnées qui hante les sentiers sombres  du petit village d'Ordebec. La légende devient plus concrète lorsque l'un des villageois, un chasseur sadique, est retrouvé mort sur un des chemins empruntés par l'armée furieuse.

     

    Une France rurale, truffée de personnages mémorables aux manies étranges. C'est de cette manière que Fred Vargas nous entraine dans ces histoires composées de petites anecdotes qui reliées les unes aux autres forment un récit cohérent, même si on peut trouver parfois que les liens soient un peu tirés par les cheveux. Des lacets, des miettes de pains, du sucre et un bout de ficelle. Des objets banals qui permettront comme toujours au commissaire Adamsberg de résoudre cette enquête complexe, où les meurtres vont se succéder à un rythme infernal.

     

    Une ambiance envoutante, dans ce petit village normand, baigné de contes médiévaux que l'assassin exploitera pour terrifier les villageois. Des personnages attachants et mystérieux, comme cette Lina dont les visions prophétiques désignent les victimes à venir qui seront emportées par l'armée furieuse. Ses quatre frères plus étranges les uns que les autres et Léo la vieille dame aux répliques terriennes et pertinentes.

     

    Un roman composé de vieilles pierres, de sentiers sinueux, de sous-bois étranges et de prés piquetés de vieux pommiers où les vaches paraissent immobiles. Un décors où semble se complaire ce commissaire aux pensées décousues qui sait s'attarder sur les petits détails sans importances et apprécier les mures juteuses. Ses acolytes seront toujours à ses côtés pour l'épauler. Des policiers dont les fêlures ou les défauts se muent en qualités toujours propices pour le bon déroulement des enquêtes, avec Danglard dont l'intelligence, la culture et la mémoire prodigieuses se noient parfois dans les brumes de son alcoolisme, Veyrenc qui délivre ses conclusion sentencieuses en alexandrin, Violette Retancourt femme aussi gigantesque que décidée, Froissy l'angoissé boulimique et Mercadet l'endormi compulsif.

     

    Comme toujours, on navigue entre les intrigues sombres et le côté décalé des personnages qui donnent aux histoires de Fred Vargas une originalité toute particulière que Régis Wargnier n'est pas parvenu à rendre dans son adaptation de « Pars Vite et Reviens Tard » où les acteurs bien trop sérieux et bien trop habités n'arrivaient pas restituer l'aspect truculent et très terrien des récits de Vargas.

     

    « L'Armée Furieuse » est, sans conteste, avec « l'Homme à l'envers » et « Pars Vite et Reviens Tard », l'un des meilleurs romans de Fred Vargas, grande reine du polar français. A lire immodérément !

     

    A lire en écoutant : How Fortunate the Man With None - Interprète : Dead Can Dance - Album : Into the Labyrinth / Tableau de chasse - Interprète : Claire Diterzi - Album : Tableau de chasse

     

    Fred Vargas : L'Armée Furieuse. Edition Viviane Hamy 2011.