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  • Fred Vargas : Quand Sort La Recluse. Le venin du succès.

    fred vargas, éditions flammarion, adamsberg, quand sort la recluseQuand Sort La Recluse, dernier roman de Fred Vargas, reine du polar ou plus précisément du  « rompol » comme elle désigne l’ensemble de son oeuvre, débarque dans nos librairies, pour ceux qui ne l’aurait pas remarqué ou qui aurait loupé la vague de service de presse qui a déferlé sur les multiples supports médiatiques. Après la déception de Temps Glaciaires qui marque l’essouflement de la série Adamsberg, je mesure tout de même l’attachement (l’addiction ?) pour l’ensemble de ces personnages puisque me voici plongé, malgré tout, dans une nouvelle enquête de ce commissaire emblématique de la littérature policière française. Signes d’un succès qui ne se dément pas, on évoque désormais Fred Vargas par le truchement de son classement dans les meilleures ventes de livres ainsi que par le biais du tirage initial et du nombre d’exemplaires vendus alors que les recensions sur l’ouvrage ne font état que d’éléments qui ont déjà été évoqués à de multiples reprises lors de la parution de ces précédents romans.

     

    Dans la région de Nîmes, la Recluse, une araignée plutôt discrète, est sortie de son trou pour faire trois victimes qui ont succombé à sa morsure qui n’était pourtant, jusqu’à présent, pas signalée comme étant potentiellement mortelle. On évoque bien une mutation liée à l’usage des pesticides, mais le commissaire Adamsberg n’y croit guère. Revenu des brumes islandaises, il percoit, dans le nuage éthéré de ses pensées, un obscur assassin qui officierait afin d’accomplir une sourde et terrible vengeance. Il faut dire que l’image de la Recluse le renvoie vers des terreurs d’enfance enfouies qui ne sont pas forcément en lien avec une banale arachnaphobie mais évoque plutôt une terrible tradition issue de rites obscurs du Moyen Age. Il ne reste plus qu’a convaincre tout le commissariat de se lancer à la poursuite de ce meurtrier. Une tâche qui va se révéler bien plus ardue qu’il n’y paraît, provoquant des scissions au sein d’une équipe qui doute du bien-fondé des certitudes d’Adamsberg. Que fait le capitaine, a-t-il perdu la raison ?

     

    On reprend les mêmes et on recommence. Pour ceux qui souhaitent retrouver l’univers de Fred Vargas sans être troublé par un quelconque changement, Quand Sort La Recluse entame un retour aux sources de la série Adamsberg en reprenant les fondamentaux qui en ont fait son succès. Une tradition médiévale en lien avec des meurtres, un lot de personnages atypiques, des dialogues décalés et une enquête alambiquée qui s’appuie sur le passé du commissaire Adamsberg, on se retrouve ainsi avec un récit correct qui ne brille pas par son originalité. Avec des recettes éprouvées, Fred Vargas signe un nouveau succès en devenir pour des lecteurs en quête de retrouvailles et d’habitudes au gré d’une intrigues aux entournures quelque peu éculées. Ainsi pour les plus avisés et les plus addicts d’entre eux, il faudra bien admettre que l’assassin est aisément identifiable tant il s’inscrit dans une espèce de tradition propre aux récits de l’auteur que je me garderai bien de dévoiler.

     

    Bien que Fred Vargas s’en défende, il y a désormais, derrière la série Adamsberg, une histoire de gros sous qui s’assortit inévitablement avec un manque de créativité et d’originalité. Il s’agit là d’un des revers de la médaille du succès que l’on ne saurait attribuer uniquement à Fred Vargas, puisque toute la chaîne du livre, jusqu’aux lecteurs que nous sommes, doit être mise en cause. Ainsi dans un univers où les publications n’ont jamais été aussi nombreuses, je m’étonne toujours de cette concentration et de mise en lumière sur quelques auteurs « bankables » qui rapportent certainement un revenu conséquent mais qui se fait au détriment de tous ces ouvrages méconnus qui peinent à trouver leur place dans cette course au succès. Un logique qui obéit forcément à un lot de contraintes afin de répondre aux attentes des lecteurs permettant ainsi d’écouler ces fameux tirages de plusieurs milliers d’exemplaires. Fred Vargas ne se dérobe malheureusement pas à la règle, même si elle tente de pimenter le récit en implémentant un conflit au sein de l’équipe du commissaire Adamsberg, comme elle l’avait d’ailleurs fait dans Temps Glaciaire. Au gré de dialogues, certes savoureux, mais désormais terriblement convenus, l’auteur égrène son lot de personnages qui ne sortent pas de leurs rôles. Adamsberg demeure ce personnage toujours aussi flou qui enquête et dirige ses collaborateurs au gré de ses sensations ; Veyrenc débite encore quelques rares alexandrins qui ne font que souligner l’essouflement de cette série ; Danglard dispense son savoir au gré des investigations en cours et Retancourt s’affirme toujours comme étant la femme-vestale, pilier indestructible de la brigade. Tout est donc bien rangé dans ce récit agréablement convenu qui présente l’avantage de se lire rapidement sans pour autant en retirer l’indéfinissable frisson que nous procurait des romans tels que L’Homme A L’Envers, Pars Vite Et Reviens Tard ou L’Armée Furieuse.

     

    Sur les eaux bien tranquilles de la notoriété, Fred Vargas nous livre donc, avec Quand Sort la Recluse, un ouvrage qui comblera les attentes des aficionados du commissaire Adamsberg sans pour autant vouloir remettre en question les rouages d’une série qui tourne désormais dans le vide en dispensant tout de même quelques éléments d’intrigues agréables à découvrir. Néamoins La Recluse mord cruellement en distillant son poison létargique qui font que, l’air de rien, l’auteur s’endort tout doucement sur son succès.

     

    Fred Vargas : Quand Sort La Recluse. Editions Flammarion 2017.

    A lire en écoutant : Le Capitaine de William Sheller. Album : William Sheller & le quatuor Stevens (Live). Mercury 2007.

  • Fred Vargas : L’Armée Furieuse. Le grand retour d’Adamsberg, le commissaire lunaire.

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    Un pigeon aux pattes ligotées, une vieille dame assassinée à coup de miettes de pain, un riche industriel carbonisé dans sa voiture et l'armée furieuse qui déferle à nouveau sur un petit village normand. La brigade la plus décalée de Paris, dirigée par le commissaire Adamsberg aura du pain sur la planche !

     

    Avec ce nouveau roman de Fred Vargas, nous retournons dans les délices des références moyenâgeuses qui avait fait le succès, entre autre, de « Pars Vite et Reviens Tard », car Adamsberg devra affronter la légende de la mesnie d'Hellequin, seigneur d'une horde d'âmes damnées qui hante les sentiers sombres  du petit village d'Ordebec. La légende devient plus concrète lorsque l'un des villageois, un chasseur sadique, est retrouvé mort sur un des chemins empruntés par l'armée furieuse.

     

    Une France rurale, truffée de personnages mémorables aux manies étranges. C'est de cette manière que Fred Vargas nous entraine dans ces histoires composées de petites anecdotes qui reliées les unes aux autres forment un récit cohérent, même si on peut trouver parfois que les liens soient un peu tirés par les cheveux. Des lacets, des miettes de pains, du sucre et un bout de ficelle. Des objets banals qui permettront comme toujours au commissaire Adamsberg de résoudre cette enquête complexe, où les meurtres vont se succéder à un rythme infernal.

     

    Une ambiance envoutante, dans ce petit village normand, baigné de contes médiévaux que l'assassin exploitera pour terrifier les villageois. Des personnages attachants et mystérieux, comme cette Lina dont les visions prophétiques désignent les victimes à venir qui seront emportées par l'armée furieuse. Ses quatre frères plus étranges les uns que les autres et Léo la vieille dame aux répliques terriennes et pertinentes.

     

    Un roman composé de vieilles pierres, de sentiers sinueux, de sous-bois étranges et de prés piquetés de vieux pommiers où les vaches paraissent immobiles. Un décors où semble se complaire ce commissaire aux pensées décousues qui sait s'attarder sur les petits détails sans importances et apprécier les mures juteuses. Ses acolytes seront toujours à ses côtés pour l'épauler. Des policiers dont les fêlures ou les défauts se muent en qualités toujours propices pour le bon déroulement des enquêtes, avec Danglard dont l'intelligence, la culture et la mémoire prodigieuses se noient parfois dans les brumes de son alcoolisme, Veyrenc qui délivre ses conclusion sentencieuses en alexandrin, Violette Retancourt femme aussi gigantesque que décidée, Froissy l'angoissé boulimique et Mercadet l'endormi compulsif.

     

    Comme toujours, on navigue entre les intrigues sombres et le côté décalé des personnages qui donnent aux histoires de Fred Vargas une originalité toute particulière que Régis Wargnier n'est pas parvenu à rendre dans son adaptation de « Pars Vite et Reviens Tard » où les acteurs bien trop sérieux et bien trop habités n'arrivaient pas restituer l'aspect truculent et très terrien des récits de Vargas.

     

    « L'Armée Furieuse » est, sans conteste, avec « l'Homme à l'envers » et « Pars Vite et Reviens Tard », l'un des meilleurs romans de Fred Vargas, grande reine du polar français. A lire immodérément !

     

    A lire en écoutant : How Fortunate the Man With None - Interprète : Dead Can Dance - Album : Into the Labyrinth / Tableau de chasse - Interprète : Claire Diterzi - Album : Tableau de chasse

     

    Fred Vargas : L'Armée Furieuse. Edition Viviane Hamy 2011.