Joseph Knox : Chambre 413. Les disparus.
Joseph Knox est un jeune auteur britannique qui s'est rapidement imposé avec Sirènes, un premier roman policier racé aux accents hard-boiled se déroulant dans la belle ville de Manchester et mettant brillamment en scène Aiden Wait, un jeune inspecteur de police borderline. Même s'il ne révolutionnait pas le genre, on appréciait tout de même la fraîcheur d'une intrigue envoutante nous entraînant au cœur du monde de la nuit. Il faut dire que l'on se prend à aimer ce personnage qui n'hésite pas à mettre sa carrière en jeu en défiant sa hiérarchie dans un climat tendu, mais contrebalancé par ce regard corrosif que le policier jette sur ses interlocuteurs qui peuvent se montrer violents. Mais pour Aiden Wait tout cela importe peu car le policier sait encaisser les coups sans jamais vraiment céder à cette compromission qui prévaut au sein de l'institution. Ne pas faire de vague n'est donc pas vraiment l'adage de cet enquêteur atypique, vif d'esprit, qui force l'admiration en ne versant jamais dans la caricature. Autant dire que l'on se réjouit de retrouver ce personnage dans Chambre 413, second volet des enquêtes d'Aiden Wait qui végète désormais au sein de la patrouille de nuit en battant le pavé de la cité de Manchester.
L’inspecteur Aidan Wait peut s’estimer heureux car son supérieur, le superintendant Parrs, ne l’a finalement pas viré mais relégué sur une voie de garage en l'intégrant à la patrouille de nuit consistant à répondre à des appels insignifiants comme des feux de poubelle, en compagnie de Peter Sutcliffe, surnommé Sully, un collègue à la fois chevronné et acariâtre. Mais dans la chaleur suffocante d’un été comme on ne les fait plus à Manchester, les deux policiers doivent se rendre au Palace, un immense hôtel désaffecté du centre-ville. Sur place, c’est dans la chambre 413 qu’ils découvrent le corps sans vie d’un homme à l’étrange sourire figé. La première difficulté survient lorsqu’il s’agit d’identifier le cadavre. En effet, on a été jusqu’à enlever les étiquettes de ses vêtements et limer ses dents alors que ses doigts sont dépourvus d’empreintes digitales. Comme si l’homme avait souhaité se débarrasser définitivement de son identité avant de disparaître. Et quel est ce message mystérieux que l’on retrouve cousu à l’intérieur de son pantalon ? Y a-t-il seulement un sens à cette mise en scène macabre ?
Dans le sillage des pérégrinations de l’inspecteur Aiden Wait, nous embarquons une nouvelle fois dans le monde interlope de la nuit à Manchester que Joseph Knox connaît bien en ayant officié comme barman avant de se lancer dans l’écriture. C’est dans cette atmosphère urbaine, rendue plus lourde avec la chaleur des nuits estivales que le policier va mener de front plusieurs enquêtes avec son coéquipier Sutty qui prend davantage d’importance que l’opus précédent. On se prend même à apprécier la dynamique qui s’instaure entre ces deux individus qui se tolèrent dans une ambiance pesante, chargée de tensions, de non-dit et d’échanges acerbes. Avec Sutty, on découvre un personnage acariâtre qui n’est pas dépourvu d’une certaine intelligence et d’une expérience professionnelle qui font de lui un policier portant un regard sans concession sur la société qui l’entoure. A certains égards on lui trouverait une certaine ressemblance avec Aiden Wait. Outre l’identification d’un cadavre, l’inspecteur Wait va également devoir enquêter sur une jeune femme victime d’un amant qui menace de diffuser des photos compromettante sur les réseaux sociaux. D’autre part, Joseph Knox lève également un voile sur le passé de son inspecteur qui doit répondre aux menaces d’un certain Bateman qui lui rappelle des souvenirs terribles de son enfance. Afin de démêler cet écheveau complexe d’intrigues qui s’entrecroisent, aux entournures parfois un brin trop alambiquées, le lecteur devra s’accrocher pour ne pas se perdre en chemin. Néanmoins on se retrouve séduit par la voix originale d’un auteur qui utilise les codes du genre sans en abuser et réussi même à surprendre le lecteur comme cette confrontation entre Aiden et Bateman, un personnage complexe qui nous fait frissonner et qui explique certaines attitudes d’un policier contraint de se frotter à son passé qu’il pensait avoir enfouit. On trouve d’ailleurs une certaine similitude entre Aiden Wait et les démarches de cet homme mystérieux, retrouvé mort dans ce singulier hôtel désaffecté, qui s’est débarrassé de son passé au propre comme au figuré.
Avec Chambre 413, il est donc surtout question d’ambiance et d’atmosphère nocturne pour un polar à la fois complexe et singulier qui confirme le talent de Joseph Knox parvenant, sans renouveler le genre, à surprendre le lecteur avec un texte qui se joue des codes du roman policier, ceci pour être plus grand plaisir.
Joseph Knox : Chambre 413. Editions du Masque 2019. Traduit de l'anglais (Grande-Bretagne) par Fabienne Gondrand.
A lire en écoutant : The Smiths : There Is A Light That Never Goes Out. Album : The Queen Is Dead. 2014 Rhino UK a division of Warner Music UK Ltd.

Où l’on se retrouve dans la tête de cet assassin nous livrant ses considérations sur la façon de se débarrasser d’un cadavre. Un gars plutôt ordinaire, chauffeur de taxi solitaire qui s’offre une petite vie tranquille en entretenant sa belle voiture, son charmant jardin et sa somptueuse maison, un héritage de sa maman. Un gars plutôt beau gosse, quelque peu mysogine qui s’offre la compagnie de quelques jolies filles qu’il croise au gré de ses courses. Un gars plutôt mysanthrope qui va tomber raide dingue de la belle Jacqui en nous racontant de manière froide, calme et posée toutes les raisons qui l’ont contraint à l’étrangler dans le lit conjugal. Un gars plutôt sympathique finalement. Sauf lorsque l’on abuse un peu trop de sa gentillesse.
Avec Promenade du Crime l’auteur pose les deux axes principaux que l’on retrouvera tout au long de la trilogie. Il y a tout d’abord le massacre dans une villa qui se déroule de nos jours et en contrepoint, des extraits d’un journal récemment découvert qui évoque l’affaire sanglante du Tueur de la Malle qui se produisit en 1934. C’est particulièrement l’atmosphère du Brighton des années 30 que l’on appréciera dans cette première partie, même si l’on déplore quelques petites incohérences lorsque l’auteur du journal exprime des regrets au sujet d’évènements qui ne se sont pas encore produit.
Abandonnés de Dieu nous permettra de découvrir l’identité du Tueur de la Malle dont on suit le parcours tragique durant son incorporation dans les premiers contingents de soldat engagés lors de la première guerre mondiale. Il s’agit de la meilleure partie du roman avec une succession de passages sanglants émaillés d’instants poignants où nombre de soldats démobilisés et perturbés psychiquement embrassent la carrière de malfrats pour subvenir à leurs besoins. Une autre partie du récit se déroule en Italie durant la fin de le seconde guerre mondiale tout en faisant quelques incursions de nos jours afin de conclure l’affaire du massacre de la villa.