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Rechercher : David Peace

  • David Thomas : Ostland. Dans la perpective de l'abîme.

    Capture d’écran 2015-11-15 à 23.01.31.pngDépeints comme des monstres presque surnaturels, les auteurs s’attachent bien souvent aux portraits originaux de sérials killers qu’ils façonnent et dont les destins troubles et parfois outranciers fascinent le lecteur, ceci au détriment de l’éternel enquêteur ou profileur en quête de rédemption, devant, au prix d’une souffrance parfois insurmontable, se mettre dans la peau de l’odieux suspect qu’il traque sans relâche. Ostland de David Thomas se démarque de ces récits formatés puisqu’il dresse l’étrange parcours de Georg Heuser, un inspecteur de police affecté au sein d’une unité traquant un sérial killer sévissant à Berlin pour devenir ensuite un officier de la SS chargé de l’élimination des déportés juifs dans le ghetto de Minsk.

     

    Le 23 juillet 1959, la police interpelle Georg Heuser alias Le Limier, honorable citoyen de la République Fédéral d’Allemagne et accessoirement chef de la police criminelle. Mais pourquoi en voudrait-on à cet honorable citoyen qui a notamment traqué en 1941, le mystérieux tueur sévissant sur la ligne du S-Bahn à Berlin ? Sous les ordres d’Heydrich, le policier n’a fait que son devoir en interpellant un fou furieux qui terrorisait la ville. Devenu officier au sein de la SS, n’en a-t-il pas fait de même en administrant le ghetto de Minsk et en se chargeant de l’élimination des déportés juifs ? Le parcours d’un policier héroïque, devenu criminel de guerre.

     

    Même s’il prend parfois la  forme d’un thriller, Ostland se détache singulièrement de la kyrielle d’ouvrages consacrés aux sérials killers puisqu’il se base sur des faits réels. En effet, l’auteur a choisi de romancer le parcours atypique de cet inspecteur de police traquant un sérial killer puis devenant lui-même un tueur sanguinaire à la solde du nazisme. La partie la plus romancée est celle qui s’intéresse aux divers éléments que les enquêteurs recueillent dans le cadre du procès pour crime de guerre à l’encontre de Georg Heuser. On y découvre Paula Siebert, jeune femme juriste à une époque où l’on peine à accepter la gent féminine à de tels postes et son mentor, Max Kraus, ancien soldat de l’Afrika Korps, dirige l’enquête. Ce sont les personnages fictifs de ce roman qui mettent en perspective toute la monstruosité de ces citoyens ordinaires revenus à la vie civile qui paraissent avoir oublié tous les actes odieux qu’ils ont commis durant la guerre.

     

    A mesure que l’on progresse dans les différentes phases de préparation au procès, nous découvrons le parcours de Georg Heuser. Il y a tout d’abord l’enquête classique où l’on nous présente une équipe de la police criminelle traquant un tueur sévissant dans la ville de Berlin. Georg Heuser est un policier novice qui fait ses armes auprès d’un commissaire de police expérimenté qui lui apprend l’obéissance mais également la loyauté envers ses collègues. Impliqué, le jeune policier va tout faire pour appréhender ce criminel, ceci sous la férule du sinistre général Heydrich qui dirigeait alors la Gestapo mais également la Kriminalpolizei. On y décèle déjà cette ambivalence où un officier programmant la solution finale se souciait des actes odieux d’un tueur en série.  David Thomas dresse le portrait sombre d’une ville Berlin qui n’a pas encore plongé dans le chaos. Les cabarets y sont encore présents et l’on parvient encore à faire la fête dans une atmosphère pesante alors qu’un criminel court dans les rues glacées de la ville. L’ombre de Peter Kurten, surnommé le vampire de Düsseldorf, qui inspira Fritz Lang plane sur cette partie du récit.

     

    Promu au sein de la SS, Georg Heuser est désormais affecté à Minsk où il doit prendre en charge des convois de déportés juifs qui sont méthodiquement exécuté par ses soins. Dans un contexte de devoir et d’obéissance, l’officier devient ainsi le monstre qu’il a traqué quelques mois auparavant sans qu’il n’en prenne vraiment conscience à l’instar de la confrontation qu’il a avec une jeune juive dont il tombe amoureux et qu’il tente de sauver. Il peine à comprendre que la jeune femme puisse le rejeter, lui son sauveur. Un déni qui persistera au-delà de ces années de guerre. Néanmoins il y a l’alcool pour oublier et quelques conversations sur le sens de ces massacres qui n’excusent pas les actes auxquels il adhère de manière particulièrement zélée. C’est donc une succession de descriptions poignantes, parfois difficilement soutenables que l’auteur aborde sans complaisance. On y perçoit l’influence de l’entourage direct qui accepte l’inacceptable sous le prétexte de la guerre en s’acclimatant à l’horreur quotidienne. On y distingue également l’odieux sens du devoir que son ancien mentor l’enjoint à accomplir sans aucune distinction entre le bien et le mal. Tout cela n’excuse évidemment pas Georg Heuser, mais au-delà de ces notions de mal et de bien, l’ouvrage pose, de manière sous-jacente, la question ultime qui est de savoir ce que l’on aurait fait à la place de cet officier SS dans de telles circonstances.

     

    Héro devenu bourreau, Ostland de David Thomas pose donc les différents contextes qui font d’un homme un tueur en série ou un officier zélé et sérieux. Intriguant, édifiant et effrayant.

     

    David Thomas : Ostland. Editions Presse de la Cité/Sang D’encre 2015. Traduit de l’anglais par Brigitte Hébert.

    A lire en écoutant : Mahler : Piano Quartet n° 1 in G Minor. Op 25, Allegro. The Villiers Piano Quartet. Etcetera 1989.

  • DAVID JOY : CE LIEN ENTRE NOUS. UNE SI GRANDE FAMILLE.


    Capture d’écran 2020-09-18 à 16.14.46.png
    Si vous croisez David Joy, vous découvrirez un grand gaillard assez costaud à la barbe rousse broussailleuse, au regard doux avec une éternelle casquette vissée sur la tête. Une allure impressionnante d’homme des bois, issu des Appalaches dans le comté de Jackson où il semble vivre depuis toujours. Que l’on ne se méprenne pas sur cette apparence, car David Joy n’a rien d’un bouseux ignare et peut vous pondre un essai pertinent dans le New-York Times au sujet de la culture des armes en Amérique, lui qui en possède toute une collection et avec lesquelles il pose pour les journaux. Il faut dire que l’homme est issu d’un cursus universitaire en Caroline du Nord et a eu comme professeur de littérature Ron Rash qui l’a encouragé dans sa démarche d’écriture au terme de laquelle on a tout d’abord découvert Là Où Se Perdent Les Lumières (Sonatine 2016) et Le Poids Du Monde (Sonatine 2018) deux romans très sombres évoquant l’univers de marginaux ayant une forte propension à consommer alcool et méthamphétamine. Au-delà de cet univers, les ouvrages de David Joy ont la particularité de se dérouler dans la région où il séjourne, car l’auteur explique qu’il ne sait écrire que sur ce qui l’entoure. Mais il faut bien admettre qu’en plus d’observer son entourage, le romancier à cette capacité singulière à restituer avec le mot juste tous les aspects géographiques mais également sociaux du comté de Jackson, ceci avec une pincée de poésie, qui en font des textes uniques. Même s’il s’éloigne du monde de la marginalité, Ce Lien Entre Nous, se focalisent donc une nouvelle fois sur les petites gens du comté qui deviennent ainsi la source d’inspiration principale de David Joy.

     

    Darl Moody se moque bien des périodes autorisées pour la chasse. Pour lui une seule chose compte : remplir son congélateur de viande afin de faire face à la période hivernal où le travail commence à manquer dans cette région de la Caroline du Nord. Ainsi Darl Moody ne chasse pas ce grand cerf qui rôde sur la propriété du vieux Coward, uniquement pour le plaisir, mais bien pour économiser sur le prix de la viande qu’il devrait acheter au supermarché afin de nourrir ses proches. Mais en fin de journée, alors qu’il est à l’affut, il tue accidentellement un homme qu’il identifie rapidement. Il s’agit de Carol Brewer dont le grand frère Dwayne est connu dans toute la région pour sa violence et sa cruauté. Darl se tourne donc vers Calvin Hooper qui accepte de l’aider à dissimuler le corps. Mais malgré toutes les précautions prises, Dwayne découvre rapidement ce qu’il est advenu de son petit frère. Et sa vengeance sera dévastatrice.

     

    On s’éloigne donc de la marginalité avec Ce Lien Entre Nous dont le titre fait référence à cette solidarité qui unit des hommes et des femmes ordinaires, mais de conditions modeste, vivant dans le comté de Jackson où la nature fait également fonction de garde-manger pour ces habitants qui peinent à joindre les deux bouts. La particularité du récit réside dans le fait qu’il n’y pas vraiment de héros ou de personnages vertueux à l’instar de Darl Moody et de Calvin Hooper qui brillent par leur lâcheté à un point tel que l’on est obligé de ressentir une certaine empathie à l’égard Dwayne Brewer dont la raison se disloque à la mort de son frère qu’il doit venger. Bien évidemment, il y a la fureur décuplée de ce personnage hors norme ravagé par le chagrin qui remet continuellement en question le bienfondé de sa démarche, ceci d’autant plus qu’il écarte police et justice pour lesquels il estime n’avoir aucun compte à rendre. On se retrouve donc face à un personnage exceptionnel animé par toute une nuée de sentiments dévastateurs qu’il entretient avec le souvenir de son petit frère dont il observe la carcasse qui se décompose. Entre les réminiscences d’un passé qu’il ressasse et les actions terribles qu’il entame pour punir les responsables de la mort de son frère, le récit oscille entre des période contemplatives assez touchantes, imprégnée d’une certaine forme de mélancolie et de terribles confrontations qui vont faire frémir le lecteur, ceci d’autant plus que l’on ne sait quelle direction il va prendre avec la disparition assez abrupte de certains protagonistes. Pour revenir aux personnages de Darl Moody et de Calvin Hooper, c'est l'occasion d'observer ces hommes du terroir et leur entourage qui tentent de survivre dans une région où les perspectives économiques sont sur le déclin et où l'on se débrouille comme on peut pour subvenir à ses besoins en comptant sur l'aide de l'autre pour faire face aux difficultés. Et au-delà de cette lâcheté dont il font preuve avec la mort de Carol Brewer qu'ils tentent de dissimuler on devine cette volonté de survivre non pas égoïstement mais pour protéger leurs proches qui ont besoin d'eux à l'exemple de la soeur de Darl Moody dont le mari a perdu son emploi suite à des problèmes de santé.

     

    C'est ainsi que l'air de rien, au travers d'un roman noir exceptionnel, David Joy dépeint, avec cette justesse remarquable qui le caractérise, cette Amérique de la marge qu'il côtoie quotidiennement et qui font de Ce Lien Entre Nous, un récit marquant dont l'impact nous fera encore frémir une fois la dernière page tournée. Vertigineux.

     

     

    David Joy : Ce Lien Entre Nous (The Line That Held Us). Editions Sonatine 2020. Traduit de l’anglais (Etats-Unis) par Fabrice Pointeau.

     

    A lire en écoutant : Sideways de Citizen Cope. Album : The Clarence Greenwood Recording. 2004 Arista Records, Inc.

  • David Vann : Dernier Jour Sur Terre. La spirale infernale du tueur Amok.

    Capture d’écran 2014-11-04 à 00.34.57.pngDans le domaine littéraire et particulièrement en ce qui concerne le thriller, le personnage de tueur de masse que l’on nomme couramment Amok (1) dans le jargon policier, s’inscrit bien souvent, voire systématiquement, dans une trame narrative de manipulation ou de complot comme pour mieux justifier la monstruosité de ces tueries. Mais finalement, ces romanciers ne reflètent que l’incompréhension d’une société qui n’est pas en mesure d’expliquer les raisons qui poussent ces hommes, souvent très jeunes, à commettre un crime d’une telle abjection.

     

    Avec Dernier Jour Sur Terre, David Vann s’emploie à retracer le parcours d’un de ces jeunes hommes tout en mettant en perspective les affres de sa propre enfance. Il s’agit donc d’un récit qui évite toutefois tous les travers du sensationnalisme et la froideur d’un texte uniquement basé sur des faits cliniques.

     

    C’est le 14 février 2008 que Steve Kazmierczak, équipé d’un fusil et de trois pistolets automatiques, pénètre dans l’un des auditoriums de son université pour abattre cinq personnes et en blesser dix-huit avant de se donner la mort. Il avait 27 ans et était considéré comme un étudiant brillant. David Vann, lui, avait 13 ans lorsqu’il reçut en héritage les armes de son père qui venait de mettre fin à ses jours avec l’une d’entre elles. Deux trajectoires aux débuts similaires mais qui diffèrent ensuite totalement puisque l’un deviendra l’auteur d’un terrible massacre tandis que le second deviendra un romancier reconnu.

     

    Plus qu'un récit, Dernier Jour Sur Terre est un essai où David Vann relate les évènements de sa jeunesse qui auraient pu le conduire à commettre un acte similaire à celui de Steve Kazmierczak. C'est cette mise en abîme qui donne au livre une tonalité beaucoup moins froide que ce type d'ouvrage peut susciter avec une longue litanie de chiffres et de faits énumérés dans un soucis de précision qui, paradoxalement,  ne facilite pas forcément la lecture. Il n'en demeure pas moins que les souvenirs qu'évoque l'auteur font froid dans le dos, particulièrement lorsqu'il décrit ses pérégrinations dans le quartier avec l'un des fusils de son père qu'il utilise pour tirer sur des lampadaires ou pour observer ses voisins dans le viseur de la lunette de précision montée sur son arme.

     

    Pourtant on ne saurait résumer le phénomène à un simple problème de libre circulation des armes, même si cette liberté inscrite dans la constitution suscite débats et  inquiétudes que les pouvoirs politiques occultent complètement  à l'instar de ces candidats  démocrates et républicains qui n’hésitent pas à se mettre en scène avec des armes à feu lors de leurs campagnes publicitaires pour les diverses échéances électorales.

     

    Pour comprendre le parcours tragique de Steve Kazmierczak, Dernier Jour Sur Terre dresse le portrait féroce d’une Amérique en proie à une paranoïa qui ne cesse de grandir et où la démission parentale côtoie l’indigence médicale et sociale d’un pays qui a fait de la violence une icône cinématographique qui ne semble connaître aucune limite. Un cocktail détonnant qui façonne ces esprits perturbés jusqu’à ce qu’ils décompensent brutalement. Avec le témoignage des proches, l’auteur s’emploie donc à défaire le mythe qui consiste à faire passer soudainement ces individus pour des monstres, une explication simpliste qui permet ainsi de ne pas remettre en question les tares sociétales de rejet qui les façonnent pourtant petit à petit jusqu’à un dramatique point de non retour.

     

    Même s’il évoque d’autres tueries comme celles de Virginia Tech et de Columbine, on pourra reprocher à David Vann d’être peut-être trop prompt à fustiger les travers observés dans son propre pays donnant l’impression erronée que ces actes se dérouleraient exclusivement sur le territoire des USA ce qui est loin d’être exact puisque des cas similaires se sont produits dans d’autres parties du monde, notamment en Europe.

     

    En dépit de l’absence d’un contexte historique évoquant les débuts du phénomène que l’on observait déjà à la fin du 18ème siècle, Dernier Jour Sur Terre n’en demeure pas moins l’un des ouvrages les plus exhaustifs traitant du sujet des tueries de masse sans pour autant sombrer dans un sensationnalisme sordide que bon nombre de médias ne peuvent s’empêcher d’adopter afin de capter l’attention de leur public.

     

     

     

    (1) Amok provient du mot malais amuk, désignant des personnes atteintes d’une rage incontrôlable.

     

    David Vann : Dernier Jour Sur Terre. Editions Gallmeister 2014. Traduit de l’anglais (USA) par Laura Derajinski.

     

    A lire en écoutant : Mad World de Gary Jules & Michael Andrew. Album : BO Donny Darko. Enjoy/Everloving 2002.

  • Thierry Chavant/David Chauvel/Olivier Le Bellec : 22 (Une enquête explosive). Lumière sur police-secours.


    22 une enquête explosive, delcourt, david chauvel, thierry chassant, olivier le belles, BRB, police-secours Les immersions dans le cadre de police-secours sont bien trop rares pour être passées sous silence surtout lorsqu’elles sont contées par un flic de la BRB, Olivier le Bellec qui a débuté comme policier en uniforme. A l’heure où l’on a confronté deux métiers soi-disant différents (Police judicaire – gendarmerie) dans le cadre du débat concernant l’école de police unique à Genève, j’aime assez le point de vue que nous livre ce collègue français dans le postface de ce premier opus :

     

    « Voilà quatorze ans, lorsque j’intégrai l’Ecole de police, je ne connaissais rien à la police. Uniquement ce que je voyais à la télé et dans les journaux, autant dire pas grand-chose. J’ai commencé ma carrière comme « bleu », gardien de la paix en uniforme, affecté au sein d’une brigade de nuit dans le 93. Faut reconnaître que ce n’était pas ce dont je rêvais à la base !

    Moi je voulais être policier en civil comme les héros télévisée de ma jeunesse, Belmondo, Starsky et Hutch …  Je me suis néanmoins investi pleinement dans mon boulot et j’ai rapidement découvert l’ordinaire du flic de police secours, de nuit : les violences conjugales, les mecs bourrés, les effets de la pleine lune, les accidents de la circulation, les violences sexuelles, les premiers morts …

    Avant d’intégrer la boîte je n’avais jamais été confronté à la mort et je l’ai prise dans la gueule sous toutes ses formes : la simple mort naturelle, le suicide, l’overdose, le meurtre … Mais j’ai aussi découvert mon goût pour le « flag », l’interpellation de « casseurs », de voleurs de voitures, de braqueurs …

     

    L’expérience acquise chez les « bleus » me sert désormais dans mon travail à la prestigieuse Brigade de répression du banditisme. Cette dernière m’a permis de découvrir un autre aspect de la police. « Bleu » je devais être vu. Flic à la BRB, je devais désormais apprendre à ne plus l’être, à filocher, à appréhender un minimum la procédure et les écoutes, et à travailler avec les « tontons ». Aujourd’hui je considère que la police est une grande maison aux pièces multiples. Il y en a plein que je n’ai pas encore découvertes et d’autres que je connais bien ou pour partie. J’aimerais vous en faire découvrir certaines Vous ne saurez jamais quelle part de ces histoires est réelle ou fictive, mais elles sentiront toujours la sueur, le sang, le vécu… Tout ce qui fait de moi et de mes collègues des flics. »

     

    22 une enquête explosive, delcourt, david chauvel, thierry chassant, olivier le belles, BRB, police-secours

    Avec 22 vous allez faire la connaissance d’Inès, jeune femme gardien de la paix, qui patrouille avec ses deux collègues dans les rues de Paris. Le trio est interpellé par une jeune femme qui leur fait part de son agression. S’ensuit une poursuite épique dans le métro tandis que dans un autre quartier de la Ville Lumière, deux braqueurs s’en prennent à la vitrine d’une bijouterie qu’ils font exploser pour s’emparer des bijoux avant de s’enfuir à moto. Yves, jeune flic de la BRB, dépêché sur les lieux, parviendra-t-il à appréhender ces deux malfaiteurs ? Nous découvrirons la finalité de ces trois trajectoires dans le second opus encore à paraître.

     

    On reconnaît tout de suite dans les scènes d’actions (magnifiquement mises en scène par Chavant), les actes d’enquêtes et le langage des protagonistes, l’influence du flic de terrain qui nous livre quelques éléments de ses années d’expérience. Mais c’est peut-être au travers du regard d'Inès que l’on retrouve probablement le plus de réminiscences liées au début de carrière de ce policier qui ose évoquer les récurrents problèmes de sexisme que l’on retrouve dans tous les corps de police car de nos jours encore, être policière tient de la gageure.

     

    Un scénario brillamment construit qui pourra paraître singulier au niveau de la temporalité avec l'intervention d'Inès qui se déroule sur une journée alors que l'enquête d'Yves semble se dérouler sur plusieurs semaines pouvant amener une certaine confusion qui trouvera peut-être sa finalité dans le second tome que l'on attend avec impatience.

     

    De police-secours à la BRB en passant par l'élaboration de scénarios, Olivier Le Bellec applique un des préceptes essentiels pour durer dans ce métier si intense qui a brisé tant de collègues qui peinent parfois à comprendre que le salut réside aussi dans la possibilité de changement en explorant les multiples pièces de la grande maison. 

     

    Dessin : Thierry Chavant  - Scénario : David Chauvel/Olivier Le Bellec : 22 (Une Enquête Explosive). Editions Delcourt 2014.

     

    A lire en écoutant : Brain Stew de Green Day. Album : Insomniac. Reprise 1995.

  • DAVID L. CARLSON & LANDIS BLAIR : L'ACCIDENT DE CHASSE. REDEMPTION.

    l'accident de chasse, editions sonatine, David L. Carlson, Landis BlairA ma connaissance les éditions Sonatine n'ont jamais publié de bandes dessinées, la maison étant davantage connue pour ses ouvrages ayant trait aux thrillers et aux romans noirs à l'instar de David Joy que je vous recommande. Pourtant on peut bien imaginer qu'à la découverte d'un album somptueux tel que L'Accident De Chasse dans sa version originale les éditeurs n'aient pas longtemps hésité à se lancer dans la traduction et la publication de la version française de ce qui apparaît comme l'un des plus beau roman graphique qui clôturera cette année 2020. Roman graphique ? Le mot a souvent été galvaudé pour enrober quelques bandes dessinées d'une certaine élégance marketing ou quelques adaptations de romans classiques. En ce qui concerne L'Accident de Chasse on entre pourtant bien dans le cadre de la définition de ce que peut être un roman graphique où le texte conséquent se marie parfaitement à la grâce du dessin de Landis Blair qui anime cette intrigue tirée d'une histoire vraie que Charlie Rizzo, personnage central de l'intrigue, a raconté à son ami, le scénariste David L. Carlson. Il en résulte un ouvrage improbable de plus de 400 pages sur l'univers carcéral et la rédemption par le biais de l'amitié et de la littérature.

     

    A Chicago en 1959, Charlie Rizzo a toujours cru que son père Matt était devenu aveugle suite à un terrible accident de chasse, comme il l'a toujours prétendu. Pourtant lorsque Charlie tombe dans la délinquance, son père lui dévoile la vérité en lui révélant qu'il a perdu la vue lors d'un braquage qui a mal tourné et qui l'a conduit en prison pour y purger une peine de cinq ans. En détention, Matt partage sa cellule avec Nathan Leopold détenu célèbre pour avoir défrayé la chronique des faits divers lorsqu'il a assassiné, avec son complice Richard Loeb, une jeune garçon de 14 ans afin de démontrer qu'il était possible de commettre une crime parfait. Au comble du désespoir, le jeune détenu aveugle souhaite mettre fin à ses jours. Mais avec l'aide Nathan, Matt va connaître le pouvoir sans limite de la littérature qui va lui permettre de s'évader de cet univers carcéral sans pitié.

     

    Il s'agissait pour David L. Carlson de mettre en scène une histoire d'autant plus extraordinaire qu'elle est tirée d'un ensemble de récits véridiques à l'instar de cet horrible fait divers où deux jeunes hommes de bonne famille, Nathan Leopold et Richard Loeb ont décidé de mettre à exécution leur théorie du meurtre parfait, alors qu'ils avaient à peine vingt ans, en enlevant un enfant et en l'assassinant froidement. Un meurtre qui a bouleversé la population de Chicago, ceci d'autant plus que les deux jeunes criminels ont été condamné à la prison à vie en évitant la peine capitale par pendaison qui se pratiquait au début des années 1900. Mais pour David L. Carlson il importait, avant tout, de mettre en avant la relation père-fils qu'entretiennent Matt et Charlie en choisissant l'angle de la révélation d'un secret familial pour mettre en scène ce fabuleux récit tournant autour des regrets et de l'infini pouvoir de rédemption qu'offre la littérature. C'est donc autour de ce mensonge de L'Accident De Chasse et de la vérité que Matt va dévoiler peu à peu à son fils que l'on découvre la manière dont il s'est construit avec l'aide de Nathan Leopold en faisant connaissance avec les grands classiques de la littérature dont les récits de Dante qui vont repousser les murs d'un univers carcéral oppressant. Au fil de ces révélations on revient régulièrement auprès de Charlie et de Matt pour prendre la pleine mesure de l'émotion qui s'installe entre ces deux individus qui apprennent à se connaître avec un fils qui découvre le parcours d'un père qu'il déconsidérait. Ainsi, sur ces deux trames parallèles, on observe de cette manière les liens qui vont unir un fils à son père au rythme des révélations de ce dernier mais surtout l'amitié qui se forge au rythme des années de prison entre Matt et Leopold qui apprend à lire en braille afin de transmettre son savoir au jeune aveugle désespéré. 
     
    Mais la densité du récit prend une toute autre ampleur avec les illustrations de Landis Blair qui se charge de mettre en image avec une virtuosité déconcertante et une inventivité peu communes les passions qui animent Matt et Leopold ainsi que l'oppression de l'univers carcéral qui les entoure tout comme le désespoir de Matt lorsqu'il devient aveugle. Le dessinateur restitue la noirceur du récit, mais également l'espoir habitant les deux prisonniers sur une déclinaison d'image en noir et blanc qui passent par toutes les nuances de gris au gré d'une technique de hachure rarement aussi bien maîtrisée qui souligne les heures de travail qu'il a fallut pour arriver au bout de cette oeuvre à la fois bouleversante et passionnante. On appréciera particulièrement les dessins illustrant l'oeuvre de Dante ainsi que la partition d'une suite de Bach qui résonne sur les murs de la prison au rythme des craquement du disque vinyle. Bref on ne se lasse pas, une fois l'ouvrage terminé, de revenir pour feuilleter les pages en s'attardant plus que de raison, sur quelques illustrations sublimes qui soulignent la beauté d'une histoire extraordinaire.

     

    Roman graphique somptueux, L'Accident De Chasse vous donne, à n'en pas douter, l'idée de ce que peut être un chef-d'oeuvre qui clôturera en beauté cette année 2020 si particulière.

     

     

    David L. Carlson & Landis Blair : L'Accident De Chasse (The Hunting Accident). Editions Sonatine 2020. Traduit de l'anglais (Etats-Unis) par Julie Sibony.

     

    A lire en écoutant : Suite n° 1 en Sol Majeur, BMW 1007 de Jean-Sebastien Bach interprétée par Christian-Pierre La Marca. Album : Bach : Suites pour violoncelle. Christian-Pierre La Marca. 2013 SME France.

  • James Ellroy/David Fincher – Matz/Miles Hyman : Le Dahlia Noir.

    Capture d’écran 2013-11-15 à 16.36.31.pngLe corps coupé en deux, sauvagement mutilé, c’est le 15 janvier 1947, sur un terrain vague de Los Angeles, qu’a échoué le rêve d’actrice d’Elizabeth Short. Elle avait 22 ans et ne savait pas qu’elle deviendrait, 40 ans plus tard, le personnage emblématique du Dahlia Noir de James Ellroy.

     

    Après le succès de la trilogie Llyod Hopkins, c’est en 1987 que François Guérif directeur des éditions Rivages publie ce qui allait devenir l’un des livres le plus emblématique du roman noir et du polar tout à la fois. Le style syncopé, marque de fabrique de James Ellroy n’était pas encore présent, mais la sauvagerie du texte et l’outrance meurtrière des scènes éclaboussait déjà les lecteurs. Un livre taillé avec ses tripes et dont la folie rageuse déborde au détour de chaque page voilà comment l’on pourrait décrire le Dahlia Noir, œuvre majeure de James Ellroy.

     

    C’est probablement la démesure et la folie de cet auteur, impossible à restituer au cinéma, qui ont fait que les adaptations de ses ouvrages se sont soldées par des échecs, hormis L.A. CONFIDENTIAL de Curtis Hanson que l’on peut juger passable même si le perfide Dudley Smith campé par James Cromwell paraissait extrêmement fade. Pour LE DAHLIA NOIR de Brian de Palma, passez sans autre votre chemin car vous ne retrouverez pas cette chaleur étouffante d’une ville démoniaque qui se pare de lumière pour éblouir vos rêves. Tout y est édulcoré à un point tel que l’ensemble en devient insipide.

     

    Capture d’écran 2013-11-15 à 15.23.29.pngPour vous approcher de ce qui aurait pu être une bonne adaptation, il vaut mieux revoir SANGLANTES CONFESSIONS de Ulu Grossbard avec Robert de Niro et Robert Duvall tiré d’un roman de John Gregory Dunne, Sanglantes Confidences parut en 1976 dans la collection Série Noire et réédité par les Humanoïdes Associés en 1980. Un ouvrage solide que l’on ne dénichera désormais plus que chez un bon bouquiniste. Avant l’arrivé de l’opus de James Ellroy on trouvait déjà dans ce roman l’atmosphère délétère d’un Los Angeles gangréné par la corruption avec en toile de fond le meurtre d’Elizabeth Short.

     

    C’est en bande dessinée que l’on pourra désormais redécouvrir le Dahlia Noir de James Ellroy. Cela fait déjà quelques années que François Guérif dirige en collaboration avec Casterman une collection de polars adaptés en format BD. L’adaptation du Dahlia Noir a été effectuée par Matz en collaboration avec David Fincher et le moins que l’on puisse dire c’est qu’ils ont fait un excellent travail de découpage. Vous retrouverez la totalité de l’intrigue et les dialogues ciselés du maître. Mais c’est du côté du dessin que l’ouvrage pêche un peu. Trop raisonnable ! Le travail de recherche et le rendu des dessins de Miles Hyman sont magnifiques mais l’ensemble manque de dynamisme et rien ne déborde du cadre. Une succession de superbes illustrations bien trop figées qui étouffent l’histoire et c’est d’autant plus dommage que l’on trouve, malgré tout, au détour des pages quelques scènes magnifiques comme l’épisode où Bleichert enquête du côté du Capture d’écran 2013-11-15 à 16.43.52.pngMexique. Malgré ces petits défauts, le plaisir de retrouver les personnages d’Ellroy est bien trop grand pour vous priver de cet achat d’autant plus qu’il existe une édition luxueuse, reliée qui est absolument somptueuse.

     

    Ellroy adapté en BD c’est aussi l’occasion pour ceux qui ne connaissent pas l’œuvre de ce grand écrivain de découvrir un univers absolument dantesque qui frise la perfection.

     

     

    James Ellroy : Le Dahlia Noir. Editions Rivages/Thriller 1988. Traduit de l’anglais (USA) par Freddy Michalski.

     

    James Ellroy/David Fincher – Matz/Miles Hyman : Le Dahlia Noir. Editions Rivages/Casterman/Noir 2013.

     

    John Gregory Dunne : Sanglantes Confidences. Editions Humanoïdes Associés 1980.

    A lire en écoutant : Aria (orchestral suite n° 3 in D minor BWV 1068). Jacques Loussier Trio. Album: Play Bach aux Champs Elysées. Universal Music Jazz France 2000.

  • Michaël Mention : Adieu Demain. Le monstre d’aujourd’hui.

    Adieu demain, rivages/noir, Yorkshire, Michael Mention, David PeaceVéritables entités maléfiques les monstres d’aujourd’hui sont désormais incarnés par les sérial killers dont l’image a été largement dévoyée avec l’apparition de personnages tels que Dexter ou Hannibal qui nous content leurs aventures au travers d’un « art délicat » qu’ils pratiqueraient pour le plus grand bien de la communauté. Effrayantes, leurs aventures « raffinées » sont pourtant à mille lieues des atrocités commises par Francis Heaulme, Guy Georges, Peter Sutcliffe et consort.

     

    Dans le domaine, ce sont des écrivains comme James Ellroy et David Peace qui sont parvenus à restituer le contexte mental et social dans lequel ont évolué leurs bourreaux respectifs au travers de récits qui font, de nos jours encore, office de référence en la matière.

     

    Avec Adieu Demain, Michaël Mention reprend le flambeau et nous retournons dans le Yorkshire, abandonné par David Peace, pour effectuer un voyage à travers le temps qui débutera en 1969 et  s’achèvera un fameux jour de septembre 2001. C’est par les regards d’un tueur naissant dans l’ombre de l’Eventeur du Yorkshire et des deux enquêteurs chargés de l’arrêter que l’auteur va égrener une actualité angoissante qui colle littéralement à la peau des principaux protagonistes du récit.

     

    20 ans après l’arrestation du fameux éventreur, la police se retrouve avec un nouveau tueur sur le bras qui transperce ses victimes féminines avec des carreaux d’arbalète. Le superintendant Mark Burstyn est chargé de l’enquête et s’adjoindra les services d’un jeune enquêteur Clarence Cooper qui va s’impliquer au delà des limites raisonnables pour se retrouver confronter à ses propres angoisses qui ne seront pas sans conséquences pour son équilibre mental.

     

    Dans Adieu Demain, il y a tout d’abord l’ombre de David Peace, auquel l’auteur rend d’ailleurs un hommage appuyé, qui plane sur le récit qui se décompose en deux parties. Vous allez découvrir dans un premier temps la jeunesse de Peter Griffith (personnage librement inspiré du tristement célébre tueur à l’arbalète, Stephen Griffiths) jusqu’à sa rencontre, avec Paul Witcliffe (inspiré de Peter Sutcliffe) interné, comme lui, dans un hôpital psychiatrique. Puis dans la seconde partie vous suivrez les pérégrinations de Mark Burstyn et de son accolyte Clarence Cooper qui vont traquer un tueur en série qui s’en prend une nouvelle fois aux femmes du Yorkshire.

     

    Il faut bien l’avouer que l’on ne pouvait pas faire autrement que de comparer le roman avec ceux de David Peace et craindre le pire ce qui est loin d’être le cas. Michaël Mention s’en tire plus qu’honorablement et nous plongeant au cœur d’un récit extrèmement prenant où l’actualité égrenée au fil des années embrasse les personnages pour en faire une espèce d’acteur à part entière qui interviendra même dans le final surprenant de ce roman. Car il faut l’admettre, Michaël Mention est un manipulateur qui sait fourvoyer ses lecteurs sans toutefois tomber dans les excès peu crédible du rebondissement à répétition. Outre l’actualité, c’est la  thématique de la peur revient tout au long de l’histoire avec les phobies des principaux suspects qui font écho aux nouvelles anxiogènes d’un monde qui semble devenu complètement hors de contrôle.

     

    Si l’écriture est assez classique c’est principalement pour son sens de la transition que l’on appréciera Adieu Demain où l’auteur passe d’un personnage à un autre autre par le prisme d’un fait divers, d’une chanson ou d’un grand fait d’actualité qui accentue le rythme trépident du roman.

     

    Adieu Demain est le second tome d’une trilogie qui a débutée avec Sale Temps Pour le Pays. Bien plus abouti que le premier opus on ne peut que se réjouir de découvrir le prochain roman d’un auteur qui va désormais compter dans le paysage sinistre des sérial killers.

     

    Michaël Mention : Adieu Demain. Editions Rivages/Noir 2014.

    A lire en écoutant : Faze Wave interprété par The Cave Singer. Album : No Witch. Jagjaguwar 2011.

     

  • MISE AU POINT 2023 : TOUJOURS PLUS LOIN.

    Capture d’écran 2023-01-06 à 22.17.08.pngComme je l'ai mentionné dans la dernière chronique de l'année 2022, le site a migré vers une autre plateforme puisque la Tribune de Genève a décidé de fermer son forum consacré aux blogs. Le blog "Mon Roman ? Noir et bien serré !" est donc désormais consultable à l'adresse suivante :


    www.monromannoiretbienserre.com

    Pour le dire franchement cette migration n'a pas été aussi aisée que cela et je regrette que les liens du blog précédent ne puissent pas rediriger le lecteur vers le blog actuel. Ce sont là les aléas de l'informatique que je maîtrise difficilement. Néanmoins, toutes les chroniques précédentes ont été rapatriées et vous retrouverez dans la colonne de droite, divers liens vous redirigeant vers ces chroniques en fonction des différents classements que ce soit par ordre alphabétique d'auteurs, par pays ou par thèmes. A quelques détails près, le blog en lui-même n'a pas changé et reste dépourvu de publicité, ce qui demeure d'ailleurs un critère essentiel pour moi. 

     


    Capture d’écran 2023-01-06 à 19.45.30.pngCapture d’écran 2023-01-06 à 19.45.10.pngPuisque j'ai évoqué les thèmes, l'année 2022 a vu l'apparition des récits avec deux ouvrages importants que sont la vie extraordinaire du Lieutenant Versiga et la corruption au sein de la police de Baltimore évoquée par Justin Fenton dans La Ville Nous Appartient qui a fait l'objet d'une adaptation pour HBO. Nul doute que je prendrai le temps d'étoffer ce thème avec d'autres récits hallucinants qui dépassent parfois la fiction. 

     

    Capture d’écran 2023-01-06 à 21.08.17.pngCapture d’écran 2023-01-06 à 21.07.33.pngMais pour en revenir aux romans noirs et aux polars, l'année 2022 a débuté sur les chapeaux de roue avec Le Carré des Indigents de Hugue Pagan qui a fait son grand retour sur la scène de la littérature noire. En Suisse, on saluera également le retour de Jean-Jacques Busino qui signe un grand roman noir avec Le Ciel Se Couvre.

     

     

     

    Capture d’écran 2023-01-06 à 21.11.44.pngCapture d’écran 2023-01-06 à 21.15.46.pngDans le registre des excellents ouvrages qu'il faut avoir lu, il faut citer Le Blues Des Phalènes de Valentine Ihmof ainsi que Le Dernier Jour Des Fauves de Jérôme Leroy et bien évidemment le roman extraordinaire de Séverine Chevalier qui nous a ébloui, une fois encore, avec Jeannette Et Le Crocodile.Capture d’écran 2023-01-06 à 21.14.02.png 

     

     

     

     

     

     

     

    Capture d’écran 2023-01-06 à 21.22.21.pngCapture d’écran 2023-01-06 à 21.24.10.pngAux Etat-Unis, il faut saluer David Joy avec Nos Vies En Flammes ainsi que l'extraordinaire roman de Richard Krawiec, Les Paralysés. Dans le registre des séries, il faut signaler des valeurs sûres comme les enquêtes du commissaire Soneri qui revient avec La Main De Dieu, tout comme les investigations de la procureure Chastity Riley officiant toujours à Hambourg dans Béton Rouge. Autre série importante que celle d'Abir Mukherjee et de son capitaine Sam Wyndham que l'on retrouve dans Avec La Permission De Gandhi.

    Capture d’écran 2023-01-06 à 21.29.58.pngCapture d’écran 2023-01-06 à 21.27.14.pngCapture d’écran 2023-01-06 à 21.30.57.png

     

     

    Capture d’écran 2023-01-06 à 21.35.42.pngCapture d’écran 2023-01-06 à 21.37.26.pngL'un des grand événements de l'année fut la clôture de la trilogie japonaise de David Peace qui nous a ébloui avec Tokyo Revisitée. Dans un registre similaire on aura également apprécié La Cour Des Mirages de Benjamin Dierstein qui achève de manière magistrale sa trilogie hallucinante sur la police parisienne.

     

     

     

    Capture d’écran 2023-01-06 à 21.41.10.pngCapture d’écran 2023-01-06 à 21.42.56.png
    Capture d’écran 2023-01-06 à 21.46.00.pngColin Niel a fait son retour avec Darwyne, un roman au lisière du fantastique se déroulant en Guyane. On a également apprécié Le Tableau Du Peintre Juif de Benoît Severac ainsi que Les Corps Solides de Joseph Incardona. De nouvelles séries prometteuses semblent avoir vu le jour avec cette année 2022 à l'instar de
    Madame Mohr A Disparu de Maryla Szymiczkowa, Le Château De Carte de Miguel Szymanski ainsi que Les Gens Des Collines de Chris Offutt.

     

    Capture d’écran 2023-01-06 à 21.47.59.pngCapture d’écran 2023-01-06 à 21.50.07.pngCapture d’écran 2023-01-06 à 21.51.15.png

     

    Capture d’écran 2023-01-06 à 21.57.25.pngCapture d’écran 2023-01-06 à 21.59.02.pngCapture d’écran 2023-01-06 à 22.23.02.pngIl faut également citer quelques pépites comme Traquenoir de Ed Lacy, Eugenia de Riku Onda, Duchess de Chris Whitaker ainsi que Et Nous, Au Bord Du Monde de Nathalie Sauvagnac. Pour conclure cette rétrospective, on signalera quelques auteurs helvétiques prometteurs comme Lucien Vuille avec son premier roman La Grande Maison ainsi que l'apparition de Nicolas Verdan au sein d'une maison d'éditions française qui a eu la bonne idée de rééditer Le Mur Grec que l'ensemble des pays francophones pourra ainsi découvrir.

    Capture d’écran 2023-01-06 à 22.01.58.pngCapture d’écran 2023-01-06 à 22.02.54.pngCapture d’écran 2023-01-06 à 23.03.44.png

     

    En guise de perspective 2023, il me faut évoquer les salons dédiés à la littérature noire comme Quai du Polar pour lequel je serai présent, tout comme Toulouse Polar du Sud. Il semble qu'en Suisse on puisse voir pour cette année le retour de Lausan'noir, même si la nouvelle n'est pas confirmée. Il me faut également découvrir le FIRN (Festival Internationale du Roman Noir à Frontignan) ainsi que le fameux Aller et Retour dans le Noir qui se déroule à Pau. Dans un domaine plus généraliste j'espère pouvoir également me rendre à Libri Mondi en Corse pour un festival somptueux qui sort résolument de l'ordinaire. J'espère vous y croiser pour entamer de belles discussions notamment sur le thème de la littérature noire

     

    Il ne me reste qu'à vous remercier pour votre fidélité et à vous souhaiter une très bonne année 2023, riche en belles découvertes littéraires.

     

    A lire en écoutant : There’d Better Be A Mirrorball de Arctic Monkeys. Album : The Car. 2022 Domino Recording Co Ltd.

  • DIX POLARS MARQUANTS !

    A l’heure des bilans de fin d’année, il est toujours de bon aloi de livrer une liste des meilleurs romans de l’année qui susciteront moult discussions stériles qui n’apporteront finalement pas grand-chose à l’édifice, particulièrement lorsque l’on constate que parmi les ouvrages sélectionnés il y a de nombreuses rééditions comme Jim Thompson ou Harry Crews. De plus, n’étant pas collé à l’actualité littéraire, je ne saurais vous livrer une liste pertinente des nombreux ouvrages qui sortent chaque année. Par contre, je me livre à ce petit exercice que l’on m’a proposé il y a de cela quelques semaines et qui consiste à lister dix livres qui vous ont marqué pour une raison ou une autre. Pour l’occasion, j’ai modifié la règle en énumérant dix polars.

     

     

    Capture d’écran 2014-01-14 à 18.26.24.png

    Lune sanglante de James Ellroy

    Editions Rivages/noir 1984

    C’est avec ce livre que j’ai découvert l’univers d’Ellroy qui n’avait pas encore acquis la notoriété qu’il a aujourd’hui. Un livre dantesque qui sortait vraiment de l’ordinaire à l’époque avec ce personnage atypique du sergent Llyod Hopkins. Un verbe cru, une ballade sanglante dans l’enfer urbain de Los Angeles. Pour moi cela restera le meilleur Ellroy car il est encore emprunt de la spontanéité d'un génie débutant.

     

     


    Capture d’écran 2014-01-14 à 19.20.47.pngDouble assassinat dans la rue Morgue de Edgard Alan Poe

    Editions de la Pleiade 1932

    Avec le Chevalier Auguste Dupin, voici le premier détective privé que j’ai découvert, bien avant le fameux Sherlock Holmes. Un personnage atypique pour une histoire qui l’est tout autant. Si Holmes se repose essentiellement sur ses facultés d’observation, Dupin lui se fie à son esprit d’analyse pour résoudre ses enquêtes. Ambiance sombre et étrange au cœur de Paris.

     

     

     

    Capture d’écran 2014-01-14 à 18.34.18.pngTokyo année zéro de David Peace

    Editions Rivages/noir 2010

    Après sa tétralogie se déroulant dans sa région natale du Yorkshire, David Peace quitte l’Angleterre pour le Japon. Premier roman d’une trilogie annoncée, Tokyo année zéro confine au chef-d’œuvre avec la chronique de ce fait divers sordide se déroulant au lendemain de la capitulation d’un pays dévasté par la guerre. La folie et le génie au détour de chaque phrase.

     

     

     

     

    Capture d’écran 2014-01-14 à 18.35.27.pngRoseanna de Per Wahlöö et Maj Sojwall

    Editions Rivages/noir 2008

    Bien avant la déferlante de polars nordiques voici le premier opus du Roman d’un Crime. Une splendide déconstruction du modèle social de la Suède par l’entremise de l’inspecteur Martin Beck et de son équipe. Pour mieux vous en parler, voici une chronique du Vent Sombre qui résume parfaitement l’esprit de cette solide série de chefs-d’œuvre.

     

     

     

     

    Capture d’écran 2014-01-14 à 18.36.55.pngNon ce  pays n’est pas pour le vieil homme de Cormac MacCarthy

    Editions de l'Olivier 2006

    Une belle écriture aussi sèche que le désert qui sert de décor à cette histoire âpre et violente ponctuée des très belles réflexions de ce shérif qui ne comprend plus le monde qui l’entoure. Souvent imité jamais égalé.

     

     

     

     

     

    Capture d’écran 2014-01-14 à 18.38.28.pngLe nom de la rose d’Umberto Eco

    Editions Grasset 1990

    Après la lecture de ce roman vous laisserez tomber la kyrielle de polars soi-disant historiques. Aucun ne lui arrive à la cheville et ce n’est pas les romans de Dan Brown, fort distrayant au demeurant qui changeront la donne. Sur le fond d'un Moyen Age troublé, vous allez découvrir l’enquête épique du moine franciscain Guillaume de Baskerville.

     

     

     

     

    Capture d’écran 2014-01-14 à 18.40.16.pngLa dame du lac de Raymond Chandler

    Editions Roman Noir 1972

    Comme pour Ellroy, beaucoup me diront que ce n’est pas le meilleur roman de Chandler. Je l’apprécie énormément pour son atmosphère qui se déroule en dehors de la cité des anges. C’est avec cet ouvrage que j’ai découvert « l’école » Black Mask.

     

     

     

     

     

    Capture d’écran 2014-01-14 à 18.41.52.pngPike de Benjamin Whitmer

    Editions Gallmeister 2012

    Roman récent (2012) au style percutant. C’est un coup de cœur. Un plaisir de suivre ce malfrat vieillissant qui ne cherche même pas la rédemption dans cette ville déclinante des USA. Un récit brut, sans fioriture.

     

     

     

     

    Capture d’écran 2014-01-14 à 18.43.15.pngGriffu de Tardi & Manchette

    Editions Le Square 1978

    J’avais lu cette bd l’année de sa parution, en 1978, dans une revue dont j’ai oublié le nom. La rencontre d’un grand romancier du néo polar et d’une star de la BD pour une collaboration unique qui a donné cette histoire novatrice pour l’époque. Le trait sombre de Tardi au service de la noirceur de l’univers de Manchette : La fusion de deux talents.

     

     

     

    Parc Gorki de Martin Cruz SmithCapture d’écran 2014-01-14 à 18.45.18.png

    Editions Robert Laffont 1981

    Lorsque ce roman est paru en 1981, le mur était bien présent et je ne connaissais rien de l’URSS hormis ce qui m'en était conté dans les romans de Soljénitsyne. Au niveau du polar c’était le néant absolu jusqu’à l’apparition d’Arkady Renko, inspecteur de la milice soviétique. Outre le contexte, l’originalité de ce roman réside dans le mobile qui pousse le meurtrier à assassiner trois personnes dans un parc public.

     

     

     

    Une liste effectuée en dix minutes qui ne saurait être exhaustive. Je vous laisse le plaisir de vous livrer à cet exercice qui vous entrainera dans la résurgence de vos souvenirs que vous pourrez déposer, si le coeur vous en dit, dans vos commentaires.

     

    Meilleurs voeux pour l'année 2014 !

     

    A lire en écoutant : La mémoire et la mer de Léo Ferré. Album : Amour et Anarchie. Barclay-Universal 1970.

  • LES POLARS DU SIECLE !


    Capture d’écran 2015-04-19 à 12.00.56.pngLes dix meilleurs polars de tous les temps. Rien que ça ! Avec ce titre ambitieux pour une démarche qui l’est tout autant, on peut se féliciter de l’initiative du Matin Dimanche qui consacre 4 pages aux polars. Si cet hebdomadaire dominical pouvait consacrer ne serait-ce qu’une page  dans ses parutions futures ce seraient encore mieux.

     

    Partenaire de la Scène de Crime, dans le cadre du salon du livre à Genève, le Matin Dimanche a réuni un jury international, dont chaque membre (journalistes, chroniqueurs, écrivains, bloggeurs et éditeurs) a établi une liste des dix polars impérissables. C’est la fusion de ces listes qui a permis à la rédaction d’établir le palmarès final. Que l’on ne s’y trompe pas, l’exercice ne peut susciter que frustrations, discussions, voire même confrontations. C’est d’ailleurs le seul intérêt que l’on peut trouver à ces classements. Pour ma part, je déplore que David Peace n’y figure pas.

     

    Le classement :

    1. Moisson Rouge de Dashiell Hammet
    2. Mr Ripley de Patricia Highsmith
    3. Le Dahlia Noir de James Ellroy
    4. The Long Goodbye Raymond Chandler 
    5. L'assassin qui est en moi de Jim Thompson
    6. J'étais Dora Suarez de Robin Cook
    7. Le Grand Nulle Part de James Ellroy 
    8. Le Grand Sommeil de Raymond Chandler 
    9. La Position du Tireur Couché de Jean-Patrick Manchette
    10. L'Inconnu du Nord Express de Patricia Highsmith
    11. L.A. Confidential de James Ellroy 
    12. On Achève Bien les Chevaux de Horace McCoy et Roseanna de Maj Söwall et Per Wahlöö
    13. Le Faucon Maltais de Dashiell Hammet
    14. L'Espion qui Venait du Froid de John le Carré
    15. La Femme en Blanc de William Wilkie Collins
    16. Millenium 1 - Les Hommes qui n'aimaient pas les Femmes de Stieg Larsson et Nécropolis de Herbert Lieberman
    17. Le Diable Tout le Temps de James Ray Pollock
    18. L'Analphabète de Ruth Rendell

     

    Avec un jury international, ce sont les romans des USA et de la Grande Bretagne qui trustent ce palmarès avec 9 ouvrages en tête où l’on découvre des grands auteurs classiques comme Dashiell Hammet, Raymond Chandler et Patricia Highsmith. Dans ce listing figure également James Ellroy, Jim Thompson et Robin Cook. Bref, rien de très vraiment surprenant, hormis le fait que Manchette figure en 9ème place avec La Position  du Tireur Couché. Roseanna de Sjowall et Wahloo est classé en 12ème position.

     

    Une page est consacrée à une interview de François Guérif. Toujours aussi pertinent, le directeur de la collection Rivages/Noir nous livre sa vision des romans dit « ethniques » et la formule pour faire un bon roman policier.

     

    Finalement l’intérêt de ce supplément spécial réside dans le choix du roman que chaque membre du jury  recommanderait à ses amis. Il y a bien évidemment des classiques, mais on y trouve également un florilège de polars beaucoup moins convenus qui peuvent susciter un certain intérêt. Parmi tous ces « hors séries » consacrés aux polars, c’est peut-être cet article qui permettra aux lecteurs chevronnés du genre, de découvrir quelques nouvelles pépites.

     

    A lire en écoutant : All or Nothing At All de John Coltrane. Album Ballads. Impulse 1961.