FESTIVAL : QUAIS DU POLAR 2025. ON EN REDEMANDE !
Que n'écrit-on pas sur le festival Quais du Polar et son aura prestigieuse rayonnant sur le milieu de la littérature noire qui attire un public de plus en plus nombreux aguiché par cette affiche éclectique d'auteurs qui rassemblent tous les genres, du roman noir au cosy mystery en passant par le fameux thriller sanglant qui régale les lecteurs en quête de sensation ou le true crime prenant un essor grandissant.
Dans un cadre somptueux, le festival prend une allure cannoise où l'on rencontre tous les représentants de la chaîne du livre dans un climat fébrile où les auteurs deviennent de véritables stars tandis qu'une foule grandissante se presse pour les dédicaces convoitées ou pour investir les salles où se déroulent des tables rondes de haute tenue.
Il faut donc saluer le staff ainsi que la horde de bénévoles souriants qui font en sorte d'assurer des prestations d'une qualité exceptionnelle afin que ce grand rassemblement dédié au polar se déroule de la meilleure des manières, sous le regard pétillant de l'infatigable Olivia Castillon qui a toujours un mot aimable, en dépit de la pression et des nombreuses sollicitations auxquelles elle doit faire face.
On y croise des auteurs comme Michèle Pedinielli et Valério Varesi qui ont eu la bonne idée d'écrire un roman à quatre mains, Les Contrebandiers, publié par les éditions Points à l'occasion du festival. On retrouve également Jérôme Leroy qui revient avec un nouveau récit noir, La Petite Fasciste, qui intègre La Manuf, une nouvelle collection de La Manufacture de Livres dirigée par l'élégant Pierre Fourniaud affichant une certaine satisfaction après avoir écouté l'émission Le Masque et La Plume où l'on encensait La Théorie de la Disparition de Séverine Chevalier qui n'était d'ailleurs pas présente au festival, ce que l'on peut regretter.
Mais il y avait tant d'auteurs que l'on a pu apercevoir comme Fabrice Tassel, Marto Pariente, Sebastien Gendron, Marin Ledun, Jacky Schwartzmann, Frédéric Paulin, Benjamin Dierstein ainsi que l'extraordinaire autrice québécoise Roxanne Bouchard qui tous ne chômaient pas au stand des dédicaces en contribuant à cet excédent de bagage pesant et à cette surchauffe de la carte de crédit.
La Suisse était bien représentée avec Joseph Incardona et Nicolas Verdan accompagné de Caroline de Benedetti et Emeric Cloche de Fondu Au Noir, tandis que James Ellroy, fidèle à son statut de star du polar made in USA aboyait dans les travées et fustigeait les auditeurs ayant l'outrecuidance de quitter la salle d'une table ronde dédiée à sa personne en nous régalant de ses excès provocateurs, sous le regard impassible de Thierry Corvoisier qui accompagnait également Duane Swierczynski pour les éditions Rivages.
Mais dans un autre registre, il fallait écouter Attica Locke, très en verve lorsqu'il s'agissait d'évoquer les affres de l'administration Trump et qui en dépeint certains aspects dans son nouveau roman, Il Est Long Le Chemin Du Retour, clôturant la trilogie mettant en scène Darren Mathews, Texas Ranger afro-américain.
Durant ces trois jours, il est difficile de faire la liste de toutes les personnes que l'on a rencontré, mais il y a le noyau dur, les amis que l'on retrouve avec un certain plaisir comme Sebastien Wespiser, Yan Lespoux, Mohamed Benabed, Christophe Laurent, Laure Manceau et Muriel Poletti parvenant à se faire prendre en photo avec un James Ellroy venant de signer son 600ème ouvrage.
Bref autant dire que l'on ressort de là complètement lessivé, mais comblé de bonheur avec de nouvelles rencontres comme Lionel Destremau (que je ne confondrai plus avec Gwenaël Bulteau, promis) ou l'excellent chroniqueur Jean-Marc Deverre que je vois enfin dans la vraie vie, tout comme le libraire grand spécialiste du polar Christophe Bourgoin.
Il va de soi que j'en oublie bien d'autres, mais que voulez-vous à mon âge la mémoire devient défaillante, même si je me souviendrai longtemps de ces magnifiques moments de la 21ème édition des Quais du Polar où l'on célébrait également les 80 ans de la Série Noire nous permettant d'acquérir quelques souvenirs comme ce savon et ce sac aux couleurs de l'iconique collection. Que vouloir de plus ? Une nouvelle édition sans aucun doute.
A lire en écoutant : Doin That Thing de Les McCan. Album : Much Less. 2005 Atlantic Recording Corp.
Joël Dicker : La Très Catastrophique Visite Du Zoo.
sensibilisation #11marsjelis où il diffuse notamment sur Instagram, un clip promotionnel mettant en scène une multitude de personnalités s'associant à cette démarche de lecture, ceci en collaboration avec sa maison d'éditions Rosie & Wolfe ce qui en dit long sur le redoutable sens du marketing de l'entrepreneur Joël Dicker à qui l'on ne saurait reprocher de marteler cette injonction de se plonger dans les livres, surtout les siens qu'il imprime à plusieurs centaines de milliers d'exemplaires. Tout juste admettra-t-on une pointe d'agacement lorsqu'il se fait donneur de leçon en expliquant "avec modestie et humilité" que l'industrie du livre a raté quelque chose qui est de fédérer les gens avec une explication assez simpliste qui caractérise d'ailleurs ses textes. Ce côté donneur de leçon on le retrouve également dans la postface de La Très Catastrophique Visite Du Zoo où Joël Dicker s'émeut de la fermeture des librairies qu'il met sur le compte de l'érosion du lectorat sans évoquer l'augmentation des charges et bien évidemment sans mentionner la concurrence des plateformes numériques et des grandes surfaces où ses ouvrages sont abondamment mis en avant par l'entremise d'Interforum, filiale d'Editis qui diffuse et distribue sa maison d'éditons. Joël Dicker semble d'ailleurs s'être résigné quant au côté immuable de la fermeture des librairies puisque sur le site de son entreprise figure désormais un lien de la grande plateforme numérique américaine nous dirigeant vers la vente en ligne de son nouveau roman, démarche qu'il se gardait bien d'effectuer auparavant. Mais on sent bien qu'avec la parution de La Très Catastrophique Visite Du Zoo, Joël Dicker est passé sur un autre registre beaucoup plus intense du marketing, ce qu'on ne saurait lui reprocher d'ailleurs. Il faut bien vendre et tant pis pour ce qui est de l'abandon des idéaux se diluant dans des injonctions paradoxales dont il n'a pas l'apanage dans le milieu de la littérature. Et tout le monde est sur le pont, en rang serré, pour mettre en exergue la démarche entrepreneuriale de l'auteur que des lecteurs et des journalistes enthousiastes défendent avec une certaine véhémence. Ainsi, pour les détracteurs qui se pencheraient sur le contenu des textes comme ça été le cas pour La Vérité Sur L'Affaire Harry Québert, Le Livre Des Baltimore ou La Disparition De Stéphanie Mailer, la cohorte de fans de Joël Dicker vous ramènera immanquablement vers un amalgame abscons où émerge des notions comme le mépris tant de l'auteur que des lecteurs, ou comme l'élitisme qui font que l'on exècre forcément tout ce qui a trait au succès en lien avec la littérature populaire qu'il ne faudrait pas lire. Joël Dicker se lâchait d'ailleurs sur le sujet en 2012 à l'occasion d'un entretien sur la RTS, en expliquant qu'avec le succès de La Vérité Sur L'Affaire Harry Québert, il intègre "le grand club de la Suisse qui gagne" tandis que ceux qui le critiquent font bien évidemment partie "du petit club de ceux qui aiment perdre.…" On appréciera. Mais à titre de contre-exemple, on citera Zep, un autre suisse qui plus est genevois, qui a su concilier succès et popularité tout en conservant cette dimension artistique imprégnée d'audace et d'originalité tout comme Manu Larcenet et Pierre Lemaître qui ne se sont pas asséchés sous la lumière artificielle du marketing. Et puis si l'on reprend l’image des brocolis chers à Joël Dicker, on pourra expliquer que si l'on n’aime pas ce légume, il ne s'agit pas d'un manque de respect à l'égard du producteur et encore moins vis à vis de celles et ceux qui en consomment et qui le dégustent avec plaisir. Chacun mange ce qu’il veut et ce qu’il lui convient. Et pour en revenir à la littérature, il faudra souligner le fait que les personnes qui jettent comme moi, un regard critique sur l'oeuvre de Joël Dicker et tout ce qui entoure ses démarches de marketing, ne sont pas forcément toutes issues d'un pseudo sérail littéraire élitiste qui conspuerait le moindre succès qui n'a d'ailleurs absolument rien à voir avec la qualité du texte. Cela se saurait.
Nicolas Feuz & Marc Voltenauer : Ultimatum.
Le Roman De Marceau Miller
Et voilà que l'on s'achemine déjà vers les quatorze ans d'existence de ce site dédié principalement à la littérature noire, même si j'ai pu parfois m'écarter du mauvais genre pour m'aventurer vers d'autres univers littéraires comme le western, le fantastique et l'anticipation. Ainsi, au terme de cette année où les chroniques ont été plus nombreuses qu'à l'accoutumée, il convient de se remémorer l'ensemble des ouvrages que j'ai pu lire durant cette période en évitant les sempiternelles classements des meilleurs romans de l'année qui n'ont pas beaucoup de sens en ce qui me concerne. Je vous ferai grâce également des bilans comptables portant sur le nombre de livres que l’on peut lire durant l'année ainsi que sur le total des pages parcourues. Il en va de même pour les statistiques du blog dont je me moque éperdument. Néanmoins, dans un souci de confort pour vos recherches, outre les classements par genre et par pays, ainsi qu'un florilège des séries emblématiques de la littérature policière, vous trouverez désormais un index plus élaboré par auteur où figurent les liens des ouvrages que j’ai eu l’occasion d'évoquer.
C'est devenu une tradition que de débuter l'année avec une publication de Rivages/Noir nous proposant
Pour cette année 2024 on a pu apprécier les retour de Marion Brunet avec
Parmi les séries policières on a retrouvé avec plaisir le capitaine Wyndham et le sergent Banerjee dans
Pour revenir en France, on a apprécié également le retour d'auteurs emblématiques du mauvais genre tels que Sébastien Gendron qui exprime, avec cette tonalité caustique qui le caractérise, tout le bien qu'il pense de la chasse avec
En mettant de côté la course aux nouveautés, je ne peux que vous recommander de lire l'oeuvre de Leonardo Sciascia dont j'ai évoqué l'intelligence rare avec
Avec Léman Noir, recueil rassemblant des nouvelles d'auteurs romands confirmés, Marius Daniel Popescu est sans doute l'un des acteurs qui a contribué à l'essor de la littérature noire en Suisse Romande. Ecrivain et poète, il est également le fondateur en 2004 du journal littéraire Le Persil, lui permettant de diffuser ses textes, mais qui devient rapidement la tribune libre des auteur novices et confirmés de la Suisse romande.
toujours pour l'auteur de
Dans ce même numéro, on appréciera Le Cortège d'Olivier Beetschen, fulgurante nouvelle évoquant l'enterrement du Général Guisan où l'événement rassemblant tout un peuple oscille subtilement entre faits historiques, souvenirs d'enfance et critique sociale d'un pays où l'on est amené, l'air de rien, à courber l'échine. Auteur d'une trilogie policière aux accents surnaturels se déclinant avec La Dame Rousse (L'âge d'Homme 2017),
Nouvelle venue au sein du journal Le Persil, on découvre également Le Chien, un récit d'Emmanuelle Robert, l'une des révélation de la littérature noire helvétique avec Malatraix (Editions Slatkine 2021) et Dormez En Peilz (Editions Slatkine 2023). La nouvelle s'articule autour d'une jeune fille composant avec la garde partagée de ses parents divorcés et qui intègre un nouveau quartier tout en soupçonnant ses voisins de maltraitance animale. A noter qu'Emmanuelle Robert sera l'une des invitées du 27ème Festival International du Roman Noir à Frontignan plus communément désigné sous l'appellation emblématique de FIRN désignant l'un des grands événements du polar en France.
Et puisque l'on parle du FIRN, vous y croiserez peut-être la silhouette massive d'Yves Ours Koskas en quête d'auteurs et de romancières à ramener dans le giron de sa maisonnette d'éditions Ours Editions qui publie des textes courts sous forme de livres fait maison, cousu-main, avec une impression en reprographie et dont les cahiers sont pliés et repliés soigneusement à la main. L'autre particularité d'Ours Editions est de privilégier les écrivains qui conservent la propriété de leur texte dès la publication, tout en obtenant la moitié du montant de la vente de leur ouvrage. Dernier point important, et non des moindres, les récits qu'Ours publie sont tous formidables et vous pouvez les découvrir sur son site
Au sein de la maison d'éditions vous trouverez Les Fatals En Concert, le récit Tête-Bêche de Stéphanie Glassey, romancière du remarquable
Avec En Campagne, sublime récit surréaliste de Séverine Chevalier, la romancière nous donne la sensation de survoler cette fameuse "ruralité" que l'on semble affectionner mais qui disparaît peu à peu, par vague, tandis que dans les rayons d'un supermarché Marie-Line et ses amies remplacent les produits des rayons par des pierres incarnant peut-être le poids de cette absurdité qui régit le monde, notre monde qui s'efface. Il y a toujours cette musique harmonieuse chez Séverine Chevalier ponctuée de ces grincements perturbant des intrigues d'une rare intensité telles que
Il baigne dans le polar depuis toujours avec des récits âpres se déroulant, pour la plupart, dans un environnement rural et qu'il publie auprès de petites maison d'éditions indépendantes comme in8, Caïrn et Caïmans pour son dernier roman Bad Run. A la lecture, de Tu M'As Bien Vu ! texte court, aussi rude que cinglant qui vous percute dès la première ligne et vous achève sur une dernière phrase à l'impact mortel, il y a cette interrogation qui flotte dans l'air : Qu'est-ce que j'attends pour lire les autres romans noirs de Jérémy Bouquin ?
Il vaut mieux en rire qu'en pleurer, ou peut-être faire les deux lorsque l'on lit les romans de Sébastien Gendron où le côté déjanté de ses intrigues ne fait que mettre en exergue l'absurdité de notre société à l'instar de Fin De Siècle (Série Noire 2022) dystopie sanglante et cruelle, de Camping Paradis (Série Noire 2022) aux allures de western rural ou de son dernier roman
Si cela ne suffit pas, vous trouverez également chez Ours Editions un texte de Michèle Pedinielli revisitant brillamment Kafka d'une manière singulière avec A L'Envers où un cafard se rend compte de bon matin, à son grand désarroi, qu'il a intégré le corps de Gregor Samsa, propriétaire de la chambre. Critique sociale par excellence, le récit vire au fait divers sanguinolent avec un ultime clin d'oeil à un autre ouvrage du romancier austro-hongrois. Comme toujours, il y a cette tonalité mordante que l'on retrouve dans l'ensemble des romans de Michèle Pedinielli, se déclinant autour des enquêtes de l'emblématique détective privée niçoise, Ghjulia Boccanera avec laquelle on fait connaissance dans 