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Jo Nesbo : Police. La fuite en avant !

Jo Nesbo, harry hole, police, serie noire, gallimardLa mondialisation et la surenchère sont les deux phénomènes qui desservent bien trop souvent le thriller qui devient un genre de plus en plus dévoyé par les impératifs commerciaux du nombre d’exemplaires vendus. On ne se préoccupe plus de la qualité de l’histoire ou de l’écriture qui devient d’ailleurs de plus en plus standardisée pour le confort du lecteur qui n’aura plus d’effort à faire pour intégrer le style particulier des auteurs. On lit le même livre … encore et encore … Bien souvent, l’auteur piégé dans la spirale du volume de tirages de son œuvre, se croit contraint d’inventer des histoires de plus en plus ahurissantes pour continuer à capter son lectorat. C’est encore pire avec le techno-thriller où certains écrivains (Thilliez – Crichton) vont même jusqu’à prétendre que leurs élucubrations sont tirées de faits réels ou d’observations scientifiques avérées.

 

J’avais soulevé cette problématique du thriller avec Kaïken de Jean-Christophe Grangé que vous retrouverez ici. Mais il est bien évidemment loin d’être le seul. L’exemple le plus dramatique on le constate avec l’œuvre de Thomas Harris qui avait tout d’abord publié l’excellent Dragon Rouge où l’on découvrait dans un rôle secondaire le fameux Dr Hannibal Lecter suivit du très convaincant Silence des Agneaux. Mais il faudra bien admettre que Hannibal et Hannibal, les Origines du mal malgré leurs records de vente se sont révélés être des livres absolument grotesques  nous révélant un Hannibal Lecter en couple avec Clarice Sterling où avoir été, dans sa jeunesse, un « gentil » serial killer. Soyons sérieux !

 

Avec Police, dernier opus de la série Harry Hole, nous sommes confrontés au même problème. Nous retrouvons notre héros bien en vie alors qu’il avait été laissé pour mort à la fin du très médiocre Fantôme qui résonne comme un artifice plus que douteux pour maintenir un lectorat en haleine. Parce que quand même, de vous à moi, on pouvait bien se douter que l’auteur n’allait pas laisser périr ainsi son personnage fétiche.

 

Un cadavre est découvert dans une forêt en bordure d’Oslo. Il s’agit d’un policier assassiné sur les lieux d’un crime qui n’a jamais été résolu. Une série de crimes similaires décimant les forces de police va contraindre Harry Hole, retiré comme enseignant à l’école de police, à reprendre du service pour traquer ce tueur mystérieux.

 

Dans ce récit, Jo Nesbo usera et abusera des artifices narratifs pour que le lecteur puisse tourner les pages en se demandant par exemple qui est le mystérieux personnage plongé dans un coma artificiel et maintenu sous surveillance policière. Mais si l’on a, tant soit peu, une étincelle de lucidité on pourra bien deviner qu’il ne s’agit pas du personnage principal tout comme l’on se doutera bien que la cérémonie finale n’est pas celle que l’auteur entend nous faire croire, ceci sur plusieurs dizaines de pages. Hormis cela, il y a cette manie abbérante qui consiste à équiper un serial killer particulièrement retord avec un matériel que l’on peinerait à faire entrer dans un semi-remorque mais que le type trimbale d’un bout à l’autre de la ville sans que cela pose le moindre problème. J’exagère un peu, mais à peine. Par contre je n’exagère pas en évoquant cet épisode plus que douteux (voir sexiste) où une inspectrice doit se triturer les seins, ceci sans contrainte, pour que le pervers qu’elle interroge lui livre des informations ! Rien que ça ! Ces mêmes informations virent à la farce en expliquant ainsi l’évasion rocambolesque d’un prisonnier qui en tue un autre et le planque durant trois jours dans une malle sans que personne dans la prison ne se rende compte de rien. Franchement !

 

Ce ne sont là que quelques exemples et la liste est loin d’être exhaustive. Je passe sur le tueur qui n'est pas celui que l'on croit mais qui reste quand même un tueur, le conflit entre le personnage principal et le chef de la police qui commandite des meurtres avec l'appui d'une conseillère administrative perverse, le flic homophobe amoureux de son chef et le final rocambolesque qui nous contraindra tout de même à nous demander si l'auteur ne nous prend pas pour des abrutis.

 

On aurait pu au moins s’attendre à une description particulièrement intéressante de l’institution policière comme le promettait le titre du roman, mais toute la thématique est galvaudée par des poncifs et des raccourcis qui frisent la caricature. Schémas simplistes, flics stéréotypés c’est tout ce que vous trouverez dans ce roman.

Il nous reste à analyser les relations qu’entretiennent Harry Hole, Rakel, (la femme qu’il aime) et Oleg, (le fils de cette dernière) qui virent à la farce.  On va nous faire croire que Harry Hole a pardonné son beau-fils d’avoir tenté de l’abattre de trois balles sans d’ailleurs que Rakel ne soit au courant. Une bonne petite cure de désintoxication pour le gamin et c’est reparti pour Oleg et Harry Hole qui s’adorent à nouveau comme si rien ne s’était passé. Un petit mariage pour conclure ce récit et on oubliera rapidement ce piètre épisode de la série. Mais tout cela n’est pas possible puisque plusieurs aspects de l’histoire restent encore en suspens et trouveront  leurs conclusions dans un prochain épisode (il faut bien entretenir la poule aux oeufs d'or) ce qui contraindra les pauvres lecteurs que nous sommes à se remémorer les divagations d’un auteur qui se révèle de plus en plus décevant au fur et à mesure de sa notoriété grandissante.

 

 

Jo Nesbo : Police. Editions Gallimard/Série Noire 2014. Traduit du norvégien par Alain Gnaedig.

A lire en écoutant : Whispering d’Alex Clare. Album : The Lateness of the Hour. Universal Island Records 2011.

 

Commentaires

  • Une critique si savante (?), ce serait mieux avec moins de fautes...

  • Une critique si savante (?), ce serait mieux avec moins de fautes...

  • Force est de constater que je ne partage pas du tout votre point de vue. J'ai trouvé ce polar remarquable, glaçant et brutal certes (surtout pour un si petit pays) mais pas si invraisemblable que votre critique le laisse imaginer.

  • Force est de constater que je ne partage pas du tout votre point de vue. J'ai trouvé ce polar remarquable, glaçant et brutal certes (surtout pour un si petit pays) mais pas si invraisemblable que votre critique le laisse imaginer.

  • D'abord la manière dont vous spoilez est vraiment irrespectueuse pour de futurs lecteurs.

    Ensuite, je vous trouve bien condescendant d'insinuer que le lecteur qui se laisserait embarquer par les astuces narratives de Jo Nesbo manquerait de lucidité ; quelle tristesse de lire via un axe aussi cynique ! Autant dénigrer tout suspense sur l'ensemble des sagas avec personnage récurrent, vu qu'on sait qu'il reviendra dans le tome suivant. Nesbo fait justement l'effort de mettre le doute jusqu'au bout, mieux que beaucoup d'auteurs. Il n'épargne pas non plus beaucoup les proches de Harry Hole, alors tout peut arriver.

    Certes, il y a un peu de surenchère dans le spectaculaire chez Nesbo (et pourquoi pas !?), pas de quoi nuire à ses qualités narratives. Quant aux incohérences relevées, ce sont des détails dans un immense canevas extrêmement bien maîtrisé. Possible de dénicher ce genre d'approximations pratiques dans n'importe quel polar, même les + grands.

    Le style est efficace, pas génial, c'est vrai, mais très honorable.
    Je passe sur l'accusation "sexiste", j'aurais l'impression de commenter un énième pseudo-dérapage pointé quotidiennement du doigt par Les Inrocks.

    Comme beaucoup de gens autour de moi, je trouve que les Harry Hole montent en puissance et Police (auquel, non, je ne demandais pas de me décrire les arcanes de l'institution policière d'Oslo, pitié !) en est un excellent cru. Je pense aussi que le réalisme primaire dans le polar n'est pas le seul à mériter ses lettres de noblesse. Du PLAISIR, énormément de plaisir, voilà ce que Police donne. Désolé que vous n'en ayez pas pris.

  • B onjour Sega (racines mauriciennes?),

    Et bien moi je partage ton point de vue: ce polar est navrant.

    Un vrai navet, et je déteste être pris pour un imbécile. Et ça fait plaisir de voir que des personnes osent encore s'exprimer franchement, dans un concert de louanges mercantiles et commerciales qui encensent ce médiocre polar, qui pour ma part me servira à allumer mon prochain feu de cheminée.

    Quand on pense à la maestria du "Bonhomme de neige", là tout est fondu et c'est bien dommage. J'avais été déçu par "Fantôme", ici c'est pire, on frôle le dégoût et surtout on s'ennuie terriblement.

    Il serait temps que Nesbø se reprenne, ou tue définitement Harry Hole, par respect pour ce personnage picaresque.

  • Merci beaucoup pour ton avis, Sega !
    J'ai beaucoup aimé les premiers romans de Jo Nesbo, donc j'ai continué la série avec beaucoup de plaisir... jusqu'à Fantôme que je viens de finir (oui, j'ai un peu de retard - je ne lis pas que ça !). Quelle déception ! Quel navet ! Il y a de toute manière une certaine lassitude (je parle pour moi !) quand il arrive tant de choses aussi invraisemblables à un seul personnage, mais si c'est bien écrit, c'est acceptable. Mais comme ce n'est pas le cas dans Fantôme où l'on touche presque le fonds, je me suis sérieusement posé la question si j'allais continuer; si "Police", le prochain roman, serait mieux... d'où mon intérêt à lire cet article pour me forger une idée - et me conforter dans mes craintes !
    Donc voilà, c'est officiel : j'arrête. Pour moi, Harry Hole est mort à la fin de Fantôme. Et c'est bien comme ça - j'ai eu beaucoup de plaisir à lire Jo Nesbo jusqu'à présent et je ne souhaite pas être encore plus déçue que je ne le suis déjà. Il y a assez de bons auteurs, il suffit de les chercher !

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