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Auteurs M - Page 14

  • Kris/Maël : Notre Mère la Guerre, qui sont les monstres ?

    guerre,peguy hugo,maël,kris,notre dame la guerreIf any question why we died,

    Tell them, because our fathers lied.

    Rudyard Kipling, Epitaphs of the war

     

    11 novembre 2011 au parc Mon Repos à Genève. Tous ce qu'il y a d'institutions officielles sont présentes devant le monument aux morts pour célébrer le devoir du souvenir. Dans ces moments solennels, teintés d'émotions et après tant d'années passées, il est difficile de pouvoir s'imaginer la souffrance et le sacrifice de ces hommes qui ne sont plus. Des discours lyriques et solennels évoquent le devoir, la camaraderie,  le dévouement ainsi que l'abnégation de ces soldats, mais passent sous silence toute l'horreur et l'absurdité des combats. Il est vrai que le lieu et le moment ne s'y prêtent guère.

     

    Pour se faire une idée des atrocités de cette guerre que l'on disait la dernière, ce ne sont pas les ouvrages qui manquent. Le dernier en date est une série de bd intitulée Notre Mère de la Guerre, scénarisée par Maël et dessinée par Kris. Le premier album est sorti en 2009 et la troisième complainte est parue début novembre 2011, soit quelques jours avant la célébration de l'Armistice de 1918.

     

    C'est par le biais du polar que les auteurs ont décidé d'aborder le sujet. En ce début d'année 1915, à quelques semaines d'intervalles, ce sont les corps de trois femmes qui sont découvertes dans les tranchés. Sur chacune d'entres elles, l'assassin a laissé une lettre d'adieu rédigée par ses soins. C'est au lieutenant de gendarmerie Roland Vialatte qu'il incombe de découvrir l'auteur de cette ignominie. Car si l'on peut tuer en masse au nom de la patrie, il n'est pas question que l'on se permette de telles exactions dans le dos des soldats. L'horreur et la barbarie, juste une question de point de vue et de victimes. C'est donc au cœur des tranchées, en première ligne que le lieutenant Vialatte devra se rendre pour mener à bien son enquête. L'idéalisme de la guerre qu'il s'était forgé par le biais des écrits de Victor Hugo et Charles Peguy sera mis à mal avec le réalisme de combats acharnés et sauvages. Interrogatoires de jeunes poilus terrorisés, résignations de sous-officiers écœurés par ces massacres absurdes, c'est par ces témoignages que le lieutenant Vialatte découvrira le vrai visage de la guerre. Au milieu de cette folie guerrière, parviendra-t-il à identifier le meurtrier qui a de nouveau sévi en assassinant une quatrième jeune femme ?

     

    La délicatesse et la finesse du trait de Maël alliée à la légèreté de ses gouaches transfigurent l'horreur des scènes qui sont dépeintes. Pour s'en convaincre il n'y a qu'à s'attarder sur la couverture du premier album qui reflète le malaise qui se dégage au travers de chaque album. Avec un scénario bien rythmé, Kris nous guide dans les méandres de cette guerre atroce et en décrit toutes les turpitudes et les flétrissures avec des textes aux empreintes lyriques savamment dosées. Une idée de génie d'avoir abordé ce pan tragique de l'histoire par le biais du polar, même si l'idée n'est pas nouvelle. Il fallait cependant oser mettre en scène un sérial killer sévissant dans les tranchées, au cœur même de la barbarie humaine qui souligne l'ambivalence pour un tueur solitaire d'opérer dans une logique de tueries de masse orchestrée par des nations belliqueuses. Qui sont vraiment les monstres ? Cette question sous-jacente, plusieurs  personnages du récit se la pose sans pour autant obtenir de réponse. Avec Notre Dame la Guerre, vous découvrirez également un sujet rarement abordé avec ces jeunes délinquants (des meurtriers parfois) extraits des institutions pour mineurs pour « servir » au front, ceci au nom de la France alors qu'ils n'avaient pas 18 ans ...

     

    Qui sont les monstres ? Maël et Kris vous en donnent la réponse avec un récit âpre et prenant, chargé d'émotion qui s'achèvera avec un quatrième album encore à paraître, intitulé Requiem qui clôturera ce long chant plaintif.

     

     

    Maël/Kris : Notre Dame la Guerre, Première Complainte. Edtions Futuropolis 2009.

    Maël/Kris : Notre Dame la Guerre, Deuxième Complainte. Editions Futuropolis 2010.

    Maël/Kris : Notre Dame la Guerre, Troisième Complainte. Edition Futuropolis 2011.

    Maël/Kris : Notre Dame la Guerre, Requiem. Editions Futuropolis (à paraître)

    A lire en écoutant : Symphonie n° 3 d'Henryk Gorecki par David Zinman dirigeant le London Sinfonietta.  Soprano : Dawn Upshaw / Nonesuch Records, 1992.

     

     

  • HENNING MANKELL : LE CHINOIS, LA VENGEANCE ETERNELLE !

    chine,suède,mankellDes crimes absolument terrifiants, une mise en scène hallucinante c'est toujours ainsi qu'ont démarré la plupart des romans de Henning Mankell et « Le Chinois », dernier opus de l'écrivain suédois ne déroge pas à la règle. Dans le nord de la Suède, un mystérieux assassin a décimé tout un village. Au total ce ne sont pas moins de 19 personnes qui ont été massacrées à l'arme blanche. C'est ainsi que démarre l'enquête que mène la juge Birgitta Roslin en marge des services de police pour découvrir la raison pour laquelle les parents adoptifs de sa mère, qui font partie des victimes, ont été ainsi assassinés. D'un peuple exploité à la superpuissance qu'est devenue la Chine, Birgitta Roslin découvrira différents aspects de ce pays devenu un acteur incontournable de la géopolitique mondiale autour duquel un frère et une sœur s'entredéchirent jusqu'à la mort pour conduire la destinée de cette nation.

     

    Exit donc Kurt Wallander et ces enquêtes de longues haleines qui mettaient en relief les travers d'un pays que l'on avait pour habitude de dépeindre comme le modèle idéal de société. L'auteur s'était déjà émancipé en nous livrant une enquête menée par la fille du célèbre commissaire, Linda Wallander, dans « Après le Gel ». Il avait fait une seconde tentative avec « Le Retour du Professeur de Danse » où le personnage central, Stefan Lindmann, demandera une mutation à Ystad où il aura une relation avec Linda Wallander. Dans ces deux tentatives d'émancipation, il y avait quelque chose de très « wallanderien » aussi bien dans les personnages que dans la structure de l'histoire, chose que l'on ne retrouve absolument pas avec le dernier roman de Mankell qui s'est définitivement affranchi de son personnage culte, ce qui est à saluer.

     

    Avec « Le Chinois », nous nous plongeons dans un autre type d'intrigue qui sont peut-être à mettre en lien avec les romans « blancs » de l'auteur qui s'ingénie désormais à mettre en lumière les travers d'un ordre mondial cynique. On reprochera peut-être quelque défaut dans la structure de l'histoire avec ce retour dans le passé qui nous dévoile le nœud de l'intrigue au beau milieu du roman. Henning Mankell n'a peut-être pas le talent d'un Arnaldur Indridason pour ce type d'enquête qui nous plonge dans le passé historique d'une nation. On regrettera également le manque de profondeur du personnage principal qui apparaît plus lisse et plus terne que les personnages précédents de l'auteur. Peut-être faudra-t-il plusieurs romans pour que l'on découvre les aspérités de Birgitta Roslin afin que l'on puisse s'attacher à cette juge suédoise atypique.

     

    Malgré ces défauts, « Le Chinois » a le très grand mérite de mettre en relief les enjeux fondamentaux d'un pays qui est encore en pleine mutation et dont les défis nationaux virent aux défis planétaires avec en toile de fond la convoitise de ce continent que l'auteur affectionne tant : L'Afrique !

     

    « Le Chinois » dénonciation géopolitique haletante et inspirée, avec ce culte des ancêtres qui flirte vers la folie et qui ensanglantera les paysages enneigés de la Suède.

     

    Henning Mankell : Le Chinois. Editions Policiers Seuil / 2011. Traduit du suédois par Rémi Cassaigne.

    A lire en écoutant : Souvenir de Chine - Jean-Michel Jarre - Les concerts en Chine.

     

  • MARC-ANTOINE MATHIEU : 3’’, JUSTE LE TEMPS DE …

    3'',borges,escher,marc-antoine mathieu,polarPas vraiment une BD, quoique ...

    Pas vraiment un polar, quoique ...

    3 secondes c'est un concept graphique de Marc-Antoine Mathieu qui nous entraîne dans une perspective labyrinthique digne des récits de Borges.

     

    Cet homme qui braque son arme. Le coup de feu qui part. Pour qui est destinée la balle ? Et qu'elle est ce scandale qui secoue le milieu du football ? Cette femme tendue dans l'avion, que craint-elle ? Que viennent faire Carine Tonca, Antoine Crac et Toni Carcena dans cette histoire ? Qu'elle est cette compagnie Swiss qui délivre des billets Swissair ?

     

    Sans un seul dialogue c'est au travers  d'une perspective sans fin que l'on découvre tous les rouages de ce polar et on peut vraiment parler d'une plongée dans l'histoire lorsque l'on s'enfonce dans le regard de cet homme apeuré. La suite n'est qu'un renvoi d'un reflet à un autre avec une sublime précision graphique. Il faut s'attarder sur le détail de chaque case pour découvrir tout ce qui s'est produit avant ces 3 secondes qui deviennent finalement la conclusion d'un long récit sous-jacent. Entre la case noire du départ et la case blanche finale, il faudra admettre qu'à la première lecture on aura manqué bien des évènements et plusieurs lectures seront nécessaires pour décrypter les rouages de cette minuscule fraction de temps. C'est tout l'intérêt du concept original de cette histoire.

     

    Lorsque vous aurez terminé l'ouvrage vous pourrez vous connecter sur le web pour découvrir la vidéo élaborée à partir de l'intégralité des cases. Une façon de redécouvrir l'histoire en zoomant  les détails sur lesquels vous souhaitez vous attarder tout en étant maître de la vitesse de déroulement. C'est peut-être de cette manière que vous repèrerez dans l'une des cases, cet ancien footballeur célèbre et si vous ne le trouviez pas, vous pourrez au moins découvrir son nom au travers des anagrammes de plusieurs personnages de l'histoire.

     

    Puis comme si cela ne suffisait pas, vous vous retrouverez au travers du forum pour commenter vos impressions, vos découvertes et vos observations. Cette plate-forme vous permettra peut-être de répondre à vos doutes et vos interrogations.

     

    Un très bel ouvrage d'un auteur bourré de talent qui rend hommage à de nombreux artistes tels que MC Escher, Niki de Saint-Phale, Mark Shaw, Amish Kapoor, Lewis Trondheim et bien d'autres encore.

     

    Pour décrypter toutes les clés de ce magnifique ouvrage gageons qu'il vous faudra bien plus de 3 secondes pour y parvenir. A vos chronos !

     

    Marc-Antoine Mathieu : 3''. Editions Delcourt 2011.

    A lire en écoutant : Walking in the Rain. Album : Flash and the Pan (mai 2011).

     

     

  • FUREUR NOIRE : LEO MALET/TARDI, BROUILLARD AU PONT DE TOLBIAC

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    Fiat Lux ! Que la lumière soit !

    Première phrase de la Genèse c'est aussi le nom de l'agence du célèbre détective Nestor Burma, détail piquant quand on connaît le parcours de son créateur, l'écrivain Léo Malet. Une jeunesse dans le milieu anarchiste que l'auteur évoque dans Brouillard au pont de Tolbiac que l'on peut considérer comme son meilleur roman de la série inachevée des nouveaux mystères des Paris.

     

    Nestor Burma reçoit un message d'un certain Abel Benoît qui lui demande de le rencontrer à l'hôpital de la Salpêtrière afin « d'empêcher un salaud de mijoter des saloperies ». Une rencontre qui n'aura pas lieu puisque l'auteur de la lettre meurt des blessures que lui a infligé son agresseur. C'est une belle et mystérieuse gitane qui lui annonce le décès, devant l'établissement hospitalier. Poussé par la curiosité, Nestor Burma découvrira qu'Abel Benoît n'est autre qu'Albert Lenantais un camarade anarchiste qu'il a connu il y a de cela plus de 20 ans. Un époque où notre détective de choc, alors jeune crieur de journaux, vivait au foyer végétalien de la rue Tolbiac, fréquenté par toute une clique d'idéalistes et d'anarchistes. Une histoire d'amour avec une belle gitane, un ancien flic au bord de la folie, une plongée dans le passé, des rencontres avec d'anciens anarchistes embourgeoisés avec en arrière-plan le XIIIème arrondissement de Paris pour cette enquête de Nestor Burma. Parviendra-t-il à découvrir qui a agressé Albert Lenantais ; Arrivera-t-il à empêcher le salaud de commettre des saloperies et réussira-t-il à résoudre une enquête là où un ex-flic n'y est pas parvenu, malgré un acharnement de 20 ans qui le conduira à sa perte tragique sur le pont de Tolbiac.

     

    Bien plus que le livre, c'est l'adaptation qu'en a faite Tardi que je vous propose de découvrir avec une BD absolument somptueuse. Le quartier du XIIIème n'est plus ce qu'il était, mais lorsqu'il en a fait l'adaptation en 1982, le dessinateur, grâce à un travail de recherche et de documentation fouillé est parvenu à restituer l'atmosphère poisseuse de ce quartier. Des lieux désormais mythiques, comme la place d'Italie, le viaduc d'Austerlitz, la rue et le pont Tolbiac ont été restitués fidèlement grâce au talent de l'artiste. L'escalier entre la rue Chevralet et la rue Tolbiac, lieu de la dernière rencontre entre Belita et Nestor Burma existe toujours, tout comme le bâtiment de l'Armée du Salut, conçut par un certain Le Corbusier. Ce n'est pas le cas du Viaduc métallique de Tolbiac où se déroule une part importante de l'intrigue. Cet ouvrage a été complètement démonté et rouille désormais dans un entrepôt.

     

    Léo Malet voulait écrire un roman contre le XIIIème, mais ce fut un échec parfait puisqu'en transposant sur son personnage fétiche, des pans de sa jeunesse il est parvenu à dégager des émotions puissantes qui se sont fichées dans les décors de ce quartier. Vous l'aurez compris, le personnage principal de cette histoire c'est bien évidemment Paris et ce XIIIème arrondissement qui émerge des cases de cette magnifique BD. Vous vous perdrez dans ces ruelles étroites, exhalant ses vapeurs de brouillards tout en trébuchant sur le pavé luisant de pluie. Vous frémirez en arpentant la sinistre rue Watt et le sombre passage des Hauts-de-Forme. Et pour vous remettre, vous pourrez boire un calva ou un ballon de rouge en vous appuyant sur le zinc du comptoir d'un ces cafés surpeuplés de la place d'Italie.

     

    Pour évoquer l'œuvre de Léo Malet, les organisateurs de la Fureur Noire, ont invité Guy Marchand qui a connu l'auteur et qui a incarné le personnage de Nestor Burma dans un série télévisée dont les producteurs ont eu la mauvaise idée de la transposer dans le Paris nos jours (années 90), laissant de côté, l'aspect rétro de l'époque des années cinquantes. Cet acteur de talent qui s'est vu décerner un César pour le meilleur second rôle dans Garde à Vue (encore un polar !) de Claude Miller, exposera son point de vue sur l'un des détectives phares de la littérature française de l'après-guerre. Retrouvez le donc le mardi 4 octobre 2011 à 2030 à la salle du Faubourg.

    « Paris. La nuit sur le pont de Tolbiac, un homme rôde. Dans son regard la folie. »

     

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    Léo Malet/Tardi : Brouillard sur le pont de Tolbiac. Casterman 1982.

     

    A lire en écoutant :  Ni Dieu ni Maître - Léo Ferre - Album : Et Basta !

     

     

     

  • Fureur noire : Manotti / DOA, le polar politique

    fureur noire,polar,politique,élections,police,banlieue,commissariat,doa,manotti,série noireA l'heure des élections, c'est bien évidemment le sempiternelle sujet de la sécurité qui enflamme les débats où l'on assène aux citoyens, à coups de slogans ravageurs et phrases rapides, les recettes qui vont remettre la cité sur les rails.

    Police de proximité ! Patrouilles pédestres ! Tolérance zéro ! Des termes génériques qui prennent désormais des teintes politiques sans que l'on soit bien certain que les protagonistes en connaissent toutes les implications. La plupart d'entre eux seraient bien avisés de se pencher sur les ouvrages de nombreux spécialistes qui se sont intéressés à la question depuis bien des années, ceci avant même que ce sujet émotionnel, ne devienne le thème majeur des politiques et ne soit justement dévoyé par certains d'entres eux ! Dans le domaine francophone, on peut citer : Sebastien Roché, Loïc Wacquant, Jean-Paul Brodeur, Dominique Monjardet, Jean-Louis Loubet de Bayle et François Dieu. Certains ouvrages de ces auteurs sont même disponibles en ligne !

    Il faut l'admettre certaines de ces études, toutes passionnantes qu'elles soient, peuvent tout de même s'avérer extrêmement arides et on peut aborder le sujet de la sécurité et de la police par le biais du polar en s'intéressant particulièrement aux romans de nos voisins français. 

    Avec « Bien connu de nos services » Dominique Manotti nous invite à partager la vie quotidienne des policiers du commissariat de Panteuil (lieu fictif), dans la banlieue nord de Paris, dirigé par la commissaire Le Muir, femme ambitieuse qui a adopté la politique du chiffre imposée par les pouvoirs politiques du Ministère de l'Intérieur. Flics aguerris, jeunes débutants, hiérarchie dépassée, truands chevronnés, petits voyous, tout ce petit monde s'entrecroise dans un chassé-croisé rapide et passionnant. Description du travail des BAC, de police-secours qui semble tellement vain au milieu de banlieues défavorisées, de camps gitans et de squats vétustes prêts à flamber. Afin de favoriser l'intrigue, l'auteur a parfois forcé le trait au détriment de la réalité. Mais cela importe peu, car au travers de ces pages on peut tout de même se rendre compte du désarroi de ces policiers qui, manipulés par leurs hiérarchies et le pouvoirs politiques, se referment sur eux-mêmes se révélant ainsi incapables de faire face aux défis sociaux qui les submergent. Débrouillardise et improvisation pour régler les problèmes au jour le jour tout cela à l'ombre de la compromission et  de la corruption. Un tableau sombre, probablement exagéré mais qui reflète tout de même le malaise du monde policier.

     

    Pour DOA le tableau n'est guère plus reluisant même s'il s'attarde sur les SG et le monde des services secrets pour dépeindre les arcanes d'un monde souterrain inquiétant. « Citoyens Clandestins » c'est un thriller haletant avec cette menace d'attentat à la Dioxine sur la France par un groupuscule d'islamistes radicaux. Une description froide et troublante de réalisme d'une traque sanglante d'un ensemble de clandestins, d'agents doubles, d'espions à la solde d'une clique de manipulateurs qui mettent la raison d'état au-dessus de tous les principes moraux. Un livre volumineux extrêmement bien documenté qui se lit d'une traite, même s'il pêche parfois par son ton quelque peu professoral.

     

    fureur noire,polar,politique,élections,police,banlieue,commissariat,doa,manotti,série noireLa réunion des ces deux talents se retrouve dans « L'Honorable Société », livre à quatre mains de moins bonne facture qui se penche sur les arcanes des institutions étatiques liées à l'énergie atomique. Police criminelle, DGSE, éco terroristes, journalistes et milieu patronal s'interrogent ou tentent de dissimuler les mobiles du meurtre d'un policier rattaché à la commission pour l'Energie Atomique. Le tout se déroulant sur fond de campagne présidentielle, on assistera à la compromission des diverses instances étatiques qui useront de tous les expédients, même les plus extrêmes, pour parvenir à leur fin. On reprochera le côté impersonnel des personnages qui manquent de saveur. Toutefois l'intrigue, quoique classique, nous entrainera dans un récit passionnant, assez inquiétant et très bien documenté qui, espérons-le, ne s'avérera pas trop réaliste. Un sujet sensible (le nucléaire en France) que l'on retrouve d'ailleurs au cœur des débats pour l'élection présidentielle, rendent les tribulations du commandant Petrus Paris encore plus passionnantes. Cet enquêteur de la police criminelle, secondé par son équipe, devra faire preuve d'une pugnacité des tous les instants pour parvenir à résoudre cette sombre affaire.

     

    Pour la Fureur de Lire, on retrouvera Dominique Manotti et DOA lors d'une table ronde qui aura lieu le jeudi 6 octobre 2011 à 21h50 à la salle du Faubourg, sur le thème du polar social et politique. Le polar qui devient protestataire et contestataire, cela promet un beau débat qui sera précédé d'une pièce de théâtre intitulée « Je refuse de répondre » qui relate le combat de Dashiell Hammett en proie à l'inquisition de la commission du sénateur McCarthy. Cela se déroulait en 1953. Le polar contestataire, protestataire, une forme d'écriture qui ne date pas d'hier.

     

     

    Dominique Manotti : Bien connu des services de police. Série Noire/Gallimard 2010.

    DOA : Citoyens Clandestins. Série Noire/Gallimard 2007.

    Manotti / DOA : L'Honorable Société. Série Noire/Gallimard 2011.

     

    A lire en écoutant : Demain c'est loin - IAM/L'Ecole du Micro d'Argent/Delabel-Virgin 1997.